Il était une fois une apothicairerie établie en 1690 et démantelée en 2015. Véritable pharmacie de l'ancien hôpital de Dijon, elle a entamé ce mercredi 20 juillet 2022 une nouvelle vie au sein de la Cité internationale de la Gastronomie et du Vin.

Les boiseries avait déjà été installées pour l'inauguration du 1204, le centre d'interprétation de l'architecture et du patrimoine de Dijon (lire notre article). Ce jour, les équipes de la Ville de Dijon ont finalisé la mise en place des 138 pots de faïence dont certains datent du XVIIIème siècle.


Animateur associé au label Ville d'art et d'histoire, accordé par le ministère de la Culture à la commune, Laurent Cessin a développé les enjeux de restauration et de présentation au public de l'apothicairerie pour sa nouvelle vie en lien avec la médiation de l'histoire hospitalière dijonnaise.

Des chênes abattus durant l'hiver 1689

Flashback. En 1689 – une période confirmée par dendrochronologie des cernes des boiseries –, des chênes sont coupés pour réaliser la structure de l'apothicairerie de l'hôpital Notre-Dame de la Charité accueillant 138 niches. Un placage en noyer est constitué en façade.

Prennent alors place dans les niches des contenants de matières premières servant à la préparation des remèdes pharmaceutiques destinés aux malades.

Des faïences dijonnaises du XVIIIème siècle

En 1741, le faïencier dijonnais Sigault, à l'emblème de cigogne encore visible rue Amiral-Roussin, réalise des pots pour l'hôpital. Il en reste une soixantaine.

Dans l'ensemble, les faïences sont de trois types : des pots canon sur pied destinés aux baumes et pommades, des pots chevrette avec un bec et une poignée destinés aux liquides et des piluliers.

Une lettre majuscule calligraphiée désigne la catégorie de produits : Sirop, Électuaire, Miel, Conserve, Huile ou encore Pilule. Certains noms sont imagés comme «H. sang de dragon» désignant l'huile du fruit du dragonnier de Cochinchine (Dracaena cochinchinensis).

La faïence est un matériau commode pour la préservation des produits. Solide, étanche et stable, elle ne sera remplacée par le verre qu'avec l'industrialisation de la filière au XIXème siècle.

Restauration des boiseries et des pots

Saut dans le temps. Au XIXème siècle, avec le développement de l'activité de l'hôpital, un laboratoire de préparation des produits médicaux est accolé à l'apothicairerie.

Plus près de nous donc, en 2015, alors que prend fin l'activité sur le site de l'hôpital général, se pose la question de ce qu'il va advenir de l'apothicairerie et du laboratoire. Devenus propriétés de la Ville de Dijon, la collectivité fait le choix de les déconstruire et d'enclencher une restauration avant une présentation au public.

Les boiseries sont alors restaurées par LP3 Conservation à Semur-en-Auxois, sous la direction de Thierry Palanque, durant deux ans. Les faïences sont prises en charge par Juliette Dupin, restauratrice en arts du feu de l'Atelier Vignier-Dupin à Paris.

«L'apothicairerie est la pièce la plus prestigieuse»

Aujourd'hui, l'apothicairerie est présentée à l'identique aux visiteurs, dans une pièce construite sur mesure au moment de la réhabilitation de la partie accueillant le 1204. Originellement, l'apothicairerie se situait là où l'hôtel Curio by Hilton est en cours d'aménagement. Le laboratoire est, lui, conservé dans les réserves des musées dijonnais.

«L'apothicairerie est la pièce la plus prestigieuse, la plus belle et qui était protégée au titre des monuments historiques», s'enthousiasme Laurent Cessin. «Au sein du parcours d'exposition du 1204, on a une pièce présentant 800 ans d'histoire hospitalière, ça a du sens de l'ouvrir au sein de l'ancien hôpital général, ça fait un écho particulier.»

Au centre de la nouvelle pièce, un dispositif de mise à distance – accueillant également des textes de médiation – canalise les visiteurs tandis que les pots sont sécurisés individuellement pour éviter les vols.

Visite libre ou commentée

Le 1204 étant accessible en visite libre, l'apothicairerie est désormais ouverte au public. Des parcours commentés de la Cité internationale de la Gastronomie et du Vin – notamment celui intitulé «Promenade de l'hôpital à la Cité» durant une heure et demie – passeront immanquablement par cette pièce emblématique de l'histoire du site.

Pour 2023, l'équipe du 1204 et Laurent Cessin réfléchissent à organiser une rencontre avec Thierry Palanque ainsi que la venue d'un pharmacien féru de produits médicaux anciens.

Le 1204

Cité internationale de la Gastronomie et du Vin
Accès par le parvis de l'Unesco ou par le Village gastronomique
Ouvert du mardi au dimanche, de 10 heures à 19 heures
Entrée gratuite
Programme jusqu'en août 2022