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14/12/2023 19:17
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RÉGION : «L’autonomie financière des collectivités est une question essentielle pour l’avenir de la décentralisation», déclare Marie-Guite Dufay

Ce jeudi 14 décembre, la présidente de la Région Bourgogne-Franche-Comté a ouvert la session plénière en revenant sur les sujets d'actualité et en abordant les orientations budgétaires pour les années à venir.

Discours liminaire de Marie-Guite Dufay (Parti socialiste)


«Nous entrons aujourd’hui de plain-pied dans les débats qui nous amèneront, début février prochain, à notre séance budgétaire.
Nos échanges s’inscrivent de nouveau dans un contexte international et économique troublé, avec les crises, les conflits et les incertitudes que nous connaissons tous. Un contexte où l’inflation reste marquante en particulier sur le coût des énergies, et où la hausse considérable des taux d’intérêt impacte fortement les collectivités locales.

Des collectivités locales, et c’est tout particulièrement le cas de notre conseil régional, qui ne ménagent pas leurs efforts pour accompagner la relance, pour investir dans les grandes transitions, pour faire face aux mutations... Mais pour investir dans de bonnes conditions, il faut des moyens, il faut des recettes, et force est de constater aujourd’hui que la façon dont la décentralisation est pensée dans notre pays sur cet aspect des choses, pose des questions fondamentales.
Les Conseils Régionaux ont des compétences majeures en matière de développement économique, de mobilités, de formation, d’équilibre territorial, de transition écologique... des compétences qui appellent à investir pour préparer l’avenir. Et malgré cela, ils n’ont pas, ou plutôt ils n’ont plus de réels leviers efficaces et fiables pour financer leurs politiques. Nos recettes principales, ce sont des dotations de l’Etat, dont chacun sait qu’elles sont plutôt orientées à la baisse ; c’est la dévolution d’une part de TVA sur laquelle nous n’avons aucun pouvoir de taux et qui reste dépendante de l’activité économique.
L’autonomie financière des collectivités est à mes yeux une question essentielle pour l’avenir de la décentralisation, et j’espère vivement qu’elle sera abordée dans le cadre de la mission confiée à Eric Woerth par le Président de la République sur une nouvelle étape de la décentralisation dans notre pays.
Je l’espère tout particulièrement au moment où le gouvernement s’engage fort justement dans la planification de la transition écologique, car s’il y a bien un domaine où la capacité à investir de l’ensemble des pouvoirs publics sera déterminante, c’est celui-ci. Lors du lancement, hier à Dijon, de la COP régionale, j’ai eu l’occasion de le rappeler au ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des Territoires, de même que notre entière responsabilité pour prendre toute notre part dans la déclinaison territoriale de cette planification.
Mais pour le moment, nous devons faire avec ce que nous avons, et c’est dans ce cadre que nous avons préparé les orientations budgétaires et le plan pluriannuel d’investissement que nous vous présentons aujourd’hui.
Je rappelle dans un premier temps que les efforts consentis par le Conseil régional pour accompagner la relance, au travers du PAIR notamment, nous ont amenés sur un véritable pic d’investissement : 624 millions d’euros en 2021, 609 en 2022 et 570 prévus en 2023... alors que nos deux collectivités étaient à moins de 300 millions d’euros de cumul avant la fusion.
Cet effort considérable ne peut pas être durable, car il n’est pas soutenable pour la Région. C’est pourquoi nous avons fait de 2023 une année charnière, pour nous adapter à la nouvelle donne budgétaire issue des crises que notre pays traverse, et pour préparer une véritable stratégie d’investissement responsable pour notre collectivité, tout en conservant une réelle ambition de porter des politiques transformatrices dans nos territoires.
● Nous avons donc suspendu en 2023 certains de nos RI d’investissement, pour nous donner l’air nécessaire à la préparation de ce PPI ; nous serons en mesure, avec son adoption, d’en réouvrir la grande majorité dès l’assemblée budgétaire de février.
● Nous avons mené à bien une négociation avec la SNCF qui nous a permis d'alléger le coût de ce service pour notre collectivité, et donc de dégager des marges supplémentaires.
● Nous avons poursuivi les efforts de maîtrise de nos budgets de fonctionnement, effort que nous avons depuis plusieurs années, ce qui n’est pas simple, car ce sont des dépenses utiles à tous les niveaux, tant économique, social que sociétal...
● Nous avons poursuivi notre travail autour du “budget vert” pour notre collectivité, en particulier avec l’extension de la logique d’éco-conditionnalité dans nos interventions.
Ce travail nous permet de vous proposer aujourd’hui un PPI 2024 - 2030 doté de 2,3 milliards d’euros, qui s'ajoutent donc aux 1,5 milliard d’euros d’Autorisations de Programme d'ores et déjà votées.
Pour construire ce PPI nous avons arbitré ligne par ligne en fonction des critères suivants :
● Une priorité, bien sûr en premier lieu sur ce qui relève de nos compétences
obligatoires : mobilités et lycées.
● Un fil rouge : la transition écologique, en privilégiant les dépenses cohérentes avec la
décarbonation, la sobriété énergétique et la préservation environnementale.
● Et la cohérence avec les orientations de notre stratégie de mandat.
Je remercie mon vice-président aux finances qui a conduit un travail titanesque avec l’ensemble des élus.
Avec ce PPI, nous sommes à mon sens pleinement armés pour répondre aux grands enjeux pour notre Région, tout en conservant un investissement fort mais contenu :
● Il répond à l’enjeu des bifurcations écologiques et énergétiques, qui nécessite à tous les niveaux que des investissements considérables soient menés. Je pense à nos lycées, aux mobilités, à l’effort de décarbonation et de maîtrise énergétique que nous devons accompagner en direction des entreprises, des territoires, des bailleurs sociaux...
● Il intègre l’enjeu des grandes mutations économiques, industrielles et agricoles qui impactent notre territoire et nos filières. C’est le soutien à l’innovation, aux nouvelles filières industrielles qui font l’avenir de nos territoires. C’est aussi le soutien à l’adaptation de l’agriculture aux conséquences du dérèglement climatique, et le soutien au renouvellement des générations.
● Il confirme notre engagement en direction des territoires pour soutenir un aménagement équilibré de notre région, dans le domaine des services au public, du sport, de la culture, de la santé.
● Il nous permet de jouer pleinement notre rôle d’investisseur majeur du territoire régional, car je n’oublie pas que derrière nos investissements, il y a des entreprises et des emplois, notamment dans les secteurs du BTP.
Nous avons dégagé des marges de manœuvre en 2023 pour construire ce PPI, mais il va nous falloir continuer. Pour être au rendez-vous de l’ambition que j’ai voulu donner à ce PPI, il nous faut plus. Le gouvernement commence à le comprendre puisque les présidents de Régions seront reçus sur ce sujet à Matignon mardi matin. Ceci-dit les discussions que nous avons dans le cadre du PLF, avec Matignon, ne nous montre pas encore le changement d’échelle qui serait nécessaire. Néanmoins il y a peut-être, je l’espère, une avancée.
En attendant cette avancée nous devons, comme beaucoup d’autres collectivités locales actuellement, mobiliser les leviers de recettes qu’il nous reste pour soutenir l’investissement de notre collectivité. Ces leviers, ce sont la carte grise, et nos recettes en matière de mobilité.

C’est un choix que j’assume, car les investissements que nous voulons faire sont nécessaires pour le développement, la jeunesse, l’avenir de notre région.
Au-delà des OB et du PPI, je veux m'arrêter un instant sur la formation, qui sera également au cœur de nos débats avec le CPRDFOP, le schéma du tourisme, puis revenir sur l’évolution du dossier FEADER, qui préoccupe fortement nos agriculteurs.
Mais en préalable, j’indique qu’en marge de consacrer du temps à débattre sur nos politiques publiques, nous devrons passer du temps sur les désignations des élus régionaux dans les organismes extérieurs. Celles-ci ont en effet été annulées par le tribunal administratif faisant suite à une procédure engagée par le rassemblement national. Nous traiterons aujourd’hui les plus urgentes : celles dont le résultat de cette procédure remettrait en cause le fonctionnement faute d’une nouvelle désignation rapide. Je note que cette fois, contrairement à ce qu’il s’était passé il y a deux ans, le RN a accepté de nous transmettre des noms pour les organismes que nous traiterons. J’ose espérer que cela préjuge d’un exercice fluide entre nous, et que cela ne sera pas l’occasion d’un nouvel exercice d’instrumentalisation de notre assemblée... Quant aux désignations restantes, elles seront traitées dans le cadre d’une prochaine de nos réunions...
Le CPRDFOP, contrat de plan concernant les formations et l’orientation, constitue un outil essentiel et stratégique dans la réponse et l’adaptation aux mutations du monde du travail. Car si nous devons innover et investir dans nos filières industrielles et nos entreprises pour préparer l’avenir, l’investissement sur l’humain est tout aussi fondamental pour accompagner ces objectifs. Et cet investissement sur l’humain, passe en particulier par des politiques de formation et d’orientation tout au long de la vie.
Le CPRDFOP, merci à la vice-présidente Océane Godard et au conseiller régional Frédéric Poncet pour le travail mené au long cours, est donc tout particulièrement orienté vers l’accompagnement de l’évolution des métiers, les transitions sociétales, écologiques et numériques qui impactent le monde du travail, les filières d’avenir créatrices d’emploi et de valeur, et puis aussi, mais pas que, vers les métiers en tension. C’est donc un outil majeur au service de l’emploi et des entreprises.
A propos de formation, je m’arrête un instant sur le projet de candidature de notre Région autour d’une école nationale de l’hydrogène, projet que nous portons en lien avec le Préfet et le Rectorat dans le cadre de l’Appel à Manifestation d'Intérêt “Compétences et Métiers d’Avenir” de France 2030 et qui illustre bien notre préoccupation de corréler la formation au plus haut niveau avec la croissance d’une filière d’avenir.
S’il est évidemment trop tôt pour anticiper les résultats de cette démarche, je veux dire combien je suis impressionnée par le très fort engagement de l’ensemble des acteurs de notre territoire autour de ce projet collectif, qu’ils soient acteurs économiques, acteurs de la formation, acteurs de la formation et de la recherche... C’est une véritable démarche régionale qui se construit, une véritable démarche de coopération qui démontre une forte attente de tous les partenaires avec lesquels nous travaillons, mais aussi une capacité à agir ensemble que j’aimerais retrouver dans tous les secteurs à impact pour l’avenir, je pense particulièrement à nos universités ...
Nous débattrons également pendant cette assemblée d’un autre Schéma important, notre Schéma du tourisme, que nous n’avions pas pu évoquer faute de temps au cours de notre précédente assemblée. Il vise à développer nos atouts touristiques : le tourisme nature et de montagne, l’itinérance, le fluvial, l’œnotourisme, la gastronomie, le tourisme de patrimoine et de savoir-faire ; dans une logique responsable et respectueuse de notre environnement exceptionnel. Nous l’avons vu cet été, le tourisme a bien repris dans notre région, signe que nos atouts attirent ! C’est ce que nous continuerons à développer, avec l’adoption de règlements d’intervention dédiés dès le budget.
En évoquant notre attractivité touristique, je veux faire une incise d’actualité sur un autre type d’attractivité sur laquelle nous travaillons actuellement : l’attractivité dite résidentielle. Vous le savez, notre région fait face à un enjeu démographique d'ampleur, et j’avais souhaité, en juin dernier le mettre au cœur des discussions de la CTAP que j’ai co-présidée avec Monsieur le préfet.
Forts du constat partagé avec les collectivités présentes, et des retours que nous avons eus depuis, nous lançons donc une démarche expérimentale à partir du début de l'année 2024 avec les EPCI et les Départements qui ont répondu favorablement à notre proposition. Cette démarche consiste en une répartition des rôles en fonction des échelons de collectivités : d'une part la prospection et la promotion, qui seront prises en charge par la Région pour attirer de potentiels nouveaux habitants en Bourgogne-Franche-Comté, d'autre part l'accueil de ces potentiels nouveaux habitants, qui sera confié par la Région aux 15 candidats, car ce sont les élus locaux qui connaissent le plus finement leur territoire et les offres et besoins spécifiques de celui-ci : appartement disponible ici, besoin de professionnels et de compétences et j'en passe.
Donc c’est un travail qui est bien engagé, et qui s’est illustré au salon du SIMI. Beaucoup d’élus de tous bords ont remarqué que ce territoire fait pack derrière ses atouts.
Après cette incise sur l’attractivité, je veux prendre un instant sur le FEADER. Chacun connaît ici les difficultés que nous rencontrons, la presse s’en est largement fait l’écho, et les inquiétudes légitimes de la profession agricole, également relayées par le monde politique...
J’ai déjà insisté ici sur la complexité de la problématique du recrutement, sur la complexité de la gestion des fonds européens, sur la complexité d’un sujet qui touche la dotation jeune agriculteur et les investissements dans les bâtiments, la complexité de ce transfert de compétence, qui aurait pu être mieux préparé - il n’y a pas que moi qui le dit, cela remonte de toutes les Régions, et ce indépendamment de leur couleur politique... J’ai vu que certaines Régions ont même d’ores et déjà demandé un report de la date limite de paiement de la programmation 14-22 : ce n’est absolument pas notre cas. Mais toutes les Régions ont par ailleurs écrit la semaine dernière au ministre pour rappeler cette complexité.
Mais je ne souhaite absolument pas entrer dans une polémique stérile, ce qui compte avant tout, ce sont les solutions que nous travaillons pour que les choses s’améliorent pour nos agriculteurs.
• Deux catégories d’agriculteurs sont exposées aux retards : ceux de la programmation 14-22, pour qui nous prenons en charge d’éventuels surcouts liés aux intérêt pour les 600 dossiers, et non 6000 comme j’ai pu le lire ici ou là, qui sont en retard ; et les nouveaux dossiers de l’actuelle programmation, plus précisément ceux qui ont candidaté sur les appels à projets PCAE que la Région a ouvert, et qui n’auront de réponse qu’à la mi-2024, et pour lesquels nous travaillons une solution de préfinancement avec le réseau bancaire
• Concernant le versement de la Dotation Jeunes Agriculteurs, j’ai demandé, dans la pénurie de moyens dans laquelle nous sommes, que la priorité soit donnée aux jeunes ; donc priorité au versement de la dotation jeune agriculteur, nous traitons les dossiers au fil de l’eau et les soldes seront mis en paiement dès janvier 2024. Par ailleurs, toujours pour les jeunes agriculteurs qui ont candidaté à un appel à projet PCAE, un courrier a été envoyé ces derniers jours aux exploitations concernées pour leur notifier les financements auxquels ils auront droit. Il n’y aura pas eu d’année blanche, contrairement à ce que j’ai pu entendre. Pour ces travaux, dont nous venons de donner le signal de financement au dernier comité de sélection, c’est quand même 6 millions (Europe, Région, département) de financement public qui sont investis pour 99 dossiers.
Nous avançons, par ailleurs dans la construction d’un partenariat avec les chambres départementales d’agriculture, afin que celles-ci contribuent à la fluidité du système en assistant les agriculteurs en proximité dans la construction de dossiers de paiement complets.
Enfin, un accord auquel je travaille d’arrache-pied depuis quelques semaines, vient d’être trouvé avec l’Etat pour que ce dernier reprenne l’instruction de 250 dossiers dès début 2024 et un nombre équivalent complémentaire, qui sera adossé à la mise à disposition de 3 agents recrutés par la Région à Macon.
Ce sujet est capital pour notre agriculture, je vous l’assure, nous le suivons au quotidien, mon vice-président, avec l’administration, à tous les niveaux, et je remercie tout le monde de ce travail qui s’est fait depuis quelques mois dans un stress important, dont les premières victimes sont les agriculteurs, mais les deuxièmes victimes sont les agents de la Région, et nous leur devons beaucoup de bienveillance pour travailler dans ces conditions.
Je n’en n’oublie pas pour autant les dossiers de fonds, tout aussi essentiels, et je pense en premier lieu à la filière viande, dans le Charolais, et dans la Nièvre notamment, dont j’ai toujours dit qu’elle était une priorité dans notre plan d’actions agricole. C’est la raison pour laquelle nous inscrivons, dans nos orientations budgétaires, le financement d’un ambitieux plan d’engraissement, pour aider la filière à créer de la valeur ajoutée sur notre territoire. Et puis nous sommes aussi dans l’action dans les préoccupations foncières des agriculteurs.
Enfin, avant de céder la parole aux présidents de groupes, je veux m’arrêter un instant sur le sujet des ressources humaines, qui a fait l’objet de quelques articles récemment dans les médias, autour de réactions sur le sujet des remplacements des agents absents dans les lycées. C’est un poste budgétaire important pour la collectivité, évalué à plus de 17 millions d’euros cette année, et aussi, j’en suis consciente, des mécanismes importants pour permettre le bon fonctionnement des établissements. Mais après avoir élargi les possibilités en la matière en lien avec la période du covid, il nous semble essentiel de mieux réguler ces remplacements, et ce dans une logique qui n’entrave pas la vie de nos lycées. Les remplacements en cuisine, ou les remplacements des maladies de longues durées continueront d’être assurés, sans faute, mais nous demandons un effort, dans les lycées où nous avons établi qu’ils étaient surdotés, ou dans les périodes de l’année où l’activité est moins intense. Cet effort est essentiel dans une période de complexité budgétaire comme celle que nous traversons.
Néanmoins, je veux rappeler que parallèlement à cela, notre collectivité a répondu présente pour accompagner les agents face à l’inflation. Bien-sûr, il y a les mesures nationales avec le relèvement des points d’indice, mais au-delà, je veux rappeler les mesures volontaristes que nous avons prises :
• Un nouveau régime indemnitaire, qui vise à renforcer l’attractivité de notre collectivité, et qui a apporté un complément de revenu significatif à de nombreux agents, pour un montant annuel de 4,2 millions d’euros.
• Un hause volontariste du point d’indice de 3,5% sur le Régime indemnitaire.
• Une prime exceptionnelle « pouvoir d’achat » de 200 euros versée en juillet 2023.
• Une autre prime exceptionnelle « pouvoir d’achat » de 100 à 600 euros sous conditions de ressources, versée à 4005 agents de notre collectivité en cette fin d’année.
Vous le voyez, nous nous sommes emparés des possibilités ouvertes par l’Etat sur l’octroi de prime aux agents publics, dans un contexte à la fois difficile pour les agents confrontés à l’inflation, mais tout autant difficile pour notre collectivité. J’ai noté un récent article d’un média national disant que peu de collectivités, compte-tenu de leurs difficultés, allaient en ce sens. Nous n’étions pas cités, donc je répare.
C’est donc une AP dense qui s’ouvre aujourd’hui, qui conclut une année que j’avais souhaitée studieuse et prudente, pour nous mettre en situation de vous proposer le PPI qui est mis en débat aujourd’hui.
Je vous remercie et cède la parole aux présidents de groupe.
Nous entrons dans une nouvelle phase d’aiguisement des contradictions et des crises exposant singulièrement notre région rurale et industrielle.
Les besoins de santé, d’éducation, de formation, de mobilités décarbonées, de logement, d’emplois de qualité et correctement rémunérés, de préservation des ressources et de lutte contre les pollutions, sont criants.
Ils nécessitent des dépenses nouvelles.
Le rapport Pisani-Ferry chiffre par exemple à 100 milliards d’euros par an jusqu’en 2030 la dépense à engager pour réaliser en France la transition énergétique. Le GIEC, lui, va même plus loin avec une estimation à 140 milliards d’euros.
Les besoins de rénovation des infrastructures ferroviaires nécessitent a minima 100 milliards d’euros en 15 ans, et nous avons pu constater dans le cadre du débat sur le volet mobilités du CPER que l’Etat n’est pas à la hauteur.
Mais il y a aussi besoin d’emplois, de salaires, de formations, pour appuyer ces investissements massifs et répondre aux pénuries de main d’œuvre et d’emplois, en particulier dans les grands services publics.
En réalité, nous sommes dans un processus global, où l’évolution des besoins de la société pousse à étendre toujours plus le champ d’action des services publics et le nombre d’agents y travaillant, singulièrement dans les fonctions administratives. L’ancien ministre de la fonction publique Anicet Lepors parle de processus civilisationnel. Si les politiques publiques conduites depuis 40 ans ont réussi à contenir le niveau de la dépense de service public, c’est parce qu’elles se sont appuyées de plus en plus sur le recours à des travailleurs précaires ainsi qu’à des prestations intellectuelles extérieures, avec là un certain nombre de gâchis.
Cela pour dire qu’il y a une part incompressible de la dépense de service public, et c’est toute la contradiction de la période puisque la politique monétaire européenne a choisi de casser l'inflation par la récession, ce qui va conduire à comprimer l’emploi et les salaires, dans le secteur public mais aussi dans le secteur privé.
Le gouvernement est donc en train de reporter en partie sur les collectivités locales la responsabilité de l’investissement et de la réduction du déficit public, alors qu’il faudrait agir vraiment en Europe pour sortir la politique monétaire européenne de l’alignement sur la banque fédérale américaine.
Je veux en dire un mot, car en effet, si la banque fédérale américaine peut relever ses taux tout en finançant un plan de relance à 3000 milliards de dollars, car selon l’expression du Général De Gaulle, elle dispose du « privilège exorbitant de la monnaie mondiale, qui lui permet de rembourser ses dettes en une monnaie qu'il ne tient qu'à elle de créer ». Un privilège complété par le principe autoproclamé d'extraterritorialité du droit américain, dont les salariés de l’industrie belfortaine viennent encore de faire les frais dernièrement. Ce principe s’applique dès lors qu’une entreprise utilise d’une façon ou d’une autre des dollars.
L’euro n’est pas le dollar.
Avec les règles actuelles, l’investissement se finance contre le fonctionnement, donc contre le service public, l’emploi, la formation, alors qu’il faudrait raisonner tout autrement, avec le fonctionnement qui pilote l’investissement.
Des recrutements d’agents de la SNCF pour accompagner le développement de l’offre, des recrutements d’agents administratifs pour accompagner le poids grandissant des fonds européens dans le budget régional, des dotations suffisantes aux lycées pour soutenir les projets pédagogiques qui contribueront à la lutte contre le décrochage scolaire, des parcours de formation professionnelle qualifiants de haut niveau afin que nous soyons au rendez-vous de la nouvelle industrialisation, de la transition énergétique, de la décarbonation des procédés de production, de la transition numérique, ...
Voilà les vrais leviers du développement.
A l’opposé de cela, le cadre actuel impose à la prospective budgétaire régionale dont nous allons débattre une grande contradiction : baisser la dépense de fonctionnement pour maintenir un haut niveau d’investissement, parce que la charge de la dette branchée sur les marchés financiers devient insoutenable, parce que les critères de bonne santé financière qu’ils nous imposent nous corsètent.
Nous allons changer les règles de comptabilité, en passant de la M51 à la M57, mais c’est un tout autre changement qu’il faudrait opérer, une nouvelle logique, où l’emploi, la formation, le service public, deviendraient prioritaires.
Nous plaidons pour ce renversement de perspective, rendu d’autant plus urgent que les enseignements du dernier baromètre du secours populaire sont particulièrement alarmants. Plus d’un Français sur deux déclare ne pas parvenir à mettre de l’argent de côté, près d’un sur cinq vit à découvert. 45% des personnes sondées se sont retrouvées dans l’incapacité de payer certains actes médicaux. 43 % ne peuvent pas consommer tous les jours des fruits et légumes. Plus d'un Français sur trois assure ne plus pouvoir faire trois repas par jour pour ne pas priver les enfants.
Ces constats ne sont pas des dégâts collatéraux. Ils constituent le cœur de la crise actuelle et doivent donner lieu à des réponses politiques à la hauteur, du global au local».

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