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14/03/2023 12:39

ENVIRONNEMENT : «Moins de 4% des accidents de la nature sont liés à la chasse», assure Willy Schraen

À quelques jours du congrès se tenant à Beaune, le président de la Fédération nationale des chasseurs a fait étape en Bourgogne-Franche-Comté, le 9 mars dernier, à Norges-la-Ville. «Le loup a sa place comme tous les grands prédateurs», a déclaré Willy Schraen avant d'apporter un bémol.
Le patron des chasseurs a terminé son tour de France des fédérations par la Bourgogne-Franche-Comté, le 9 mars 2023, en s'arrêtant à Norges-la-Ville, siège de la fédération des chasseurs de la Côte-d'Or, à l'est de Dijon.

L'équipe nationale a présenté les actions en cours en termes techniques, juridiques et communicationnels devant une quarantaine de personnes dont les  huit présidents de fédérations départementales de Bourgogne-Franche-Comté.

La délégation a été accueillie par Pascal Sécula, président de la fédération de Côte-d'Or et de la fédération régionale, trésorier de la fédération nationale. On compte 10.500 adhérents en Côte-d'Or, 72.000 en Bourgogne-Franche-Comté et un million en France.


Willy Schraen est président de la fédération nationale des chasseurs depuis 2013. Son mandat a été renouvelé pour cinq ans en 2022. Le prochain congrès se déroulera à Beaune, les 22 et 23 mars prochains.

«On fait le tour des sujets qui peuvent toucher la chasse»


Quelles sont les problématiques des chasseurs en Bourgogne-Franche-Comté ?

«Des problématiques de dégâts [causés par le gibier], des grandes questions sur la sécurité – ce qui se passe beaucoup aujourd'hui au niveau national et au niveau des médias – et aussi cette stigmatisation de la chasse, des violences vis à vis de la chasse, tout ce qui peut se passer avec des gens qui ne partagent pas nos valeurs et qui nous le disent plutôt de façon violente.»

«Et aussi d'autres sujets liés à l'agriculture, lié à la présence du loup. On fait le tour de l'entièreté de ces sujets qui peuvent toucher la chasse de près ou de loin.»

«Un engagement de faire baisser de 20 à 30% les dégâts agricoles»


Pouvez-vous nous parler de l'accord avec la FNSEA ?

«C'est un accord global, il n'y a pas que la FNSEA. Il regroupe à la fois le ministère de l'Agriculture et son ministre Marc Fesneau, le ministère de la Transition écologique et sa ministre Bérangère Couillard [NDLR : secrétaire d’État chargée de l’Écologie] mais aussi les trois syndicats agricoles.»

«On a décidé de se mettre autour de la table et de trouver une solution pragmatique pour améliorer la situation vis à vis des dégâts agricoles en France. Du côté de la chasse, on a pris un engagement de faire baisser de 20 à 30% ces dégâts.»

«D'un autre côté, le mode agricole a aussi reconnu que nous avions besoin d'outils supplémentaire. Il y a de grandes discussions autour qui s'opèrent sur des sujets clés, par exemple comme l'agrainage dissuasif. Il y a des pics d'appétence des récoltes où l'on ne peut pas calmer les sangliers et leur donner envie plutôt de rester en forêt que d'aller ravager les cultures.»

80 millions d'euros apportés par l’État


«On voit l'importance de l'alimentation dans ce pays, on voit l'importance de l'action des chasseurs pour préserver ces cultures et cette alimentation. Donnons-nous aussi les moyens.»

«Pour réaliser tout ça, l’État a mis la main à la poche et nous a amené 60 millions d'euros sur trois ans plus le plan de résilience cette année, autour de 20 millions d'euros.»

La chevrotine dans la «boite à outils» territoriale


«On essaie de chasser les sangliers. (…) Des fois, l’État ou les Régions ou les Départements ont mis en place des restrictions dans la possibilité de pratiquer la chasse. (…) Je vais prendre un exemple concret : il y a des territoires en France où l'on peut utiliser la chevrotine, d'autres où on ne peut pas.»

«Il ne s'agit pas de vouloir généraliser cette pratique. (…) L'utilisation d'une munition qui n'a qu'une faible portée pour un tir très rapproché et qui n'a aucun danger pour les gens qui habitent dans le secteur, c'est par exemple une avancée importante pour nous. Là, on pourra agir. Hors de question de tirer des balles entre les maisons !»

«Voilà quelque chose de pragmatique et de bon sens qui, utilisé intelligemment, pourra permettre à la fois de déloger ces animaux, d'en réduire la population et de diminuer les dégâts, ce que l'on ne peut pas faire aujourd'hui.»

«La chevrotine est comme une cartouche, c'est de gros grains de plombs dans une cartouche. La portée d'un fusil de chasse, ce n'est pas du tout la portée d'une carabine, c'est quelques dizaines de mètres tandis qu'une carabine, c'est quelques centaines de mètres.»

«La chevrotine est autorisée dans deux départements pilotes dont la Corse. (…) Elle est interdite depuis pas mal d'années, plutôt pour des raisons d'éthique en estimant que cette chevrotine était trop efficace à certains endroits.»

«On est quand même devant des problématiques de paiement des dégâts qui sont tellement importantes pour nous que l'éthique, c'est bien, mais, en attendant, on ne pourra pas faire la poche des chasseurs ad vitam aeternam

«L'idée est de mettre une boîte à outil à disposition des territoires. Ensuite, il y a des discussions entre les présidents de fédérations et l’État à travers les préfets et nos collègues du monde agricole. (…) On peut le mettre sur une simple partie d'un département avec des conditions très strictes d'utilisation.»

«Moins de 10% des accidents de chasse sont liés à l'alcool»


Concernant les sujets de sécurité, le gouvernement souhaite mettre en place une contravention liée à l'alcoolémie en pratiquant la chasse. Vous avez accompagné la mesure, avez-vous une idée du calendrier de déploiement ?

«Les choses vont aller assez vite maintenant. Nous y sommes d'ailleurs tout à fait favorables. Ça a surpris beaucoup de monde que je puisse être favorable mais je suis d'abord un chasseur qui aime emmener sa famille, sa femme et ses enfants, à la chasse. Je n'ai pas du tout envie de me retrouver à côté de quelqu'un qui serait sous l'emprise de l'alcool avec une arme.»

«On le voit dans les statistiques : vous avez moins de 10% des accidents qui sont liés à l'alcool. Pour la voiture, c'est presque 40%. Il y a longtemps qu'on est sorti de 'la galinette cendrée' du sketch des Inconnus. Les chasseurs ne picolent pas et picolent beaucoup moins que la moyenne nationale quand ils sont à la chasse.»

«On a divisé par cinq le nombre d'accidents de chasse»


Vous avez évoqué la contestation parfois «violente» de la pratique de la chasse. Y a-t-il une concurrence pour l'accès à la nature entre les différents usagers ?

«Depuis trente ans que l'on gère cette problématique effectivement des accidents de chasse puisque c'est ça qui a lancé ce débat, on a divisé par cinq le nombre d'accidents de chasse en général et par quatre le nombre d'accidents mortels.»

«Cela veut que, sans aucune loi, sans aucune intervention de l'exécutif ou d'un parlementaire qui aurait eu une idée lumineuse sur la question, on a déjà fait un énorme boulot parce que, dans le même laps de temps, avec l'explosion du grand gibier, on a multiplié par cinq le nombre de coups de carabine.»

«Si on n'avait rien changé, quand on était à 600-700 accidents par an, on devrait aujourd'hui probablement au-dessus de 3.000. On est à moins de 100 depuis plusieurs années et ça n'arrête pas de baisser et ça va encore baisser cette année.»

«Cette année, il y aura six morts. Six de trop ! 70-80 accidents probablement, sûrement 70-80 de trop ! Regardez le travail qui a été effectué par le monde de la chasse sans aucun cadrage, sans aucune demande à une époque où tout le monde s'en foutait.»

«Vouloir interdire la chasse le dimanche, il n'en est pas question»


«Maintenant, il y a le moindre accident qui se passe, on est surmédiatisé. (…) Il faut remettre ça dans le contexte. Il y a des accidents entre chasseurs. Vous m'excuserez mais après tout, cela nous regarde, on connaît le risque quand on va à la chasse. Le nombre d'accidents qui interfèrent entre chasseurs et non-chasseurs, c'est moins de 10 par an. Le nombre de morts malheureusement non-chasseur – et c'est un drame terrible quand il y en a – c'est moins de un par an. La réalité des chiffres, c'est ça. Vous imaginez la campagne médiatique qui a été faite avec des chiffres aussi ridiculement accidentogènes que la chasse peut représenter. Moins de 4% des accidents de la nature sont liés à la chasse, c'est la vérité, et pourtant nous sommes armés. »

[NDLR : La statistique mise en avant par Willy Schraen est tirée d'une étude de la fédération des chasseurs de l'Aveyron qui a analysé les données de Santé publique France portant sur les accidents mortels parmi les pratiques sportives dans la nature. Les sports de montagne présentent le bilan le plus élevés avec 37% d'accidents mortels (retrouver l'étude).]

«Évidemment, il y a un sentiment de peur alors que la chasse n'est pas dangereuse et pas accidentogène. (…) Il est hors de question non plus que l'on passe à des extrémités qui soient incompatibles avec ce que nous sommes, c'est à dire des gens qui ont des propriétés et qui vivent et qui chassent sur ces territoires.»

«Vouloir interdire la chasse le dimanche, il n'en est pas question. On a quand même encore le droit d'être chez soi. (…) Qu'il y ait des accords sur le territoire public, c'est autre chose.»

«Rajouter la chasse» dans les applications des randonneurs


«On nous parle de mettre des applications, que le chasseur soit géolocalisé. C'est ridicule, ce n'est pas ce que veulent les gens. On a deux types de personnes dans la nature. On a des professionnels de la nature qui font de la rando, du VTT, qui vont passer sur 10-20 territoires dans la même journée, parfois 5-10 communes. Ces gens-là ont déjà des applications – c'est le Waze ou le Coyote rural –, il suffit juste de rajouter la chasse dans ces applications. On signale et on fait un détour. Mettons la chasse pour ces gens-là, c'est important.»

«Ensuite, la grosse partie des gens qui nous intéressent dans cette affaire, c'est simplement la famille française (…) qui va se promener deux heures en forêt. Ce n'est pas la peine de créer une application pour géolocaliser les chasseurs qui ne vont pas arrêter de bouger toute la journée, cela ne va rien indiquer de cohérent pour ces personnes. Il faut leur donner une application de cartographie 'où je peux aller me promener ?' pour celui qui n'aime pas les chasseurs, qui ne veut pas entendre de coup de fusil à proximité.»

«Sur des lieux publics, il n'y a aucun problème. Les forêts domaniales en France sont déjà archi-partagées. Dès qu'elles sont péri-urbaines, elles ne sont pas chassées le week-end, les jours fériés et les vacances.»

«On discute avec toutes les fédérations de plein air, il n'y a aucun problème.»

«Le loup est un opportuniste extraordinaire»


Vous avez évoqué la présence de loups. On connaît la problématique vis à vis de l'élevage en Bourgogne-Franche-Comté. Qu'elle est la problématique vis à vis des chasseurs ? Est-ce le fait qu'il soit un grand prédateur, un concurrent face aux prédateurs que les chasseurs sont aussi ?

«Il y a évidemment cette idéologie très écologiques radicale qui dit 'on va remplacer l'être humain par les grands prédateurs. C'est très en vogue, c'est le paroxysme de l'idéologie anti-humaine que l'on peut imaginer.»

«Sauf que la France n'est pas le parc de Yellowstone. Est-ce qu'il faut attendre qu'il y ait un gamin qui se fasse bouffer au coin d'un bois en rentrant de l'école pour qu'on comprenne que le loup ne fait pas de la différence, la viande, c'est de la viande.»

Il n'y a pas encore eu d'attaque d'être humain...

«Il y en a eu une, il y a quinze jours, qui a frôlé la catastrophe...»

[NDLR : la personne concernée a témoigné en apportant des détails précis auprès du journal La Provence.]

Avec quelqu'un qui a jeté des pierres sur l'animal...

«Une fois que le loup se pointe en pleine journée et commence à regarder ce qui se passe dans le jardin d'une maison, je me pose des questions. On n'est plus tellement sur les animaux qui se sauvent quand ils sentiraient la présence de l'homme.»

«Le loup est un opportuniste extraordinaire. On se rend compte que c'est beaucoup plus facile de courir après une génisse ou après un mouton que de courir après un cerf ou un chevreuil.»

«Demain, si ça va beaucoup mieux de courir après les gamins qui sortent de l'école qu'après les moutons et les génisses, c'est ce qui se passera.»

«À partir de là, on a une position très simple. Il faut des lois en France et des écosystèmes et c'est important. Il a sa place comme tous les grands prédateurs. Par contre, il ne faut pas se tromper. Il y a une capacité d'accueil à ne pas dépasser, à bien définir.»

«Aujourd'hui, tout le monde se ment. On nous annonce des chiffres de loups qui sont complètement farfelus parce que tout le monde a peur qu'on viendrait à éradiquer cette espèce.»

«Il faut absolument se mettre autour de la table. Les chasseurs connaissent bien mieux que tout le monde ce qui se passe sur les territoires. Nous, on sait à peu près ce qu'il y a comme loups, on sait que c'est trois à quatre fois plus que ce que l'on nous annonce aujourd'hui. On ne dit pas qu'il n'en faut pas. On dit juste qu'à un moment, il faut le quantifier pour que ce soit acceptable à la fois pour les gens qui se promènent pour qu'il n'y ait pas de risque mais aussi pour nos éleveurs, nos bergers. On a besoin de l'élevage en France. On ne peut pas tout fermer parce qu'il y a quelques énervés qui veulent des loups partout.»

«Il faut tuer quelques loups quand ça pose problème»


Est-ce qu'il y a des problèmes directs avec les chasseurs ?

«Il peut avoir des interférences au niveau de la chasse. Je prends l'exemple du mouflon. Je ne donne pas trois ans qu'il n'existe plus sur le territoire national. Il n'y a rien de meilleur qu'un mouflon. C'est juste un mouton sauvage. Viande grasse, extrêmement goûteuse. Nous, on le sait mais les loups aussi !»

«Est-ce qu'au nom de la biodiversité et des écosystèmes et de la présence de loups dans ces écosystèmes, on doit laisser éradiquer une espèce ? (…) À un moment, il y a un surnombre. Quand il y en a de trop, ils ont faim, ils attrapent ce qui est le plus facile. Le mouflon n'est pas le plus malin que l'on peut trouver dans les massifs et physiquement, ce n'est pas celui qui a la meilleure défense donc il se fait vite attraper. Après, on passe à tous les chamois et à tous les chevreuils.»

«On n'arrête pas l'hémorragie de biodiversité ? Au nom d'une seule espèce, on en laisse détruire d'autres ? Je pense que ce n'est pas bien si le mouflon disparaît demain de ce pays. Il a autant de droit d'être là que le loup. Et ça, c'est la main de l'homme. Ça, faut l'accepter. Les équilibres doivent être trouvés. De temps en temps, il faut tuer quelques loups quand ça pose problème.»

«Le loup, on le remarque fort parce qu'il mange le bétail mais il y a plein d'autres espèces aujourd'hui qui sont dans des proportions totalement anormales. Prenez le Cormoran noir, cette espèce est en train de nettoyer dans plein d'endroits tout ce qui est poissons, écosystèmes halieutiques. Ce n'est pas normal. Oui, il faut des cormorans mais pas dans des proportions pareilles ! C'est le jusqu'au-boutisme systématique de l'écologie radicale et l'animalisme exacerbé. Je le combats tous les jours.»

Voyez-vous également un sujet avec les lynx ?

«Il n'y a pas de sujet avec le lynx mais on le voit arriver. Comme le reste. Est-ce qu'on est capable de se mettre autour d'une table et de définir quelque chose de cohérent pour cette espèce ? Je le redis, elle a toute sa place dans les territoires mais jusqu'à quel niveau ?»

«78 millions d'heures produites bénévolement pour la nature»


Quel est le lien entre chasseurs et biodiversité ?

«Une étude avait été faite par l’État pour quantifier l'impact de l'action des chasseurs sur la biodiversité. Quand tout le monde pose son fusil ou sa carabine et va bosser dans la nature, c'est d'abord 78 millions d'heures produites bénévolement pour la nature.»

«L’État a chiffré 4 milliards d'euros écosystémiques. (…) Quelle est l'association pour la protection de la nature qui peut se prévaloir d'apporter 4 milliards d'euros bénévoles à la nature tous les ans ?»

«Le chasseur, c'est celui qui va nourrir tous les oiseaux l'hiver, c'est celui qui nettoie la nature, qui entretient les zones humides, qui s'occupe des forêts, des chemins ruraux.»

«Quoiqu'en disent nos ennemis sous forme idéologique, nous, on adore les animaux, on adore la nature, on est heureux quand on est là-dedans. (…) Dans la nature, de temps en temps, on va chercher quelques animaux, on prend plaisir à les chasser, on prend plaisir à les mangers. (…) À côté de ça, on est les premiers concernés pour une biodiversité forte.»

En marge de la réunion du jour, Pascal Sécula a annoncé la préparation par la Fédération nationale des chasseurs d'un événement «J'aime la nature propre» se déroulant partout en France à la même date et appelant chasseurs et non-chasseurs à «nettoyer tout ce que l'on trouve dans la nature». Rendez-vous au printemps 2024.

Propos recueillis par Jean-Christophe Tardivon

Le dossier du ministère de la Transition écologie sur le plan sécurité à la chasse 2023


La journée des jeunes chasseurs de Côte-d'Or 2022






Pascal Sécula et Willy Schraen, respectivement trésorier et président de la Fédération nationale des chasseurs


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