Blanche Loiseau au sujet de Loiseau de France : « On va retrouver certaines assises, le bois, les vins au verre, le côté bistrot… Pour nous c'est : une ambassade des terroirs de France. »
Blanche Loiseau, après avoir été un an à la tête de Loiseau du Temps à Besançon est partie s’installer au Japon. Elle a décollé ce dimanche pour la ville de Tokyo où elle sera cheffe à "Loiseau de France", à l’Institut français du Japon. Dans les années 90, son père Bernard Loiseau, avait ouvert une réplique de La Côte-d’Or à Kobe. L’histoire entre le Japon et le groupe Bernard Loiseau n’est donc pas nouvelle et durera encore de belles et longues années !
À l’occasion de ce nouveau chapitre pour la jeune cheffe bourguignonne, Infos-Dijon est allée à sa rencontre…
Blanche Loiseau
À quelques semaines de l’ouverture de ce nouveau restaurant, comment allez-vous ?
« Ça va ! Beaucoup de boulot, comme une ouverture de restaurant. Rebelote, un an plus tard après Besançon. Mais cette fois-ci, à 10 000 kilomètres et 7 heures de décalage !
On a de la chance d'avoir des amis et des personnes de confiance sur place qui nous aident à Tokyo même. Mais ça va, on réalise qu’on s'approche de l'ouverture… »
Pouvez-vous revenir sur cette année à Besançon ?
« Déjà ça a été un beau défi pour moi avec ce poste de chef, toute seule.
C’était super avec une équipe qu'on a montée avec Hortense ma directrice de salle, qui nous suit toujours, qui est toujours là. Et ça, c'est vraiment très gratifiant et puis ça fait plaisir. On a essayé de mettre en place des choses, ne serait-ce qu'en termes d'horaires de travail, d'ambiance au travail pour que ça se passe bien pour tout le monde. Ça c'est aussi quelque chose qui nous tenait à cœur et donc on en récolte aussi les fruits aujourd'hui.
C’était une année pleine d'apprentissage. Apprendre à gérer un restaurant, gérer les équipes, les problèmes qu'il peut y avoir, les aléas du direct, les problèmes de livraison… Il fallait apprendre à trouver des solutions et en même temps apprendre à se trouver aussi.
C'est vrai que les plans ont pas mal évolué en un an. Il fallait apprendre à gérer aussi la clientèle actuelle et faire plaisir à nos habitués. On est vraiment épatés par la quantité et la qualité de nos habitués. On est contents et les gens reviennent. Quand ils sont fidèles, ils sont très fidèles les Bisontins et ça c'est chouette ! On les chouchoute et on est contents de les revoir. On se rend compte qu’un bistrot Loiseau ça marche. C'était un beau pilote et du coup on va dupliquer ça à Tokyo. »
C'était votre première expérience en tant que cheffe. Est-ce que vous vous attendiez à tout ça, à tous ces aléas ?
« Oui, les aléas oui, parce qu'on ne peut pas tout contrôler. J'étais un peu le MacGyver du restaurant, parfois j'avais plus de temps la boîte à outils que le couteau en main.
Ça, ça ne me dérange pas parce que moi j'aime bien être confrontée, être mis un peu au pied du mur, c'est le moment où moi j'avance, où je réagis bien, donc ça ne me dérange pas. Et puis ça permettait aux équipes aussi de voir qu'on est là, qu’on se retrousse les manches.
Si il n'y avait pas de plongeur moi j'allais faire la plonge avec ma directrice de salle, on s'y mettait à deux, on tapait dedans. C'est bien aussi…
Je pense que c'est important. De toute façon, on doit montrer l'exemple. Je pense que le leadership par l'exemple, c'est quand même un truc qui fonctionne bien. C’est quelque chose qui me correspond bien en tout cas.
On n'a pas peur. S'il faut y aller, il faut y aller. Il y a même des jours où j'ai fait le service avec ma directrice, on était que tous les deux en salle. Pendant 48 heures on y allait, on les a fait nos couverts. C'est marrant et puis c'est bien de se mettre aussi à la place de l'autre en face, parce qu'on a tendance à être la tête dans le guidon tous les jours.
C’est que le début, donc il y a plein chose à améliorer, que moi j'ai envie d'améliorer sur ma cuisine ou sur moi-même ça c'est clair. Mais ça va c'est que le début et il y a plein de place pour l'apprentissage ! »
Dans les années 90 votre père avait ouvert un resto à Kobe. Cette ouverture de Loiseau de France est un hommage? Est-ce que c'était un projet que vous aviez depuis longtemps ? Quelle est l'histoire de Loiseau de France ?
« C’est vrai que papa avait ouvert à Kobe. C’était vraiment la Côte d'Or à Kobe, donc une réplique de Saulieu à Kobe. Même vaisselle, même plat, même carte, quasiment un copier-coller comme ça se faisait beaucoup à l'époque des grands restaurants français qui commençaient à s'installer au Japon.
Malheureusement ça a été détruit par un immense tremblement de terre en 95 qui a carrément détruit la tour entière où était le restaurant, ce qui fait qu'on n'a pas rouvert derrière. On a toujours eu beaucoup de contacts au Japon, des partenariats, des signatures de cartes, on était plusieurs fois présents au Salon du chocolat à Tokyo, etc.
C'est vrai que moi c'est un pays dont j'ai entendu parler toute ma vie. Un pays où je suis allée bosser un an parce que j'avais envie découvrir ce pays, leur culture, leur gastronomie. C’est vrai que j'ai eu la chance d'être en pure immersion traditionnelle pendant un an.
Le Japon c'était une idée, ce n'était pas un projet acté et poussé entre guillemets.
Après le but c'est de se développer mais de façon cohérente, c'est ça qui est assez important pour nous et c'est vrai que l'opportunité s'est présentée. Ce n’était pas absurde pour nous d'y retourner puisque c'est un pays qu'on connaît beaucoup, qu'on fréquente. J’y ai habité, ma soeur aussi a fait une partie de ses études là-bas.
C'est un pays qui adore la France et un pays qui est amoureux de la France. Les japonais ils connaissent, ils s'intéressent. C'est épatant, ils ont une culture qui est épatante.
C’est vrai qu’il y a eu cette opportunité à l'Institut de France de Tokyo avec un appel d’offres pour créer un restaurant français là-bas. Un appel d’offres qu'on a remporté et du coup on va bientôt ouvrir ce nouveau bistrot… »
Sera-t-il dans la lignée de Loiseau du Temps et Loiseau des vignes ou est-ce que ce sera plus comme la Côte d'Or ?
« Ce sera plus dans la lignée « Loiseau du temps » ou « Loiseau des vignes ». On va retrouver certaines assises, le bois, les vins au verre, le côté bistrot… Les mots forts pour nous c'est : Une ambassade des terroirs de France.
On est sur un lieu qui représente la France, on est à l'Institut français du Japon, donc c'est vraiment le lieu de rayonnement de la culture française.
Et ce qui est important c'est que ça soit un lieu de vie, avec une jolie offre aussi : café, gâteau, vente à emporter… Une offre très française qui permet aux gens de venir à tout moment de leur journée et aussi de venir passer un beau moment seul, en couple ou entre amis, au bistrot. Ça sera un beau bistro chic, avec des bons plats français du terroir. Leur rappeler ou leur donner une idée de vraiment ce qu’est un bistrot chez nous et ce côté convivial, soit leur rappeler un petit bout de France, leur rappeler leur voyage, où ils remangent un petit bout de France… Un endroit où ils se font plaisir ! »
Pouvons-nous avoir une idée de la carte ?
« On a en partie acté la première carte. Alors ça sera par exemple le pâté en croûte d'Alexandre Dumaine en clin d'œil à Saulieu, on a le boeuf bourguignon et les crapiauds du Morvan, des tournedos Rossini, des filets de maquereau en escabèche. Vraiment français… Bien français, bien gourmand ! »
Comment sera Loiseau de France ?
« Alors Loiseau de France c'est un bâtiment plus récent, forcément plus moderne. L’institut français à Tokyo a été imaginé par un architecte japonais pour rappeler un peu ces petits villages plutôt provençaux.
Les salles de cours c'est un petit escalier, on monte, une petite maison à étages avec plein de petits escaliers… C’est vraiment comme si on grimpait, c'est assez mignon. Et on a un jardin avec les arbres en fleurs, les lampadaires un peu parisiens en métal. C’est un havre de paix en plein cœur de Tokyo, c’est incroyable !
On arrive dans un superbe jardin, l'immense terrasse, la salle de restaurant… C’est un lieu un peu hors du commun surtout en plein centre-ville. »
Allez-vous garder un oeil sur Loiseau du Temps où est-ce que votre second qui est devenu chef, a carte blanche ?
« Léo est passé chef et il a carte blanche. Après, on a aussi un chef référent en interne du groupe, pour les brasseries, pour l'accompagner ne serait-ce que dans tout ce qui est administratif et tout ce qu'il y a autour qui parfois prend beaucoup de temps… Ça nous permet aussi d'avoir une jolie ligne directrice sur tous les bistrots ! »
Savez-vous combien de temps vous allez rester à Tokyo ?
« Je pars environ six mois pour faire l'ouverture. »
C’était prévu de rester un an à Besançon ?
« Pas vraiment, non. L'idée, c'est que moi, je vais être un peu sur les ouvertures. En fonction, bien évidemment, des projets, de ce qui se passe…
Le but, ce n'est pas d'ouvrir pour ouvrir. Et je pense que durant quelques années, je serai un peu plus sur les ouvertures. Donc là, à Tokyo pendant six mois, ça sera forcément différent qu’à Besançon parce que c'est un pays différent. Le fonctionnement est différent, ça c'est évident.
Et je pourrais peut-être être amené à plus être aussi dans la représentation. Donc ça va être d'autres jobs pour moi auxquels je suis plus ou moins habituée, mais ça va être intéressant ! »
Comment vous sentez-vous avec cette nouvelle ouverture ?
« Il ya beaucoup de boulot ! Ayant déjà fait une ouverture finalement il ya aussi beaucoup de choses qu'on a appris, beaucoup de choses qu'on a finalement à dupliquer. On sait un peu plus où on va et ça c'est vraiment chouette. Même pour nous c’est beaucoup plus pratique, beaucoup plus simple. C'est déjà beaucoup plus simple que de partir de zéro, commencer un projet, lancer un bistro comme on l'a fait, lancer notre marque de bistro Loiseau à nous. Là maintenant qu'on a lancé le premier, on a dupliqué. C’est un peu plus simple.
Le Japon et le marché japonais ne sera forcément jamais le même qu'en France. C'est normal, ce n'est pas le même marché, ce n'est pas la même localisation.
Donc c'est vrai que travailler avec le décalage horaire plus la distance, ça amène d'autres contraintes. Là, on attaque les dernières lignes droites. La To-Do List se rallonge tous les jours.
Je suis contente d'y retourner. En plus, c'est un pays que j'ai adoré et je suis heureuse d’y retourner. Ça sera dans d'autres conditions que la première fois. C'était l'inconnu, là c'est vrai que c'est moins stressant aussi. Donc c'est top ! »
Dans tous vos bistrots, vous avez cet élément un peu central qui est l’oenothèque. Sera-t-elle également présente à Tokyo ?
« Oui, absolument, c’est une vraie volonté de proposer des vins de Bourgogne là-bas. C'est quand même une grosse partie de notre identité… Et c'est vrai qu'on a à coeur de mettre des oenotèques partout dans nos restaurants. C'est aussi une de nos lignes de conduite finalement, avec l'ancrage local, le terroir et les vins. C'est indissociable je pense de nos restaurants! »
Manon Bollery
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