À Beaune, ce mercredi 8 juin, le directeur de Génération Nation était l'invité d'un meeting des candidats du Rassemblement National en Côte-d'Or. «Ce n'est pas la police évidemment qui tue, c'est les policiers qui se font de plus en plus tuer», a réagi Aleksandar Nikolic.
Face à un concurrent ayant fondé Génération Z en Bourgogne-Franche-Comté, en l'occurrence Denis Jordan (RCQ), René Lioret, candidat investi par le Rassemblement National sur la cinquième circonscription, a eu l'idée d'inviter le directeur de Génération Nation, Aleksandar Nikolic.
Ex-Front National de la Jeunesse, Génération Nation est le mouvement de jeunesse du Rassemblement National qui revendique 25.000 adhérents de 16 à 30 ans dans toute la France.
Depuis 2021, Aleksandar Nikolic, 36 ans, en est le directeur. Il a succédé à Jordan Bardella, actuel président par intérim du Rassemblement National. De plus, Aleksandar Nikolic préside le groupe politique d'opposition du RN au sein du conseil régional de Centre-Val de Loire.
Ce mercredi 8 juin 2022, dans une salle de la Tour Marie de Bourgogne à Beaune, une cinquantaine de personnes ont assisté à un meeting départemental en présence de Grâce Jourdier (candidate sur la première circonscription), Mélanie Fortier (deuxième) et Jean-Marc Ponelle (quatrième). Dominique Alexandre Bourgois (troisième) étant excusé.
L'espoir d'«un groupe puissant» à l'Assemblée nationale
Délégué départemental du Rassemblement National en Côte-d'Or, René Lioret est le premier à prendre la parole pour rappeler que Marine Le Pen, avec 13,3 millions d'électeurs, est arrivée en tête dans 153 circonscription en France (dont la quatrième de Côte-d'Or) et à plus de 50% des voix dans 100 circonscriptions.
En fonction de quoi, le délégué espère «une groupe puissant» avec l'espoir d'atteindre 58 députés, un effectif permettant de déclencher éventuellement une motion de censure du gouvernement.
René Lioret se montre en cela optimiste. D'un côté, le RN étant un parti particulièrement pyramidal, le nombre de figures nationales ayant émergé en dehors de Marine Le Pen est relativement réduit. De l'autre, en dehors d'une présence dans les conseils régionaux, les fortes implantations locales sont peu répandues. Dans ce contexte, le scrutin uninominal à deux tours devrait se révéler peu favorable aux candidats de la droite nationale.
Les sondages laissent cependant envisager la possibilité de créer un groupe parlementaire, ce qui serait une première depuis 1986 et l'entrée de 35 députés FN à l'Assemblée nationale autour de Jean-Marie Le Pen du fait d'un scrutin de liste proportionnel à un tour.
Les jeunes, un enjeu pour le RN
Grâce Jourdier hérite alors du micro pour aborder le chapitre de la santé au travers de son expérience d'auxiliaire ambulancière. «Il faut absolument que l'on recentre nos efforts sur les pôles d'urgences», considère l'oratrice qui propose de «remettre un service de filtrage à l'entrée des urgences» car, au CHU Dijon Bourgogne, «66% des gens qu'on transfère en SAMU 15 ne sont pas des urgences vitales».
Coordinatrice régionale de Génération Nation en Bourgogne-Franche-Comté, Mélanie Fortier estime que le RN attire «de plus en plus de jeunes». Ce sera effectivement un des enjeux des années à venir car, si Éric Zemmour poursuit son parcours politique, le Rassemblement National devra compter avec Reconquête dont la radicalité séduit bon nombre de jeunes nationalistes.
La candidate déroule alors les propositions de Marine Le Pen pour la jeunesse exposée durant la présidentielle comme l'exonération d'impôt sur le revenu pour les moins de trente ans. Au passage, Mélanie Fortier tacle également Jean-Luc Mélenchon et ses «mesures inapplicables».
«Réintroduire le service public au sein des zones rurales»
«Homme d'âge mûr» mais «jeune en politique», Jean-Marc Ponelle traite ensuite de la ruralité en ciblant tout d'abord ses concurrents Laurence Porte (divers centre) et Hubert Brigand (LR-UDI) avant de railler «l'enfumage total» proposé par Emmanuel Macron au travers de son «grand chantier de la reconstruction» alors que la France n'est pas dans l'état de 1945.
Le candidat préfère insister sur la proposition de «réintroduire le service public au sein des zones rurales». «Pour un euro dépensé en métropole, il va falloir en dépenser deux ou trois en ruralité», ajoute-t-il.
Avec sa casquette de candidat cette fois, René Lioret revient sur la proposition de Marine Le Pen d'interroger les Français sur des questions liées à l'immigration au travers d'un référendum : «priorité nationale» pour les allocations sociales notamment, prise en charge des mineurs étrangers non accompagnés, révision de l'aide médicale d’État, droit du sang plutôt que droit du sol pour acquérir la nationalité, expulsion des ressortissants étrangers délinquants, «fermeture définitive des mosquées radicales» et «expulsions des imams au moindre prêche appelant à la guerre civile en France».
La «faillite» de la gauche radicale en Grèce
Très à l'aise, Aleksandar Nikolic prend alors le micro pour un discours mené tambour battant en commençant par critiquer le programme de la Nouvelle Union populaire écologique et sociale sur la sortie du nucléaire ou sur les mesures sociales.
L'orateur prend appui sur l'expérience gouvernementale de la gauche radicale conduite par Aléxis Tsípras en Grèce, Premier ministre de 2015 à 2019, voyant des similitudes avec les propositions de Jean-Luc Mélenchon : «en six mois, ça a été la faillite (…) et c'est l'Union européenne qui a pu ensuite sauver la Grèce».
En matière de pouvoir d'achat, Aleksandar Nikolic propose une baisse de la fiscalité – TVA et TICPE – sur les carburants pour atteindre une économie de «trente euros» par plein de gasoil.
Aleksandar Nikolic encourage «la modernisation de notre appareil industriel»
Passant rapidement d'un sujet à l'autre, l'orateur aborde la santé en mettant en balance les économies faites sur les thématiques en lien avec l'immigration et le financement du système de santé. «On propose de créer des places pour former des médecins pour rattraper le temps perdu», signale-t-il avant de vanter «la télémédecine clinique» plutôt que «les conversations Whatsapp» avec un médecin.
En matière de ruralité, «c'est un cercle vicieux qui a été mis en place», analyse l'intervenant : «il y a moins de boulot à proximité donc il y a moins de familles donc on se dit qu'on peut supprimer des services publics, on ferme des classes donc ça n'attire personne et ça devient des territoires abandonnés». «Il faut avoir une vraie vision pour ces territoires [ruraux] en régénérant de l'activité économique», exhorte-t-il, notamment en soutenant «les filières d'apprentissage».
Aleksandar Nikolic défend alors la réindustrialisation de la France avec une vision iconoclaste basée sur «la modernisation de notre appareil industriel» : l'augmentation des coûts de transports et le développement de la robotisation pouvant améliorer la compétitivité des industries françaises ou européennes. Selon lui, la France compte deux fois moins de robots par unité industrielle que l'Allemagne. «C'est primordial pour régénérer de l'activité économique en zone rurale.»
«C'est notre rôle de trouver des solutions sur du long terme pour améliorer le pouvoir d'achat, créer de l'activité économique et sur du très court terme pour que les gens puissent pouvoir vivre après le 10 du mois, (…) c'est une urgence vitale pour les gens», glisse l'orateur.
«J'ai appris à aimer la France par le sport, son histoire, sa culture»
Sans transition, le directeur de Génération Nation brandit un totem populiste : «la justice est beaucoup trop du côté des délinquants et pas des victimes (…) alors qu'on devrait être du côté de ceux qui doivent baisser les yeux, ceux qui souffrent dans certains quartiers. Non, on fait le choix des dealers. Il va falloir que ça change».
D'où la proposition d'augmenter le nombre de magistrat, d'instaurer des peines planchers ainsi qu'une «véritable sanction» dès le premier acte de délinquance.
«La France, c'est cette idée que peu importe d'où vous venez, si vous prenez l'histoire, la langue, la culture, et que vous vous appropriez tout ça, (…) vous devenez un Français à part entière», lance ensuite Aleksandar Nikolic en faisant référence à Joséphine Baker, «on est en train de bafouer cette idée magnifique».
À l'initiative de René Lioret, Aleksandar Nikolic évoque son père d'origine serbe lui ayant appris à «aimer la France», sa mère ayant vécu «pendant près de dix ans sans papier en France». Aujourd'hui, sa compagne est Antillaise et leurs enfants se prénomment Léon et Victoire : «ça compte aussi d'avoir des prénoms qui montrent un héritage avec cette merveilleuse histoire de France.»
«Au lycée, on nous apprend à ne pas aimer la France. (…) C'est presque une anomalie quand on a des origines étrangères de pas plus se revendiquer de ses origines étrangères», estime celui qui, à 15 ans, organisait «des manifs anti-Le Pen» dans son lycée en 2002. «J'ai appris à aimer la France par le sport, son histoire, sa culture.»
«C'est très compliqué dans certains quartiers de s'assimiler et souvent, il y a même une assimilation à l'envers. Il y a ce combat culturel aussi à mener. On voit de plus en plus dans les lycées, dans les collèges, des codes qui n'ont rien à voir avec la France qui sont repris», s'insurge l'orateur. «Redéfinir ce que l'on est, avec fierté, pour représenter notre identité culturelle, c'est quelque chose de très très important.»
«Les policiers se font de plus en plus tuer»
Sans surprise, la saillie «la police tue» de Jean-Luc Mélenchon fait réagir l'assistance au moment du temps d'échanges. «C'est électoraliste mais c'est grave. (…) Mais ce n'est pas la police évidemment qui tue, c'est les policiers qui se font de plus en plus tuer», rétorque Aleksandar Nikolic.
«Les conflits entre bandes tuent énormément et ont font augmenter à ce point-là les homicides. (…) Parfois il y a des victimes totalement innocentes qui n'ont rien à voir et qui sont touchées. Quand il dit 'la police tue', on laisse ces gens qui ont peur au quotidien dans le désarroi parce que la police peut de moins en moins intervenir», développe l'orateur.
Aleksandar Nikolic évoque alors une anecdote vécue alors qu'il était sapeur-pompier : «on était obligé de jurer aux dealers que la police n'allait pas intervenir ensuite ; (…) ils considéraient que c'était l'intervention d'une force étrangère pour eux. C'est terrible que les gens qui sont agressés savent que la police va mettre du temps à arriver ou ne viendra jamais parce que la police aura peur. (…) Il y a un ensauvagement avec une augmentation des homicides, là dessus, [Jean-Luc Mélenchon] ne dit rien ou presque. (…) C'est terrible d'accuser ceux qui nous protègent».
Dans la salle, avant le traditionnel temps de convivialité, un entrepreneur du bâtiment suggère de «défiscaliser» le recrutement d'un apprenti encadré par un salarié expérimenté devenant tuteur, cela afin de diminuer le nombre de travailleurs du secteur du bâtiment qui mènent des activités pénibles jusqu'à la veille de leur départ à la retraite. Une idée écoutée attentivement par l'intervenant.
Jean-Christophe Tardivon
Les candidats sur la cinquième circonscription (par panneau électoral)
1- René Lioret (Rassemblement National)
2- Isabelle de Almeida (Parti communiste français, NUPES)
3- Clélia Robert (divers écologistes)
4- Françoise Petet (Lutte ouvrière)
5- Hervé Moreau (divers droite)
6- Denis Jordan (Reconquête)
7- Charlotte Fougère (LR-UDI)
8- Didier Paris (Ensemble)
9- Michel Lambert (Parti ouvrier indépendant démocratique)
10- Jean-Claude Bouvarel (Debout La France)