«Il n'y a pas de destin collectif dans l'extrémisme», a déclaré François Sauvadet, ce jeudi 12 septembre, pour tisser un lien avec l'actualité politique actuelle en inaugurant l'exposition historique en présence du préfet Franck Robine et de la première adjointe au maire de Dijon Nathalie Koenders.
L'histoire se raconte dans les jardins du Département. Dans le cadre des événements marquant les 80 ans de la Libération de la France, le conseil départemental de la Côte-d'Or propose de découvrir une exposition documentaire jusqu'en 2025.
Retraçant les enjeux durant l'Occupation, les faits d'armes de la Libération puis la reconstruction après-guerre, l'exposition «Côte-d'Or libérée !» est le fruit de trois de travail d'une équipe de quatre archivistes – dont deux stagiaire et alternant – des Archives départementales de la Côte-d'Or, dirigées par Édouard Bouyé, et de Dimitri Vouzelle, professeur d'histoire contemporaine au lycée international Charles de Gaulle, contribuant au service éducatif des Archives, et commissaire de l'exposition.
Pas de «politiquement correct»
L'exposition évite le piège du «politiquement correct» en abordant tout autant les gestes héroïques que les pages sombres de ce pan de l'histoire de France. Ainsi, est relatée la venue à Dijon du maréchal Philippe Pétain, chef de l’État français durant le régime de Vichy, le 27 mai 1944.
Des croix gammées sont reproduites avec un accompagnement didactique comme celui de la reproduction d'un tract de la Résistance recourant au symbole du régime nazi pour mieux dénoncer les collaborateurs en action.
La «Côte-d'Or libérée !» traite également des rafles de juifs avec l'hommage rendu à Clarisse Weill, la dernière Côte-d'Orienne déportée vers les centres d'extermination nazis, le 31 juillet 1944, plusieurs semaines pourtant après le Débarquement de Normandie.
La dramatique affaire Marsac n'est pas escamotée. Présumé responsable de plusieurs centaines d'arrestations durant l'Occupation, Jacques Marsac n'a pas pu être jugé, au dam des historiens. En février 1945, 20.000 personnes demandaient sa tête et, pour éviter un bain de sang en réprimant la manifestation, des militaires gardant la prison de Dijon l'ont livré à la foule qui l'a lynché.
En Côte-d'Or, durant la Seconde Guerre mondial, on recense 317 personnes internées et 962 personnes déportées ainsi que 290 résistants tués au combat et 237 fusillés.
Par ailleurs, Dimitri Vouzelle estime que près de 300 Côte-d'Oriens ont été tués par la Résistance en 1943 et 1944.
Un focus sur les citoyennes
La «Côte-d'Or libérée !» s'attache à revaloriser la participation des femmes à la Résistance ainsi que leur engagement dans la reconstruction. Dans l'immédiat après-guerre, un village de la Côte-d'Or a connu un conseil municipal composé uniquement de citoyennes.
«Dites bien que sans elles, la moitié de notre travail eût été impossible», martelait le colonel Rol-Tanguy, militant communiste, chef régional des Forces françaises de l'intérieur en l'Île-de-France en 1944.
Une large délégation pour ouvrir l'exposition
L'inauguration a eu lieu, ce jeudi 12 septembre 2024, à Dijon, en présence notamment de Franck Robine, préfet de la Côte-d'Or, François Sauvadet (UDI), président du conseil départemental de la Côte-d'Or, François-Xavier Dugourd (LR), vice-président délégué du conseil départemental de la Côte-d'Or, Nathalie Koenders (PS), conseillère départementale et première adjointe au maire de Dijon, Jean-Philippe Morel (PR), adjoint au maire de Dijon délégué notamment au devoir de mémoire, Ludovic Rochette (HOR), président de l'Association des maires de Côte-d'Or, Françoise Elloy, secrétaire générale du comité de parrainage du Concours national scolaire de la Résistante et de la déportation (CNRD), et Bruno Dupuis, directeur départemental de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONACVG) sans oublier de nombreux contributeurs ayant proposé des archives privées.
«Pour une démocratie, rien n'est pire que de revisiter notre histoire»
Dans son discours inaugural, François Sauvadet a salué «le message d'unité de ne pas accepter l'asservissement» porté dans les témoignages des anciens résistants. «C'est ça le témoignage vivant de la Résistance : le destin d'un pays relève de l'engagement de chacun. (…) [Les résistants] ont su dépasser leur propre destin pour forger un nouvel avenir à notre pays, là où le renoncement était partagé par beaucoup de nos compatriotes.»
«La flamme de la Résistance n'a jamais été aussi actuelle», a enchaîné le centriste, «c'est le refus de l'asservissement, c'est la confiance dans l'avenir, c'est la détermination à se forger un nouveau destin pour le pays». «Plus que jamais, nous devons restés attaché à notre histoire et la regarde en face. Pour une démocratie, rien n'est pire que de revisiter notre histoire.»
«Il n'y a pas de destin collectif dans l'extrémisme»
Poursuivant sur l'héritage de la Résistance, François Sauvadet a tissé un parallèle implicite avec l'actualité politique contemporaine : «ils ont eu le courage de se battre, ils ont eu aussi la force de se tendre la main pour garantir la paix». «Cette histoire sera toujours actuelle, c'est le combat pour la République, c'est le combat pour la liberté, c'est le combat pour les solidarités. (…) C'est un combat pour la dignité humaine.»
«Le message de la Résistance est puissant, il a traversé toutes ces décennies et il le restera pour peu que nous le portions ensemble», a insisté le président du Département en regardant les panneaux installés dans les jardins de la collectivité. «C'est à nous qu'il incombe de préserver ces valeurs chèrement acquises par nos aînés, chèrement portées par nos aînés et de les transmettre aux générations futures. (…) Dans ces temps d'incertitude que nous traversons, le message de la Résistance, envoyé à travers les années, c'est que nous devons tous avoir conscience qu'il n'y a pas de destin collectif, pas de destin pour un pays, dans le repli, le renoncement et dans l'extrémisme.»
Le préfet Franck Robine met ses pas dans ceux du commissaire de la République Jean Bouhey
Le préfet a rendu hommage à une résistante précoce : Blanche Grenier-Godard qui a lancé son mouvement dès le 17 juin 1940 alors que débutait l'occupation de Dijon.
Assurant «regarder l'histoire en face», le représentant de l’État a réagi à la présence d'un préfet pour accueillir Philippe Pétain à Dijon tout en notant que, parallèlement au régime de Vichy, s'étaient déployés des commissaires de la République dont le Côte-d'Orien Jean Bouhey qu'il considère également comme son «prédécesseur».
L'exposition ira également à la rencontre du public scolaire. Le prestataire Publistick a réalisé plusieurs versions : une fixe donc et six lots mobiles de vingt rollups qui circuleront dans les collèges de la Côte-d'Or jusqu'en 2025.
Jean-Christophe Tardivon
Informations pratiques«La Côte-d'Or libérée !»
du 12 septembre à mai 2025
Jardins du Département
53 bis, rue de la Préfecture à Dijon
De 8 heures à 17 heures
Entrée libre et gratuite