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10/04/2023 11:47

SANTÉ : «Mobilisation totale» contre les «excès» de l'intérim médical

L'agence régionale de santé Bourgogne-Franche-Comté répond aux inquiétudes, notamment des hôpitaux de zones rurales, liées à la récente mise en application du plafonnement des rémunérations des «médecins mercenaires».
Depuis le 3 avril dernier, la loi Rist 1 plafonne la rémunération des nouveaux contrats des médecins intérimaires exerçant dans les établissements de santé publics. Cette loi vise à limiter les abus des «médecins mercenaires», à réduire les dépenses de santé mais pourrait accentuer la baisse de démographie médicale de certains territoires.

Les médecins anesthésistes étaient particulièrement concernés car leur présence est nécessaire réglementairement pour ouvrir un bloc opératoire. Certains demandaient plusieurs milliers d'euros pour une garde de 24 heures.

Plafond de 1.390 euros brut pour 24 heures



Promulguée le 26 avril 2021, la loi visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification a été portée par Stéphanie Rist (RE), médecin rhumatologue et députée du Loiret.

Son application avait été reportée du fait de la crise sanitaire. Aujourd'hui, elle met fin aux rémunérations extra-réglementaires qui contournaient la loi Touraine de 2016 en instaurant un plafond de 1.390 euros brut pour une garde de 24 heures dans un centre hospitalier.

«Les montants économisés sur l’interim médical participeront à la refondation de l’hôpital», selon le ministère


Selon le ministère de la Santé, «l'accélération de l'intérim médical ces 3 dernières années (+69% depuis 2020) engendre plusieurs problématiques pour l’hôpital et le système de santé».

L'intérim médical pose des questions éthiques : «en entraînant des différences de rémunération très importantes entre praticiens, cela crée des iniquités très fortes au sein des collectifs de travail». Il perturbe la continuité des soins «en désorganisant les services et en dégradant les conditions de travail». Il a des conséquences financières «en pesant lourdement sur le budget des établissements et donc sur le budget du système de santé, financé par la Sécurité sociale et donc l’argent de tous les français».

«Cette mesure est la première d’un travail plus profond, engagé par le président de la République et le ministre de la Santé et de la Prévention, François Braun, visant au retour d’un vrai service public hospitalier fondé sur une organisation territorialisée des prises en charge et une responsabilité partagée entre tous les acteurs de la santé. Les montants économisés sur l’interim médical participeront à la refondation de l’hôpital, la reconstruction d’équipes soignantes stables et à l’attractivité des métiers», assure le ministère.

Inquiétudes particulières en Bretagne et Grand Est


Le plafonnement ne concernant pas les établissements de santé privés, certaines structures publiques craignent des difficultés de recrutement. Ainsi, la situation serait particulièrement tendue en Bretagne et dans le Grand Est.

Toutefois, les représentants de la Fédération hospitalier de France en Bretagne se veulent rassurants. «Les établissements publics continuent de proposer aux médecins intérimaires de poursuivre leurs missions au tarif plafonné ou sous un autre statut comme celui de praticien contractuel. En effet, l’objectif n’est pas de mettre fin à l’intérim médical mais bien de réguler le marché et d’en limiter les abus. Dans ce cadre, depuis quelques jours, des intérimaires en nombre significatif acceptent cette nouvelle rémunération, ou même des contrats de longue durée, synonyme de fidélisation et d’attractivité», ont-ils indiqué dans un communiqué du 17 mars dernier.

Et d'ajouter : «La FHF Bretagne et ses adhérents saluent l’esprit de responsabilité de ces professionnels et appellent à son élargissement. Parallèlement, ils resteront extrêmement vigilants sur les risques de contournement de la loi qui maintiendraient les effets pervers de l’intérim.»

Pour sa part, les représentants de la Fédération hospitalier de France en Grand Est appellent à «une union sacrée» : «L’application des dispositions de cette Loi va avoir très certainement des conséquences sur l’organisation de l’offre de soins dans notre région, car de nombreux établissements de notre région parviennent à assurer la continuité de service par le seul recours à l’intérim.»

Et d'alerter : «Par conséquent, au regard des fortes perturbations organisationnelles potentielles au sein de système de santé dès le début du printemps, nous avons besoin, plus que jamais, d’une “union sacrée” de l’ensemble des établissements et professionnels intervenants, quels que soient leurs statuts.»

Un comité de suivi en Bourgogne-Franche-Comté


Concernant la Bourgogne-Franche-Comté, l'entrée en application de la loi pourrait peser tout particulièrement sur l'organisation des établissements de santé publics des zones rurales et des villes moyennes.

Infos Dijon a sollicité notamment les principaux établissements hospitaliers publics de Côte-d'Or qui n'ont pas souhaité réagir, renvoyant la balle à l'agence régionale de santé.

Le 4 avril dernier, l’ARS Bourgogne-Franche-Comté indiquait que «les établissements et professionnels de santé de la région se mobilisent depuis plusieurs semaines dans la perspective de l’entrée en vigueur des dispositions de la loi Rist du 26 avril 2021, visant à mettre fin aux dérives de l’intérim médical». Ainsi, un comité de suivi a été mis en place le 14 mars dernier (lire le communiqué).

L'ARS garantit «les conditions d’une solidarité territoriale»


«Face aux difficultés qui pourraient survenir dans les premières semaines d’application, les ARS sont en soutien des établissements et des territoires, avec leurs partenaires (DRFIP, élus, usagers, collectivités locales…), pour garantir les conditions d’une solidarité territoriale et déployer les mesures d’accompagnement (primes de solidarité territoriale, contrat de praticien contractuel…)  permettant de garantir la continuité des soins», poursuivait l'agence.

«Ce travail a été conduit dans la région en lien étroit et de confiance avec les Fédérations représentant les établissements de santé. Un pilotage et un suivi serrés sont assurés quasiment au jour le jour, en particulier concernant les activités des maternités, des urgences, de l’anesthésie», assurait l'ARS Bourgogne-Franche-Comté.

Et de conclure : «Les directeurs territoriaux de l’ARS réunissent régulièrement tous les acteurs de santé pouvant contribuer à trouver des solutions à l’échelle des départements et des groupements hospitaliers de territoire. Les coopérations et solidarités entre établissements sont bien souvent la clé pour couvrir les planning. La mobilisation est totale pour lutter contre des excès qui pèsent lourdement sur les budgets des établissements de santé».

Jean-Christophe Tardivon

Le centre hospitalier de Semur-en-Auxois (image d'archives JC Tardivon)


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