> Bourgogne - Franche-Comté > Bourgogne - Franche-Comté
08/04/2021 20:41

RÉGIONALES : Julien Odoul propose de lutter contre l'insécurité en conditionnant la politique de la ville

Ce jeudi 8 avril, le candidat du Rassemblement National a renouvelé ses critiques concernant la politique de la ville et a présenté trois mesures pour lutter contre l'insécurité en Bourgogne-Franche-Comté dont la «sécuconditionnalité».
L'opposition à la politique de ville a été martelée par Julien Odoul depuis qu'il a pris la présidence du groupe du Rassemblement National au sein du conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté. Un cheval de bataille qui fait suite au «plan Banlieue» présenté par Marine Le Pen en 2018.

Aujourd'hui candidat aux élections régionales, prévues pour les 13 et 20 juin prochains, Julien Odoul compte s'emparer de la thématique de la sécurité même si elle n'entre pas dans le champ des compétences de la Région. Ce jeudi 8 avril 2021, le candidat a présenté les grandes lignes de ses propositions en la matière quitte, à ce stade de la campagne, à manquer de précision.

«L'explosion des cambriolages notamment en zones rurales»


«La sécurité (…) est la priorité des priorités», lance Julien Odoul qui reconnaît l'importance de la lutte contre l'épidémie de Covid-19 tout en signalant «le virus de l'insécurité, le virus de l'ensauvagement». Selon lui, «l'explosion de la violence» est «une réalité qui est prégnante dans le quotidien de beaucoup de Bourguignons et de Francs-Comtois» avec «l'accroissement des incivilités» et «l'explosion des cambriolages notamment en zones rurales».

Dans l'approche du Rassemblement National, les campagnes arrivent en antagonistes des quartiers populaires que l’État a définis comme relevant d'une «politique de la ville», symbolisée par la création d'un ministère de la Ville, en 1990, durant le second mandat de François Mitterrand.

«On constate depuis quelques mois la succession des émeutes urbaines, la succession des attaques contre nos forces de l'ordre, contre les pompiers, contre les représentants de l’État. On assiste véritablement à la main-mise de plus en plus de quartiers par des trafiquants de drogue, par des mafias, par des bandes qui font reculer la République partout et, malheureusement, la République et les pouvoir publics apportent de mauvaises réponses à un phénomène qu'il faut attaquer radicalement avec tous les moyens dont disposent les collectivités», déclare Julien Odoul.

«Je souhaite faire de la lutte contre l'insécurité une véritable priorité régionale»


«La sécurité n'est pas l'apanage de l’État», déclare l'élu régional pour balayer l'argument d'une compétence qui ne relèverait pas de la collectivité territoriale. En effet, les communes assurent la tranquillité publique, éventuellement avec une police municipale, et la sécurité publique est une mission régalienne de l’État avec la Police et la Gendarmerie nationales.

«Je souhaite faire pour ce prochain mandat de la lutte contre l'insécurité une véritable priorité régionale, ce qui évidemment me diffère de mes concurrents et notamment de la candidate sortante qui n'a rien fait et qui a traité le mépris cette problématique qui ne l'intéressait pas», lance Julien Odoul.

«Je réfute totalement le fait que cela ne concerne pas la Région. La santé ne concernait pas la Région avant la crise sanitaire. La santé est devenue une compétence régionale», ajoute-t-il. «Toutes les collectivités doivent prendre leur part : les maires mais aussi la Région», projette le candidat qui veut placer cette thématique chère à la présidente du Rassemblement National dans le débat des élections régionales.

«On a considéré à tort que l'insécurité était liée à la pauvreté»


L'élu de l'Yonne assimile les financements apportés par la politique de la ville au «tonneau des Danaïdes» : «mettez de l'argent public et vous aurez la paix sociale, (…) sauf que c'est tout l'inverse qui s'est passé ces dernières années. Au niveau national, c'est près de 200 milliards d'euros [en quarante ans] qui ont été injectés dans cette politique de la ville, certes, au début, avec les meilleures intentions du monde. On pensait que la rénovation urbaine, l'aménagement, le renfort associatif, le soutien en termes de médiateurs, en termes de projets culturels allaient pouvoir assurer la sécurité, allaient pouvoir apaiser les tensions dans les quartiers qui étaient difficiles. On a considéré à tort que l'insécurité était liée à la pauvreté, ce que nous nions formellement».

Au regard du Rassemblement National, «les territoires les plus pauvres de la région Bourgogne-Franche-Comté sont les cantons les plus ruraux qui bénéficient de moins d'attention depuis des années et qui sont habités par des populations extrêmement précaires qui sont laissées sur le bord du chemin».

L'insécurité dégraderait l'image de la Bourgogne-Franche-Comté


Le fidèle de Marine Le Pen fait l'analyse que les conséquences de la délinquance minent l'attractivité de la région : «il ne peut pas y avoir de dynamisme économique si le terreau n'est pas favorable pour la création d'entreprise, pour l'apaisement des familles».

Pour autant, le candidat ne documente pas cet impact sur l'attractivité de la Bourgogne-Franche-Comté relativement aux régions limitrophes par exemple, se contentant de renvoyer à la dégradation de l'image du territoire.

«Les territoires prioritaires seront les territoires ruraux»


Alors que le Rassemblement National demande à «évaluer la politique de la ville», le parti envisage de ne plus définir comme prioritaires les 58 quartiers qui le sont actuellement dans 25 communes, représentant 150.000 habitants soit 5,3% de la population régionale. «Les territoires prioritaires seront ceux qui ont été lésés ces dernières années, c'est à dire principalement les territoires ruraux», projette le candidat.

Parmi les quartiers prioritaires, Julien Odoul cible tout particulièrement les Grésilles à Dijon, Planoise à Besançon, la Petite Hollande à Montbéliard, le Banlay à Nevers, les Chaillots et les Champs Plaisants à Sens. Le candidat estime que «ces quartiers ont bénéficié de près d'un demi-milliard d'euros en termes de rénovation urbaine, en termes d'aide publique». Le montant étant calculé sur la période 2017-2024.

Le candidat reproche à cette politique de la ville de manquer d'efficacité et de nourrir «l'insécurité, le sentiment de toute puissance» car «il y a toujours quelqu'un qui paie, il y a toujours quelqu'un qui répare».

Un fonds d'aide aux victimes de l'insécurité


Trois mesures principales figurent au programme. L'assistance aux victimes étant «la priorité dans la priorité» : «un grand nombre de victimes de l'insécurité ne sont pas soutenues comme il se doit, sont bien souvent dans l'incapacité de porter plainte ou subissent les pressions d'un gang qui va les contraindre à vivre dans ce climat de terreur».

Pour cela, le candidat propose de créer «un fonds d'aide aux victimes de l'insécurité» doté de 5 millions d'euros par an notamment pour accompagner les femmes victimes de violences conjugales car «les filles et les femmes sont les premières victimes de l'insécurité, (…) les femmes ont intégré dans leur quotidien qu'elles devaient avoir une vie différente».

Financement de vidéoprotection


Sera créée également une fonction de vice-président chargé de la sécurité et de la sûreté qui supervisera le recrutement d'«agents armés pour sécuriser des endroits où l'insécurité se niche». La loi Savary de 2016 a notamment rendu possible la présence d'agents de sécurité privés dans les transports en commun.

Le nouveau vice-président appuierait le développement de la vidéoprotection et financerait les polices municipales de «petites communes» voire accompagnerait l'équipement de commerces, d'entreprises, d'exploitations agricoles et de centres équestres en vidéoprotection.

Les subventions sous sécuconditionnalité


La troisième proposition est une «sécu -conditionnalité». Une réponse à l'écoconditionnalité chère aux écologistes, mise en place par Marie-Guite Dufay et appliquée à la rénovation énergétique par exemple pour évaluer l'effet sur les émissions de gaz à effet de serre.

«S'il y a des résultats, on pourra évidemment continuer les aides publiques, continuer à subventionner un certain nombre de projets d'infrastructures et de rénovations (…) mais si l'insécurité continue de gangrener le quotidien, si le trafic de drogue se développe à vitesse grand V, si l'on voit que les valeurs de la République sont quotidiennement mises à mal, évidemment que l'argent public sera retiré de ces quartiers», explique Julien Odoul.

À ce stade, le candidat ne précise pas sur quels indicateurs se baserait l'arrêt des financements : «des contrats seront passés au cas par cas avec les acteurs locaux qui demandent des subventions». Et d'évoquer simplement le désengagement de la Région si «des pompiers sont caillassés ou des policiers attaqués au mortier».

«La sécurité, c'est de la prévention et de la répression»


Sur le thème de la sécurité, Julien Odoul sort un atout de sa manche à la suite du ralliement d'anciens cadres de Debout La France (lire notre article). Venant de la Saône-et-Loire, le CV du potentiel vice-président correspond à la thématique sécuritaire : ancien commissaire divisionnaire de la Police nationale, Olivier Damien a été directeur départemental de la sécurité publique de la Charente et directeur des renseignements généraux de la Nièvre.

Aujourd'hui, il déplore «des politiques aléatoires qui ne vont jamais à leur terme, des missions qui se rajoutent», entend des agents des forces de sécurité intérieure ayant «le sentiment d'aller à l'abattoir quand ils sortent et de ne jamais être soutenus» et constate «une perte de confiance envers le pouvoir politique qui a été incapable de développer une politique de sécurité cohérente».

Le représentant de l'Avenir français fustige la répartition de la répression à la droite et de la prévention à la gauche – «la sécurité, c'est de la prévention et de la répression» – avant d'évoquer les «financements astronomiques» de la politique de la ville que même la Cour des comptes ne peut quantifier au sein du mille-feuille territorial.

Le colistier de Saône-et-Loire se montre également critique envers les 200 propositions du Livre blanc de la sécurité intérieure remis au ministre en novembre dernier : «le fil conducteur, il est où ? J'aurais aimé voir un projet global avec la finalité de rétablir l'ordre dans les quartiers perdus et le maintenir là où il est encore là. J'ai reconnu des vieilles revendications corporatiste d'il y a trente ans».

La légalisation du cannabis, une «fausse bonne idée»


Alors qu'Olivier Damien aspire à «s'attaquer aux racines du mal» du trafic de stupéfiants, la proposition de légalisation de la consommation de cannabis, chère aux libertaires et aux écologistes, le fait bondir : «c'est une fausse bonne idée,  la légalisation n'arrêtera jamais les trafics» en référence à la contrebande de cigarettes.

«La légalisation du cannabis, ça veut dire lutter contre les agressions sexuelles en légalisant le viol», ose Julien Odoul pour qui «c'est une très mauvaise idée à ne jamais mettre en place».

Pour cette présentation, aux côtés de Julien Odoul et d'Olivier Damien, figurent Mélanie Fortier, étudiante en LEA à Dijon, potentielle colistière, et René Lioret, secrétaire départemental du Rassemblement National pour la Côte-d'Or.

Après cette première déclinaison programmatique, Julien Odoul annonce que d'autres suivront bientôt en gardant le mystère sur le prochain sujet présenté dans cette campagne des élections régionales.

Jean-Christophe Tardivon