La Ville de Dijon a organisé une cérémonie, ce vendredi 5 janvier, pour honorer le résistant-déporté le jour de ses 100 ans. Le maire a salué «un homme qui, face à l'obscurité de l’oppression, a choisi de faire briller les lumières de la résistance».
Infatigable héraut de la liberté, Henri Mosson, résistant-déporté durant la Seconde Guerre mondiale, a reçu les insignes d'officier de la Légion d'honneur, ce vendredi 5 janvier 2024. Un beau cadeau d'anniversaire pour celui qui a fêté ses 100 ans ce même jour !
Organisée au palais des ducs de Bourgogne, la cérémonie a été présidée par François Rebsamen (PS, FP), maire de Dijon. Ont participé une cinquantaine de personnes dont plusieurs membres de la famille du récipiendaire – sur quatre générations – ainsi que des représentants de la Société des membres de la Légion d'honneur de la Côte-d'Or, de l'Office départemental des combattants et victimes de guerre et du rectorat de l'académie de Dijon.
Étaient présents également Benoît Bordat (FP), député de la Côte-d'Or, Viviane Vuillermot (LCOP), vice-présidente du conseil départemental de la Côte-d'Or, Thierry Falconnet (PS), maire de Chenôve, Jean-Michel Verpillot (sans étiquette), maire de Marsannay-la-Côte, ainsi que plusieurs élus dijonnais.
Un survivant de Natzweiler-Struthof
Déjà fait chevalier, Henri Mosson a été promu officier de l'ordre national de la Légion d'honneur à titre militaire par le décret du 10 novembre 2023.
Henri Mosson est un des deux derniers survivants arrivés au camp de concentration de Natzweiler-Struthof en 1943. Il est un membre actif de l'Amicale nationale française des déportés et familles de disparus de Natzweiler-Struthof et de ses kommandos, représentée ce jour par son président Jean-Luc Schwab.
François Rebsamen salue «un homme qui incarne les valeurs de persévérance»
«C'est l'histoire d'une vie», relève François Rebsamen en prenant la parole pour le discours d'hommage au récipiendaire. D'emblée, le maire de Dijon cite le message du préfet de la Côte-d'Or Franck Robine, excusé pour cet événement : «dites bien de ma part à Henri Mosson que je ne serais pas préfet s'il n'y avait pas eu des hommes comme ça».
«Nous sommes réunis pour rendre hommage à un homme qui incarne les valeurs de persévérance. Un homme qui, face à l'obscurité de l’oppression, a choisi de faire briller, à un moment de sa vie, les lumières de la résistance», souligne François Rebsamen.
De Natzweiler-Struthof à Dachau
À 19 ans, de janvier à mai 1943, Henri Mosson rejoint la Résistance dans le maquis Morane des Francs-tireurs et partisans (FTP), près de Turcey, dans l'Auxois.
Dénoncé, il est arrêté par la Gestapo, emprisonné et torturé à Dijon. D'abord condamné à mort, sa peine est commuée en déportation en novembre 1943 au camp de concentration de Natzweiler-Struthof avec l'objectif de faire disparaître toute trace de son existence, dans le cadre des décrets «Nacht und Nebel» («Nuit et brouillard»).
Malgré les épreuves de la détention, Henri Mosson survit. «Vous trouvez la force intérieure de ne pas abandonner l'espoir», souligne François Rebsamen.
Transféré aux camps annexes de Cochem et Erzingen puis au camp de concentration de Dachau, près de Munich, en mars 1945, il est libéré par l'armée américaine le 30 avril 1945.
Parcours après-guerre
«Votre vie dès lors est devenu un hymne à la liberté et à la résilience», signale François Rebsamen. «Vous avez consacré le reste de vos jours à la reconstitution, à la promotion des valeurs qui avaient été mises à mal pendant cette sombre période de l'histoire. (…) Vous avez utilisé votre voix pour témoigner de l'importance de la liberté, la dignité humaine et de la solidarité.»
Après plus d'un an de convalescence, Henri Mosson intègre l'entreprise familiale, une scierie à Boux-sous-Salmaise, en tant que comptable.
En 1957, un concours proposé aux victimes de guerre permet au Côte-d'Orien d'entrer comme commis principal au ministère des Anciens Combattants. Là, il accompagne les familles de déportés dans leurs démarches administratives.
L'heure de la retraite professionnelle survient en 1979. Arrive le temps d'exprimer pleinement sa passion pour la mécanique et le sport automobile. Henri Mosson intègre la commission technique de la Fédération internationale automobile et supervise la sécurité de compétitions mondiales. Il croise Jean-Marie Ballestre, Alain Prost ou encore Ayrton Senna.
Un engagement auprès des jeunes générations
Henri Mosson s'engage auprès du rectorat de l'académie de Dijon pour aller à la rencontre d'élèves, en Côte-d'Or mais aussi en Allemagne, pour témoigner de son vécu. Il participe également à l'organisation du Concours national de la Résistance et de la Déportation dans le département.
«La transmission de notre histoire aux jeunes générations est une nécessité pour que jamais le courage de femmes et d'hommes qui ont sacrifié leur vie au nom de la liberté et de la justice ne tombe dans les profondeurs de l'oubli», insiste gravement François Rebsamen.
En juin 2023, à 99 ans et demi, Henri Mosson accompagnait encore des élèves de l'école de gendarmerie au Mémorial Struthof pour partager son témoignage.
«Votre implication envers le devoir de mémoire vous a voulu une reconnaissance notoire», indique François Rebsamen. Henri Mosson est ainsi commandeur des Palmes académiques et citoyen d'honneur de la Ville de Dijon.
«N'oublions jamais le combat des résistants», déclare François Rebsamen
Le maire de Dijon salue «une reconnaissance méritée de votre contribution exceptionnelle à la préservation des valeurs fondamentales de l'humanité». «Vous êtes un témoignage vivant de ce qu'est la force intérieure, (…) prêt à affronter les défis les plus redoutables pour défendre ce qui lui semble juste.»
«N'oublions jamais le combat des résistants, n'oublions jamais notre histoire, n'oublions jamais ces hommes et ces femmes qui se sont battus, Français de préférence, qui ont préféré la voie de l'action en rejoignant le maquis, en portant des armes et des messages, en soutenant des évadés ou des persécutés aux valeurs qui nous sont chères de notre République et de la liberté», conclut François Rebsamen. «Même si vous ne le voulez pas, vous êtes un modèle pour nous tous, une source d'inspiration, nous vous en sommes profondément reconnaissants.»
«La liberté est difficile à acquérir et facile à perdre», relève Henri Mosson
«La liberté n'est chère qu'à ceux qui l'ont perdue» : Henri Mosson se souvient avoir écrit ces mots dans la prison dijonnaise de la Gestapo en 1943. Le récipiendaire rappelle que deux autres résistants-déportés participent au travail de mémoire en Côte-d'Or : Pierre Jobard, présent ce jour, et Marcel Suillerot, excusé.
«La liberté est difficile à acquérir et facile à perdre», tel est le message qu'Henri Mosson porte inlassablement auprès des jeunes générations.
En marge de la cérémonie, Bruno Dupuis, au nom de Franck Robine, remet également la médaille de la préfecture de la Côte-d'Or à Henri Mosson.
Finalement, tous les membres de la famille du récipiendaire posent autour de lui pour un souvenir avant de partager le verre de l'amitié.
Jean-Christophe Tardivon