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05/06/2023 20:39

CÔTE-D'OR : Le SDIS décrète la «tolérance zéro» pour les agresseurs de sapeurs-pompiers

«Il faut que tout le monde sache qu'il y a une attention particulière portée aux sapeurs-pompiers», a déclaré le directeur du SDIS 21 en présentant, ce lundi 5 juin, un protocole établi avec le parquet de Dijon pour faciliter le dépôt de plainte des sapeurs-pompiers.
Les agressions de sapeurs-pompiers se multiplient en France, les sapeurs-pompiers constatant parfois que les personnes auxquelles ils portent secours se retournent contre eux. La Côte-d'Or n'échappe pas à ce phénomène.

Ce lundi 5 juin 2023, les représentants du Service départemental de secours et d'incendie de la Côte-d'Or (SDIS 21) ont indiqué «condamner fermement ces agissements».

De plus, une évolution du Code pénal vise à faciliter le fait de se constituer partie civile en cas de poursuites pénales pour incendie volontaire afin d'obtenir une indemnisation.

«Le seuil de la violence monte tous les ans»


Le contrôleur général Régis Deza, directeur du SDIS 21, déplore les «chroniques de la violence ordinaire qui s'adresse aux pompiers» alors que «depuis une vingtaine d'années, il y a une augmentation de la violence faite aux pompiers et le seuil de ce qui est la violence qui monte tous les ans».

Après avoir appris à traiter, en lien avec les forces de sécurité intérieure, les violences urbaines ciblant des sapeurs-pompiers, les agents se trouvent confronter aux problématiques associées aux violences intra-familiales ainsi qu'aux violences liées à la consommation d'alcool ou de stupéfiants.

«Prendre le maximum de mesures pour protéger nos personnels»


«Nos personnels donnent de leur temps, de leur vie pour porter secours», rappelle le contrôleur général Régis Deza. «Il faut qu'on affiche clairement cette notion de tolérance zéro».

«On se doit de prendre le maximum de mesures pour protéger nos personnels», appuie Hubert Poullot (LR), vice-président du conseil départemental de la Côte-d'Or et président du SDIS 21, «protéger les biens et l'environnement, c'est le but de nos sapeurs-pompiers mais il faut qu'ils reviennent car ce n'est pas normal de travailler comme ça».

Trois niveaux pour caractériser les agressions

 
Sous-directeur des ressources opérationnelles du SDIS 21, Bruno Boltz se dit «particulièrement vigilant» vis à vis des situations où «[les] sapeurs-pompiers subissent des agressions avec des niveaux de violence importants ou avec des armes par destination qui sont susceptibles de les blesser».

Le SDIS 21 classe les agressions en trois niveaux : agression verbale (15 déclarations en moyenne par an sur les quatre dernières années contre 10 sur cinq mois en 2023), contact physique direct ou indirect (12 déclarations en moyenne par an contre 4 début 2023) et usage d'une arme y compris d'une arme par destination (4 de moyenne par an contre 3 début 2023).

«On a beaucoup plus de déclarations que par le passé», note toutefois le sous-directeur départemental des ressources opérationnelles.

«Les victimes sont susceptibles de se retourner contre leurs sauveteurs. (…) Cela peut être dû à plusieurs aspects. Soit les gens ont fait un malaise et sortent du malaise, ils ne comprennent pas la situation, ils deviennent agressifs. Soit ils sont sous un état d'alcoolémie», explique Bruno Boltz.

Le SDIS 21 accompagne les sapeurs-pompiers qui déposent une plainte

 
Un protocole a été établi entre le SDIS 21, la police, la gendarmerie, la préfecture de la Côte-d'Or et le parquet de Dijon pour «faire valoir le droit à réparation des sapeurs-pompiers».

Dans ce cadre, deux niveaux de réaction sont proposés à l'agent agressé : procéder à l'information du procureur – qui peut décider d'une éventuelle convocation de l'auteur de l'agression – ou à un dépôt de plainte.

En cas de plainte, le SDIS 21 accompagne l'agent : «il faut que tout le monde sache qu'il y a une attention particulière portés aux sapeurs-pompiers», insiste le contrôleur général Régis Deza.

L'accompagnement se fait au titre de la protection fonctionnelle. Maître Aurélie Champenois, inscrite au barreau de Dijon, est proposée mais l'agent concerné conserve la faculté de choisir un autre avocat.

«On bénéficie de condamnation de la justice»


«Ces dispositifs fonctionnent plutôt bien et de plus en plus souvent», constate le directeur du SDIS 21, «on bénéficie de condamnation de la justice et d'accompagnement». Auparavant symbolique, l'indemnisation du préjudice subi versé par l'auteur de l'agression peut désormais atteindre 600 euros.

Sur les cinq premiers mois de 2023, 11 agents du SDIS 21 ont demandé à bénéficier de cette protection fonctionnelle, soit autant que durant toute l'année 2021 et plus qu'en 2022.

Le port de caméra-piétons à l'étude


«On a des réflexions pour limiter les expositions des différents agents y compris SOS Médecins par exemple», signale le contrôleur général Régis Deza. Dans ce contexte, le port de caméra-piétons est à l'étude, une possibilité offerte par la loi Matras du 25 novembre 2021. «Ça permet de dénouer des situations tendues par le simple fait d'allumer la caméra», analyse Bruno Boltz.

À noter que, depuis la loi relative au renforcement de la sécurité des sapeurs-pompiers du 6 mars 2019, les témoins d'agression de sapeurs-pompiers peuvent déposer plainte de façon anonyme.

En cas d'agression d'un de ses agents, le SDIS peut être fondé à déposer également une plainte en cas de détérioration de matériel ou de perte de délai dans l'intervention en cours.

Le SDIS 21 se porte partie civile en cas d'incendie volontaire


La loi du 25 novembre 2021 visant à consolider notre modèle de sécurité civile et valoriser le volontariat des sapeurs-pompiers et les sapeurs-pompiers professionnels a modifié l’article 2-7 du Code de procédure pénale pour permettre aux SDIS de se constituer partie civile dans le cas des incendies volontaires. Auparavant, la possibilité était limitée aux feux d'espaces naturels.

Grâce à cette disposition, les SDIS peuvent réclamer aux auteurs d'incendies volontaires le remboursement du coût lié aux moyens humains et matériels mis en œuvre pour éteindre les flammes.

Un incendiaire condamné à verser une indemnisation de 6.000 euros


Non seulement de tels remboursements contribueront aux finances du SDIS 21 mais la disposition pourrait participer à faire de la prévention vis à vis des potentiels incendiaires : «d'un point de vue pécuniaire, ils peuvent être appelés à répondre de leurs actes», insiste Bruno Boltz.

Le SDIS 21 a déjà activé deux fois cette disposition notamment en se portant partie civile début 2023 dans le cas d'un incendie volontaire dans un bâtiment. La comparution immédiate de l'auteur a conduit le tribunal à accorder une indemnisation de 6.000 euros au SDIS 21.

Suite aux échanges avec le SDIS 21, le procureur de la République a sensibilisé les services enquêteurs afin de considérer le SDIS comme une victime. En fonction de quoi, le SDIS 21 est «tenu informé des comparutions pour mises à feu volontaires» et «tend vers une automaticité dans la constitution de partie civile».

Jean-Christophe Tardivon