
«J’aime la Praluline, j'aime beaucoup travailler le chocolat en Bean-to-Bar. Je ne saurai pas les départager!» confie le jeune pâtissier.
Nous vous avions fait découvrir il y a quelques jours la Praluline, dessert emblématique de la gastronomie française. 69 ans après la création de ce dessert magique inventé par Auguste Pralus, nous sommes allés rencontrer son petit-fils Hugo Pralus, qui travaille aux côtés de son père, François, dans la maison Pralus à Roanne. Il exerce avec passion le métier de pâtissier-chocolatier. Retour sur cette rencontre gourmande :
Hugo Pralus
Pâtissier-chocolatier
Hugo, pouvez-vous nous parler de votre parcours ?
« Mon parcours, il est un petit peu atypique. J’ai attaqué dans l'entreprise familiale, j'étais assez jeune. Je venais travailler les week-end ou pendant les vacances scolaires pour me faire un peu d'argent de poche. À côté de ça j'étais au lycée, j'ai passé mon bac et ensuite je suis parti faire des études de commerce à Lyon pendant deux ans. À la suite de ces deux ans j'ai fait un BTS en commerce international. Une fois que j'avais fini mon BTS en commerce international j'ai pris une année de césure donc je suis parti à l'étranger notamment en Australie pour faire un break des études. Je suis allé chercher du boulot, vivre ma vie pendant un an, voyager, beaucoup travailler… et à mon retour j'ai poursuivi mes études avec l'objectif à terme de reprendre l'entreprise familiale et de passer à mon CAP en pâtisserie à la fin de mes études de commerce.
Je suis allé jusqu'au Master 1 et puis j'en avais un peu marre de l'école parce que de base c'est pas fait forcément pour moi mais j'ai voulu pousser un peu. Donc à la suite de ça j'ai passé mon CAP en pâtisserie et derrière j'ai fait un petit tour de France chez Guerlais, Lahrer, la Maison Troisgros, je suis parti aussi un peu aux États-Unis et je suis entré pour intégrer définitivement la maison Pralus. »
Quand vous pensez au fait que certains jours de la semaine, il y a la queue devant vos boutiques, quel sentiment vous ressentez ?
« Je suis très content de pouvoir participer à tout ça. Je suis assez fier des produits qui sortent de cette maison, que ce soit la Praluline comme le chocolat ou les autres créations et je suis ravi que ça puisse faire plaisir à autant de personnes surtout. La pâtisserie comme la chocolaterie, mais surtout la pâtisserie qui est plus accessible dans la maison, c'est pour se faire plaisir mais derrière, on se rend compte que ça fait énormément plaisir aux autres. Du coup, on arrive à faire ce métier pour ça. J’ai beaucoup de retours positifs, un peu de négatifs aussi quand même…
Mais voilà, il y a toujours de la bienveillance autour de ces avis et je suis assez fier de faire partie de tout ça. »
Est-ce que vous vous souvenez du sentiment que vous aviez quand vous mangiez de la Praluline quand vous étiez enfant ?
« Je dirais que la Praluline, c'est bizarre à dire, mais pour moi, elle ne va pas avoir la même saveur parce qu'elle est présente tous les jours, voir même la majorité de ma journée.
J'arrive au boulot, il y a pire, mais ça sent la Praluline. Je rentre chez moi, j'habite à deux pas de la boutique, ça sent la Praluline.(Rire)
Donc, moi, la Praluline, j'ai mes jours en fait où je vais manger une toute petite part et d'autres jours où je vais carrément manger la moitié d'une Praluline.
Les premiers souvenirs que j'en ai, je pense que j'étais un gros morfale. Je me souviens quand même que j'avais ça quand j'étais petit, je mangeais une pralusienne entière en rentrant de l'école. C'est un gâteau de 4 personnes, qui est un mix entre la Praluline et une tarte tropézienne. C'est très riche, j'en mangeais une moitié minimum par jour.
C'est le genre de truc que j'aimais bien, la Praluline j'en mangeais beaucoup aussi.
J’étais très gourmand de base, mais avec le temps, j'avoue que j'ai réduit les parts de praluline, elles ont baissé un petit peu en taille… mais je me venge plus tard. Je peux manger une moitié de praluline en une matinée de travail.
Après ça peut être le chocolat, ça va être la glace, ça va être des gâteaux, ça va être... Il va y avoir forcément un truc et puis il faut que ça s'équilibre, donc ce sera soit plus de chocolat, soit plus de Praluline. »
Qu'est-ce qui vous a donné envie de travailler dans le milieu de la pâtisserie-chocolaterie ?
« Je suis né dedans, mon père est pâtissier chocolatier, on habitait au-dessus du laboratoire à l'époque, donc j'avais toutes les odeurs. Le magasin était à côté, donc j'allais me servir en petits gâteaux, ça c'était le côté gourmandise.
Et après pour faire de la pâtisserie, ça remonte à ma grand-mère maternelle qui m'a un peu filé le virus. On faisait des gâteaux basiques, des gâteaux au chocolat, des gâteaux au yaourt, des quatre-quarts... En rentrant de l'école, si les devoirs étaient finis, c'était un bon moment qu'on passait avec ma grand-mère.
Après j'ai enchaîné pas mal de boulot. J'avais fait du commerce pour voir s'il y avait un autre métier qui me plaisait plus et je me suis rendu compte à force d'avoir plein d'expériences à droite à gauche que je ne me voyais pas faire autre chose que pâtissier ou chocolatier. »
Vous, Hugo, vous êtes composé à combien de % de chocolat et à combien de % de Praluline ?
« (Rire) Je ne sais pas les pourcentages ! Non, je dirais bien un gros 50-50 parce que j'aime les deux produits. J’aime la Praluline, j'aime beaucoup travailler le chocolat en Bean-to-Bar, je ne saurai pas les départager.
C'est deux familles de produits complètement différents, mais je ne pourrais pas les départager. C’est deux amours complémentaires. »
C'est votre père qui vous a transmis la passion du cacao ?
« Oui complètement. La passion du cacao elle est venue de base par le voyage. On avait la chance avec mon frère de partir en voyage avec mon père autour du cacao. Mon père nous emmenait tout le temps dans les plantations à droite à gauche, que ce soit à Madagascar, Sao Tome et Principe et d'autres pays… Et en fait je ne suis pas tombé amoureux du chocolat, de la fève de cacao en soi, du grué de cacao.. mais je suis vraiment tombé amoureux du mucilage quand j'étais petit. C'est la pulpe blanche qui va se retrouver autour de la fève de cacao. Et j'avoue quand j'ai goûté ça quand j'étais petit, je suis devenu complètement accro parce que ça ressemble à un bonbon, c'est un fruit qui est tellement sucré et qui est en même temps un petit peu acidulé. C’est devenu une addiction, dès que je me retrouve dans un pays producteur il faut que j'ai ma dose !
Et du coup après, grâce au voyage et cette rencontre avec le mucilage, derrière j'ai voulu comprendre un peu plus la fève et les producteurs, comment la transformer et ainsi de suite jusqu'à la tablette. Aujourd'hui, je suis avec les chocolatiers en train d'essayer de faire marcher les bécanes ! »
Quels sont les défis auxquels les chocolatiers doivent s'attendre pour les prochaines années ?
« Je pense qu'il y a beaucoup de normes qui vont arriver au niveau du chocolat,
qui vont compliquer un peu les choses et qui vont faire augmenter les prix aussi beaucoup…Je pense que les conflits mondiaux jouent un rôle dans le fait de l'augmentation du prix de la fève de cacao. Le marché du cacao est un marché compliqué, il monte en flèche, il va dégringoler…ça tient à pas beaucoup de monde. C’est un petit peu compliqué d'avoir un prix stable et pouvoir toujours s'y retrouver et que le client puisse s'y retrouver aussi.
Et puis ensuite bien sûr écologiquement parlant. Aussi, la loi européenne qui va rentrer en vigueur et qui interdit d'importer du cacao issu de la déforestation. Ça, ça va être un frein aussi parce que je pense que c'est une loi qui est un peu compliquée, il va y avoir beaucoup de traçabilité, beaucoup de producteurs qui vont être en difficulté pour mettre en place des choses qu'ils ne connaissent pas. Ça va prendre du temps et ça va être un petit peu compliqué au début… »
Si je vous interview dans un an, qu'est-ce que vous aurez à me dire ?
« Cette année on va participer à un nouvel événement qui s'appelle le « Lyon street food festival » donc là ça va être un gros événement et on ne sait pas à quelle sauce on va se faire manger donc ça va être un petit challenge !
Sinon de la création avec mes équipes.. des projets il y en a toujours et puis ça n'arrête pas !Trouver des solutions aux petits petits soucis du jour, continuer à faire avancer la boîte dans le bon sens, une boutique supplémentaire pour arriver à 20. »
À travers votre travail, vous aimez passer quoi comme message aux clients qui vont déguster vos produits ?
« Je pense qu'il ne faut pas trop se compliquer la vie, faire des choses simples, bonnes, se faire plaisir et je pense que les clients le ressentent derrière. Il faut toujours faire des choses qui nous ressemblent. »
Est-ce qu’il y a un dessert que vous pouvez manger tous les jours sans vous en dégouter ?
« Je dirais une barre infernale au nougat !
La barre infernale au nougat, c'est quelque chose que je peux manger tous les jours sans problème. Elle est juste trop bonne, je n'ai pas d'autres mots. Pourtant j'aime bien le chocolat noir, là c'est du chocolat au lait avec un fourrage nougat maison… J’adore ça !»
Manon Bollery
Images non libres de droit ©Manon Bollery


