Recherche
Pour nous joindre
redaction.infosdijon@gmail.com
SMS au 07.86.17.77.12
> Côte d'Or > Côte d'Or
26/04/2021 03:26

SOCIAL : «La réforme de l'assurance-chômage ne concerne absolument pas les intermittents du spectacle», argumente Fadila Khattabi

Après avoir rencontré la coordination des intermittents et précaires au Grand Théâtre de Dijon, Fadila Khattabi a défendu ce vendredi 23 avril la réforme de l'assurance-chômage. La députée LREM de la Côte-d'Or veut «mettre en place l'emploi durable et favoriser le CDI».
Initiée en novembre 2019, la réforme de l'assurance-chômage a été suspendue avec le surgissement de la crise sanitaire. À présent, un décret du 30 mars 2021 prévoit l'application de nouvelles règles de calcul des indemnités pour les demandeurs d'emploi à partir du 1er juillet prochain.

L'objectif du gouvernement est tout à la fois de réduire le déficit de l'Unedic – la dette de l'organisme s'établissant à 54,2 milliards d'euros fin 2020 – et de rendre plus égalitaire le système d'indemnisation.

La dette de l'Unedic ne cesse d'augmenter


Depuis l'échec des négociations entre le gouvernement et les partenaires sociaux, en janvier 2019, l'exécutif mène seul la réforme. Une récente étude de l'Unedic est venue alimenter la réflexion sur ses conséquences.


Les nouvelles règles de calcul notamment conduiront à indemniser moins mais plus longtemps : 14 mois en moyenne contre 11 actuellement. Selon l'Undedic, 1,15 millions d'allocataires (soit 41%) verront une baisse moyenne de 17% la première année. Dans l'ensemble, 63% des allocataires percevront une allocation moins élevée et 23% une indemnisation supérieure. Un plancher s'appliquera aux allocataires pour éviter des indemnités trop basses suite à des  alternance de période d'activité et de travail. Ce plancher concernera 365.000 bénéficiaires.

Une fois les mesures repoussées mises en application, la réforme devrait conduire à une baisse des dépenses de 2,3 milliards par an. En février dernier, l'Unedic a indiqué ses projections pour 2022 : un déficit de 6,4 milliards d'euros et une dette de 70,6 milliards d'euros.

Occupation de lieux culturels pour contester la réforme


À Paris, le théâtre de l'Odéon est occupé depuis le 4 mars dernier pour protester contre cette réforme de l'assurance-chômage et pour porter la voix des travailleurs précaires. Le mouvement a essaimé au point de compter près de 120 lieux culturels occupés dans toute la France.

À Dijon, c'est le Grand Théâtre qui est occupé depuis le 15 mars dernier par la coordination des intermittents et des précaires. Des actions ont été menées pour alerter sur l'impact des fermetures administratives liées à la crise sanitaire et pour contester également la réforme (lire notre article sur l'opération Fligthcase Tour).

Une protestation par anticipation


La députée LREM de la Côte-d'Or Fadila Khattabi est allée à la rencontre des intermittents du spectacle du Grand Théâtre pour entendre leurs arguments et défendre la position du gouvernement. «Un échange constructif et courtois», selon la présidente de la commission des Affaires sociales de l'Assemblée nationale.

«La réforme de l'assurance-chômage ne concerne absolument pas les intermittents du spectacle», réagit Fadila Khattabi ce vendredi 23 avril 2021. La députée insiste sur le fait que la réforme de 2021 n'est «pas la même» que celle prévue en 2019 alors que «l'économie était au vert avec un taux de chômage de moins de 8 %».

«On sait que ça ne nous concerne pas», auraient répondu les représentants de la coordination en toute connaissance de cause. Les intermittents se mobilisent donc par anticipation : «les annexes 8 et 10 qui sont celles du spectacle vont être renégociées en 2022, comme elles le sont tous les trois ans», indiquait ce 23 avril Philippe Journo, membre du Syndicat français des artistes, rattaché à la CGT du spectacle.

«Des négociations sont en cours pour faire perdurer l'année blanche»


«Les intermittents du spectacle ont quelques inquiétudes pour l'avenir les concernant et se mobilisent par solidarité pour les autres précaires», résume Fadila Khattabi.

«Votre secteur a été ultra protégé avec l'année blanche», leur a répondu la députée pour souligner l'implication de l'exécutif à l'égard du monde de la culture. Selon le gouvernement, depuis le début de la crise, les mesures de soutien au secteur culturel représentent 7,4 milliards d'euros. D'un autre côté, le plan de relance national flèche deux milliards d'euros de crédit pour la reprise d'activités du secteur culturel.

Annoncée le 6 mai 2020 par Emmanuel Macron, «l'année blanche» consiste à une prolongation des indemnités chômage des intermittents du spectacle durant une année au-delà des six mois sans activité (jusqu'au 31 août 2021). Le coût de ce dispositif est estimé à 949 millions d'euros au niveau national.

Alors que les intermittent du spectacle demandent la prolongation de cette année blanche, la présidente de la commission des Affaires sociales de l'Assemblée nationale annonce que «des négociations sont en cours pour faire perdurer le dispositif et peut-être faire perdurer l'année blanche, j'ai le sentiment que les choses devraient aboutir lors du dialogue social».

«En 10 ans, le nombre de contrats courts a augmenté de plus 250%»


La députée défend la réforme gouvernementale : «On veut lutter contre l'alternance de périodes de chômage, les entreprises multiplient les contrats courts. Si on veut lutter contre la précarité, il faut mettre en place l'emploi durable et favoriser le CDI, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui».

«En 10 ans, le nombre de contrats courts a augmenté de plus 250%», signale la députée, reprenant ainsi un argument largement diffusé par la ministre du Travail Élisabeth Borne.

6% de CDD en 1982, 15% en 2017


«Depuis les années 2000, les embauches en contrats à durée déterminée (CDD) de très courte durée (moins d'un mois) ont fortement augmenté et la durée médiane des CDD s'est raccourcie», indiquait une étude du ministère de l’Économiediffusée en avril 2019. Même si les CDI reste très largement majoritaires, la part de CDD dans l'emploi salarié total est passée de 6% en 1982 à 15% en 2017.

«En 2017, les  embauches en contrats de moins d'un mois représentent  presque 70 % des  embauches totales, alors qu'elles représentaient moins de  50 % des embauches en 2000. Ces deux évolutions parallèles – augmentation  des embauches en CDD concomitante à la stabilité du stock – traduisent un  raccourcissement de la durée des contrats», analysait cette même étude.

«L'objectif est de lutter contre la précarité et le recours aux contrats courts»


Fadila Khattabi considère donc que «le système actuel est injuste» : «quelqu'un qui va travailler une période de six mois suivie de six mois de chômage a une indemnité supérieure à celui qui aura travaillé six mois de façon fragmentée».

«Certains pensent que le but est de faire des économies alors que l'objectif est de lutter contre la précarité et le recours aux contrats courts. Il n'est pas question de faire des économies, il y aura une baisse des indemnités avec la dégressivité que si les indicateurs sont au vert. (...) Certaines activités vont continuer d'être sous perfusion. La crise sanitaire est venue bousculer le monde du travail. La réforme ne s'appliquera que si la situation le permet», insiste la députée.

Un malus pour les entreprises qui abusent des contrats courts


À compter du 1er juillet également, le système du bonus-malus s'appliquera aux entreprises. Selon le ministère du Travail, il prévu pour récompenser les entreprises vertueuses en termes d’emploi durable et sanctionner financièrement celles qui recourent de manière excessive aux contrats courts. Il s'agit d'inciter les entreprises à proposer davantage de CDI et à rallonger la durée des CDD.

Une «période de référence» se mettra donc en place pour les entreprises au 1er juillet. «Les entreprises qui abusent verront les premières sanctions en octobre 2022», signale Fadila Khattabi. En revanche, les entreprises concernées par les fermetures administratives ne seront pas incluses dans le dispositif du bonus-malus.

Déploiement du SPIE en Côte-d'Or


La députée applaudit la mise en place du Service Public de l'Insertion et de l'Emploi (SPIE). Le 20 avril dernier, la ministre chargée de l'Insertion a annoncé que la Côte-d'Or figurait parmi les premiers territoires retenus pour déployer le SPIE (lire le communiqué).

«En plus de l'accompagnement des compétences, il faut un accompagnement social», justifie la députée. Le SPIE s'attachera à lutter contre les freins à l'emploi comme l'accès aux soins ou les problématiques de logement.

«L'assurance chômage est le bien commun de tous les Français», selon Fadila Khattabi mais «le système ne permet pas de sortie de cette précarité». L'ex-élue socialiste rend hommage à François Hollande pour la création de la prime d'activité, s'empressant d'ajouter que depuis l'élection d'Emmanuel Macron, la prime d'activité a doublé : «quand on travaille au SMIC, on touche la prime d'activité».

Jean-Christophe Tardivon


Infos-dijon.com - Mentions légales