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17/12/2022 03:48

CÔTE-D’OR : «Je veux prendre soin de la santé des soignants», déclare François Braun

Ce vendredi 16 décembre, le ministre de la Santé a inauguré la Maison de santé pluriprofessionnelle de Thorey-en-Plaine. Regrettant la «désinformation», François Braun a répondu aux craintes des médecins généralistes concernant la délégation de tâches.
La France compte plus de 2.000 maisons de santé hébergeant des professionnels de santé de compétences variées autour d'un ou de plusieurs médecins généralistes. De telles structures répondent aux aspirations d'une nouvelle génération de soignants.

À une quinzaine de kilomètres au sud-est de Dijon, l'équipement de santé de Thorey-en-Plaine entend également répondre aux «soins de proximité» d'une large patientèle de la plaine de Saône.

Pour inaugurer le nouveau site, aborder le sujet de l'offre de soins en milieu rural et répondre aux inquiétudes des médecins généralistes, le ministre de la Santé et de la Prévention François Braun a fait le déplacement, ce vendredi 16 décembre 2022.

Ayant intégré le gouvernement le 4 juillet dernier, le médecin urgentiste de profession en est déjà à sa deuxième visite officielle en Côte-d'Or, après le CHU en juillet dernier (lire notre article).

Une large délégation


Accompagné par Franck Robine, préfet de la Côte-d'Or, le ministre a été accueilli par Gilles Brachotte (sans étiquette), maire de Thorey-en-Plaine.

La délégation était composée notamment des parlementaires Renaissance de la Côte-d'Or Fadila Khattabi, Didier Martin, Didier Paris et François Patriat, ainsi que de Patrick Molinoz (PRG-Centre gauche), vice-président du conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté, Christine Blanc (LCOP), vice-présidente du conseil départemental de la Côte-d'Or, Martial Mathiron (divers gauche), conseiller départemental de la Côte-d'Or, Gaëlle Thomas (divers gauche), conseillère départementale de la Côte-d'Or, Patrice Espinosa (PS), président de la communauté de communes de la Plaine dijonnaise, Ludovic Rochette (Horizons), président de l'AMF 21, Vincent Thomas, président de l'université de Bourgogne, et Jacques Coiplet, directeur général de l'agence régionale de santé Bourgogne-Franche-Comté.

«Avoir accès à des soins de proximité et de qualité»


Lançant la cérémonie d'inauguration, le maire de cette commune de la périphérie dijonnaise prend soin de ne pas «opposer le rural et l'urbain» car considérés «complémentaires et imbriqués».

«À l'heure où l'on parle de déserts médicaux et d'abandon des territoires ruraux, une maison de santé, c'est la certitude pour les citoyens d'avoir accès à des soins de proximité et de qualité», assure Gilles Brachotte.

Le maire adresse alors des remerciements appuyés à Fadila Khattabi, députée de la troisième circonscription, ainsi qu'au sénateur François Patriat.

L’État est le premier financeur de l'investissement


Initié durant la précédente mandature, intégré à la campagne des élections municipales de 2020, le projet a connu une pose de première pierre en juillet 2021.

L'équipement a ouvert en octobre dernier. Il a reçu le nom de Madeleine Brès, première femme française à accéder aux études de médecine en 1868. Un QR code à l'entrée permet de télécharger des informations sur son parcours.

Le chantier s'est inscrit dans le principe de densification urbaine en répondant aux exigences de la loi Climat et résilience. Orvitis a assisté la maîtrise d'ouvrage de la commune. Le maître d’œuvre est STCE. Le bâtiment de haute qualité environnementale a été dessiné par le cabinet d'architecture AA Group et réalisé par Synapse Construction.

L'investissement s'élève à 2,3 millions d'euros financés par l’État (1,1 million d'euros venant de France relance), la Région Bourgogne-Franche-Comté (300.000 euros), le Département de la Côte-d'Or (300.000 euros) et la commune (650.000 euros via un emprunt sur 20 ans).

Dix-sept professionnels de santé


L'équipement de santé comprend également une pharmacie, un centre de vision et un laboratoire de biologie médicale.

Deux médecins généralistes et deux infirmières font vivre cette maison de santé. Chirurgien dentiste, psychologue clinicienne, kinésithérapeute, diététicienne, ostéopathe, sophrologue, hypnothérapeute, orthopédiste-orthésiste, orthophoniste et biologiste participent également au projet de santé.

«L'accueil des petits urgences» est encore à développer, en lien avec l'ARS. Des stages seront proposés aux étudiants en sciences de la santé, en lien avec l'université de Bourgogne, de façon à «montrer tout l'intérêt d'exercer en ruralité», ainsi que l'indique Gilles Brachotte.

La maison de santé de Thorey-en-Plaine travaillera en lien avec la communauté professionnelle territoriale de santé Pays d'or et le centre hospitalier d'Auxonne.

«L'avenir de notre système de santé»


«Cette maison de santé est un exemple parfait de la méthode sur laquelle je veux que nous nous appuyons : une démarche ancrée dans un territoire de santé pour répondre aux besoins de la population», indique le ministre qui souligne «la réponse complète» proposée. «Des structures comme celle-ci sont une chance pour notre système de santé, c'est l'avenir.»

La création du nouvel équipement s'inscrit dans le cadre du plan «Ma santé 2022» qui visait notamment à atteindre 2.000 structures en 2022 sur l'ensemble du territoire national. On compte aujourd'hui 2.150 maisons de santé hébergeant 30.000 professionnels de santé.

«J'ai beaucoup de craintes pour l'avenir», indique une médecin généraliste


Après avoir coupé le ruban tricolore, le ministre part à la découverte de la structure, guidé par le maire, et échange avec les professionnels de santé. François Braun découvre ainsi les cabinets flambant neufs du kinésithérapeute,   du laboratoire de biologie exploité en lien avec le CHU Dijon Bourgogne, de la chirurgien-dentiste ainsi que l'espace bien-être.

Une médecin généraliste interpelle le ministre lors de l'étape dans son cabinet.  Exposant tout d'abord sa vision de la maison de santé qui permet de coordonner les soins en respectant «les compétences dans le domaine de chacun».

«J'ai beaucoup de craintes pour l'avenir», enchaîne-t-elle alors que, sur son bureau, un petit cercueil en carton annonce «la mort du médecin de famille».

«Ce projet de loi de financement [de la Sécurité sociale] m'inquiète énormément sur le fait que j'ai l'impression qu'on détricote ce rôle du médecin généraliste avec des délégations de tâches à d'autres professionnels de santé. J'ai l'impression que les compétences respectives de chacun ne sont pas respectées», indique-t-elle.

«Il n'y a pas de délégation de tâches dans le PLFSS», répond tranquillement le ministre qui entend battre en brèche la «désinformation» : «il y a des partages de compétences dans le cadre d'un exercice coordonné, il y a quelques expérimentations qui vont être faites, en particulier pour les certificats de décès qui est un vrai problème».

Objectif 10.000 assistants médicaux en 2025


Un interne en stage à Thorey-en-Plaine indique «découvrir les difficultés de la médecine générale (…) et les conditions de travail qui se dégrade avec de plus en plus de patients, un manque de reconnaissance des instances officielles et parfois aussi des patients». Il partage ainsi l'«inquiétude» d'autres internes qui lui disent hésiter à s'installer.

L'interne explique son travail «avant les consultations» et «tard le soir» : «c'est quinze ou vingt prises de sang à regarder, quatre scanners, dix radios» sans oublier «de rappeler les patients, refaire des ordonnances». Et de remettre en cause «la tarification à l'acte uniquement sur la consultation».

Pour l'heure, il n'y a pas d'assistant médical à la maison de santé de Thorey-en-Plaine. Pourtant, le ministre rappelle son engagement à lever les différents freins au recrutement pour atteindre 10.000 assistants médicaux en 2025 contre 3.000 aujourd'hui.

«Il faut que l'on fasse avec une population française qui vieillit, qui a de plus en plus de besoins de santé et des professionnels de santé – en tout cas médecins – qui, en nombre, diminuent. Il faut que l'on trouve cet équilibre qui passe par redonner du temps médical en supprimant toutes les tâches qui ne sont pas 'productives' en faisant du partage de compétences», explique François Braun.

«Un raisonnement sur la réponse aux besoins de santé de la population»

 
«C'est une remarquable réalisation», confie le ministre à l'issue de sa visite, «c'est un très bel exemple de ce qui doit être fait sur le territoire, un bel exemple de complémentarité entre professionnels de santé».

François Braun salue «l'investissement sans faille [des professionnels de santé] depuis plus de deux ans maintenant». «Je comprends leurs inquiétudes, leurs craintes par rapport à l'avenir. Je suis là aussi pour leur assurer que, non seulement, on va prendre soin de la santé des Français mais aussi je veux prendre soin de la santé des soignants. Ils ont besoin de travailler dans de bonnes conditions et on voit ici une réalisation qui permet justement ces bonnes conditions de travail», développe-t-il.

Concernant l'effet sur un territoire d'une création de maison de santé, le ministre explique qu'«on ne doit pas être dans un raisonnement sur de l'offre de soins mais sur la réponse aux besoins de santé de la population». «Cette réponse n'est pas que dans les villes, elle doit être aussi dans le milieu rural.»

Au sujet des liens avec les centres hospitaliers, François Braun met en avant «la gradation des soins» et «l'intérêt des parcours de santé» : «il faut travailler avec l'université, avec les autres professionnels, c'est ça l'avenir de notre système de santé».

Après Thorey-en-Plaine, François Braun s'est dirigé vers Chenôve pour une autre inauguration : un laboratoire créé par l'industriel Urgo portant sur la recherche en thérapie cellulaire afin de créer de la peau artificielle.

Jean-Christophe Tardivon

François Braun au coeur du laboratoire de recherche d'Urgo sur la peau artificielle