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20/03/2025 03:17

DEVOIR DE MÉMOIRE : La mémoire des victimes de la guerre d’Algérie transmise aux jeunes générations

La cérémonie a eu lieu, ce mercredi 19 mars, place Gaston-Gérard, à Dijon, en présence notamment de Jean-Philippe Morel, adjoint au maire au devoir de mémoire, et du sous-préfet Denis Bruel.
Ce mercredi 19 mars 2025, la place Gaston Gérard, à Dijon, a accueilli la Journée nationale du souvenir et du recueillement à la mémoire des victimes civiles et militaires de la guerre d’Algérie et des combats en Tunisie et au Maroc. Une cérémonie marquée par une volonté affirmée de transmettre la mémoire aux jeunes générations.

Autour du Mémorial Afrique du nord, les autorités civiles et militaires du département, les représentants d’associations d’anciens combattants et de nombreux élèves étaient réunis pour rendre hommage aux victimes d’un conflit longtemps resté dans l’ombre. Les collégiens de Saint-Michel ont prêté leur voix à l’appel des morts, lisant solennellement quarante noms parmi les 237 inscrits sur le monument. Un hommage progressif, entamé en 2019, qui vise à faire vivre chaque année la mémoire de ces soldats disparus.

Les élèves des collèges André Malraux et Saint-Michel ont également participé au dépôt de bleuets, symbole du souvenir et du respect envers ceux qui ont servi.

Dans son message, René Aubry, président du comité départemental de la FNACA, a rappelé l’importance de cette transmission : « L’âge venant, il est temps pour nous, acteurs de ce conflit, de nous adresser à la jeunesse d’aujourd’hui… Vous les jeunes, soyez nos ambassadeurs pour bâtir la France de demain dans un monde de progrès, ouvert au dialogue, à la tolérance, à la Paix. »

Un appel relayé par le sous-préfet Denis Bruel, qui a lu le message officiel de la ministre déléguée chargée de la Mémoire et des Anciens combattants. Ce texte soulignait à la fois les blessures du passé et la nécessité de les comprendre pour construire l’avenir : « La mémoire n’est pas un fardeau, mais une lumière. Une lumière qui éclaire les générations présentes et à venir, pour que l’Histoire ne se répète pas. »

La cérémonie s’est conclue par le dépôt de gerbes, la sonnerie aux morts et le refrain de la Marseillaise dans une atmosphère empreinte de respect, mais tournée vers un avenir que tout le monde espère de paix. 

Manon Bollery
Photographies Manon Bollery


Message de Patricia Miralles, Ministre déléguée auprès du ministre des Armées, chargée de la Mémoire et des Anciens Combattant 
 « Le 19 mars 1962, à midi, les armes se sont tues. Dans le fracas du siècle, une voix nouvelle s'élevait, celle d'un cessez-le-feu scellé par les accords d'Évian, mettant un terme à huit longues années d'un conflit qui n'avait pas encore dit son vrai nom.
Même si la paix retardait son avènement, le 19 mars aurait dû marquer l'aube d'un répit. Ce que la fin du feu avait de provisoire appelait un avenir, qui se dégageait doucement, non sans douleurs, non sans craintes, mais un avenir qui pouvait être à nouveau imaginé, peut-être même désiré.
Pour beaucoup, le 19 mars fut pourtant le début d'un autre exil, d'une autre souffrance, de nouveaux drames. Car si le temps de la guerre prenait fin officiellement, celui de la violence et des blessures continuait à bas bruit, dans un silence qui en redoublait la douleur.
Pour les combattants du contingent, jeunes hommes envoyés se battre dans une guerre dont la nature et le sens divisaient douloureusement la métropole, ce fut pour certains, pas tous, l'heure du retour. Le retour dans leurs familles, qu'ils leur tardaient de revoir. L'espérance de reprendre leur vie là où ils l'avaient laissée, même si rien ne sera plus comme avant.
Mais c'est aussi le début d'un combat silencieux: celui de la reconnaissance de ce qu'ils avaient enduré. Eux qui n'avaient pas tous choisi cette guerre mais qui en avaient connu l'âpreté dans les djebels, dans la chaleur ou le froid des nuits d'insomnies, dans le silence des montagnes ou la cacophonie des villes, eux qui portèrent longtemps le poids du non-dit.
Ils durent lutter, plus tard, pour que leurs droits soient reconnus, pour que leur expérience soit comprise, pour que leur engagement ne soit pas relégué aux marges de l'histoire.
Nous ne récusons plus aujourd'hui le malaise et les difficultés qu'ont connus les appelés au moment de rentrer. Ils retrouvaient un pays qui, par le sang ou le sol, était depuis toujours le leur, mais que pourtant ils ne reconnaissaient plus à l'identique, tel qu'ils l'avaient laissé, lorsqu'ils étaient partis se battre à sa demande.
Cette journée d'hommage, ils ont dû la demander, la revendiquer, la conquérir. Pour que dans une date s'incarne enfin le juste hommage de la Nation à cette génération qui a laissé une partie de sa jeunesse dans la poussière millénaire du sol algérien.
Mais le 19 mars fut aussi, pour d'autres, un jour d'abandon. Aux Harkis, soldats fidèles à la France, il n'offrit ni paix ni consolation.
Nombre d'entre eux, livrés à leur sort, périrent dans l'indifférence d'un monde qui détournait le regard. Ceux qui purent fuir trouvèrent refuge sur une terre qu'ils avaient servie, mais qui, trop longtemps, les relégua à la lisière de la société, dans une indifférence plus douloureuse que les barbelés des camps.
Pour les pieds noirs, ce jour hâta l'arrachement. L'exode devint le dernier chapitre d'une histoire commencée en France et poursuivie sur l'autre rive de la Méditerranée, sur cette terre où les collines rousses se reposent à l'ombre des oliviers centenaires. Cette terre où l'histoire a déposé ses splendeurs et ses tragédies. Ils se préparèrent à quitter ces paysages aimés, et dans leurs yeux brillaient déjà le reflet des ports surpeuplés et des traversées amères vers l'inconnu. L'Algérie, ce pays qui avait été le leur, ne serait plus jamais leur foyer. Et puis, il y a les autres, les innombrables autres. Les anonymes pris dans la tourmente, les civils fauchés par la violence, les familles déchirées par les engagements contraires, les silences lancinants de tous les disparus, dont l'absence était si douloureusement présente.
À tous ceux-là, à toutes ces vies brisées, à toutes ces existences amputées, nous devons mémoire.
Si pendant longtemps, il y a eu des pages blanches dans notre histoire collective, des blancs qui pour beaucoup étaient recouverts du voile noir et lourd de la souffrance, aujourd'hui la France se souvient.
Elle se souvient de ses fils envoyés dans les maquis algériens, de ceux qui sont tombés sans retour, de ceux qui en sont revenus marqués à jamais. Elle se souvient de ces Français d'Algérie arrachés à leurs racines, de ces Harkis abandonnés en dépit de l'immensité des sacrifices, de ces victimes civiles emportées par le souffle d'une bombe, le sifflement d'une balle ou l'ombre des disparitions.
Se souvenir, ce n'est pas seulement commémorer. C'est reconnaître toutes les douleurs, mais aussi toutes les grandeurs, sans en taire aucune. C'est faire justice à ceux qui ont été oubliés. C'est honorer les sacrifices consentis. C'est porter un regard lucide sur le passé, non pour l'alourdir de nos jugements, mais pour en tirer des leçons utiles à notre temps et nous grandir dans le courage de la vérité.
La mémoire n'est pas un fardeau, mais une lumière. Une lumière qui éclaire les générations présentes et à venir, pour que l'Histoire ne se répète pas, pour que la souffrance d'hier ne nourrisse pas les fractures d'aujourd'hui, pour que les sacrifices consentis nourrissent aussi un sentiment d'appartenance, sans lequel il n'y a pas de socle pour que s'épanouisse la démocratie.
Vive la République !
Vive la France !»



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