> Vie locale > Vie locale
08/11/2022 03:49

DIJON : Karine Savina accueille Patrice Chateau chez Génération écologie

Ce vendredi 4 novembre, le transfuge des Verts est revenu sur les raisons qui l'ont poussé à rejoindre Génération écologie. La référente du parti a indiqué travailler au sein de la majorité municipale à «aller toujours plus vite dans la transition écologique».
Il y a des transferts qui se font en toute discrétion. Adhérent historique des Verts, le conseiller municipal de Dijon Patrice Chateau a rejoint Génération écologie dont Karine Savina est la référente en Côte-d'Or.

Ce vendredi 4 novembre 2022, Karine Savina et Patrice Chateau ont répondu aux questions d'Infos Dijon. Tous les deux abordent le passage de l'opposition à la majorité municipale dijonnaise, leurs dossiers portés en tant qu'élus et leur distance vis à vis de la NUPES.

Patrice Chateau travaille sur les économies d'énergie dès 2008


Patrice Chateau a adhéré aux Verts en 1997 pour accompagner la candidature de Jean-Jacques Bernard aux législatives dans la foulée de la dissolution de l'Assemblée nationale décidée par Jacques Chirac. «J'appréciais le positionnement des Verts sur l'écologie et leur ouverture d'esprit», se souvient-il.

Il crée l'association Plombières environnement en 2005 qui développe notamment une AMAP à Plombières-lès-Dijon. Il rejoint la liste de Jacques Fouillot (PS) et se retrouve adjoint à l'environnement. De 2008 à 2014, il conduit des actions d'économies d'énergie – «à cette époque, c'était assez novateur» – et s'intéresse à la qualité de l'alimentation dans la restauration scolaire.

Patrice Chateau déménage et rejoint la liste de François Rebsamen pour les municipales de 2014. De nouveau adjoint à l'environnement, il suit les dossiers d'espaces verts et développe la part des produits bio dans la restauration scolaire dijonnaise pour la porter de 11 à 35%, «à coût constant» grâce à la lutte contre le gaspillage alimentaire et optimisation des marchés publics.

«Le développement du sport féminin me tient particulièrement à cœur», signale Karine Savina


En réaction à la démission de Nicolas Hulot du gouvernement, en 2018, Karine Savina adhère a Génération écologie puis devient référente en Côte-d'Or. La fédération départementale compte une vingtaine d'adhérents. Positionné au centre-gauche, le parti a été fondé en 1990 notamment par Brice Lalonde, Jean-Louis Borloo et Corinne Lepage. Depuis 2018, Delphine Batho en est la coordinatrice nationale. Ex-socialiste, elle a été ministre de l'Écologie durant le quinquennat de François Hollande.

Ancienne sportive de haut niveau en athlétisme, Karine Savina a été présidente du Cercle Dijon Bourgogne, club ayant une équipe féminine engagée en première division de handball. «Le développement du sport féminin me tient particulièrement à cœur», signale-t-elle.

À Dijon, un trajet de l'opposition vers la majorité de François Rebsamen


Aux municipales 2020, Patrice Chateau et Karine Savina figurent sur la liste conduite par Stéphanie Modde (EELV). Une liste écologiste qui concurrence celle menée par le socialiste François Rebsamen. Au second tour, la liste reçoit 21,63% des suffrages et, en juin 2020, six élus entrent au conseil municipal, en siégeant dans l'opposition.

Aux départementales de 2021, Karine Savina se présente en binôme avec le socialiste Antoine Hoareau sur le canton Dijon 1. «J'ai vraiment compris que pour répondre aux besoins des Dijonnaises et des Dijonnais, il fallait que l'on ait une liste de rassemblement, (…) on répondait à des solutions et de gauche et écologistes», estime Karine Savina malgré la défaite à ce scrutin.

Parallèlement, aux régionales de 2021, au second tour, la socialiste Marie-Guite Dufay accueille sur sa liste des candidats du pôle écologiste dont l'adhérente de Génération écologie Aurore Lagneau.

«Il y avait eu une alliance qui a fonctionné», indique Patrice Chateau qui signale une «interdépendance» des dossiers au gré du mille-feuilles territoriale entre la commune et la Région.

En conséquence, à Dijon, trois élus quittent l'opposition et rejoignent la majorité de François Rebsamen en novembre 2021 : Patrice Chateau, Karine Savina et Fabien Robert (alors membre de l'Alliance écologiste indépendante, à présent l'Écologie au centre représentée au niveau national par Jean-Marc Governatori). Ils fondent alors le groupe l’Écologie pour vous (lire notre article).

«Il y avait bien des points communs entre son programme et le nôtre. Il fallait faire face à la réalité du changement climatique, de la crise sanitaire et du taux de participation aux élections extrêmement faible», justifie Patrice Chateau.

Aujourd'hui, Karine Savina est conseillère municipale ainsi que conseillère métropolitaine déléguée aux équipements sportifs et aux relations avec les clubs professionnels. Patrice Chateau est conseiller municipal délégué à la biodiversité et à l'alimentation ainsi que conseiller métropolitain.

Patrice Chateau a rejoint Génération écologie en 2022


Patrice Chateau, pourquoi avoir quitté Europe Écologie Les Verts ?

Patrice Chateau : «J'ai quitté Europe Écologie Les Verts parce que j'étais en désaccord avec les adhérents du groupe local de Dijon Métropole. Il y a eu un débat, il y a eu un vote et je n'étais pas d'accord avec le résultat de ce vote. Pour retrouver ma liberté, j'ai quitté le parti il y a un an.»

«Il y a eu un temps de réflexion de quelques mois. En 2022, j'ai rejoint Génération écologie.»

Pourtant, vous vous êtes tout de même rendu aux universités d'été des Verts ?

«Je me suis rendu à Grenoble mais je ne suis pas allé aux universités d'été des Verts. Je suis allé aux formations proposées aux élus par l'institut CEDIS [NDLR : Centre d'Écodéveloppement et d'Initiative Sociale] qui ont lieu du lundi au mercredi tandis que les universités d'été des Verts commencent le jeudi pour se terminer le samedi.»

«Il n'y avait pas que des Verts dans ces formations. Ce sont des formations de qualité. Je suis très attaché au droit des élus et même au devoir des élus de suivre des formations pour mettre à jour leurs connaissances dans l'exercice de leur mandat.»

«Un sentiment de liberté assorti d'une dose d'amertume»


Pour un militant de longue date, qu'est-ce que cela fait de devoir ainsi changer de parti ?

«C'est un sentiment de liberté assorti d'une dose d'amertume. (…) Grâce à ce parti, j'ai eu accès à la vie politique locale mais, en même temps, mes actions d'élu à Plombières-lès-Dijon et à Dijon ont été reconnues et ont participé à une forme de bonne réputation des Verts locaux donc je considère qu'on est quitte.»

«En quittant EELV, j'ai élargi mon analyse sur la situation politique locale et nationale. Du coup, ma vision de la vie politique s'est éclaircie.»

«Pendant 25 ans, j'ai été en relation avec des camarades, des collègues. Ces relations sont devenues plus distantes mais si elles sont restées courtoises sur la base du respect mutuel.»

«On peut se poser des questions sur le fonctionnement actuel d'Europe Écologie Les Verts»


Les nuances idéologiques sont-elles encore acceptées chez les Verts ?

«Pour les écologistes, les adhérents sont des personnes qui ont de fortes identités, de forts caractères. Il y a toujours des sensibilités différentes.»

«L'actualité aujourd'hui, c'est qu'il y a quelques mois, à une courte majorité, Yannick Jadot avait reconnu comme le candidat des écologistes aux élections présidentielles. Il se trouve que cette tendance s'est inversée et il semble que Sandrine Rousseau se complaise à attaquer Yannick Jadot et manifeste une sorte d'acharnement envers lui et qu'elle soit rejointe par un certain nombre de militants écologistes. (…) On peut se poser des questions sur le fonctionnement actuel d'Europe Écologie Les Verts. Tous les partis connaissent des périodes de tumultes.»

«J'avoue que, à titre personnel, en tant qu'élu local, je suis cela avec un petit peu de distance. Cela me préoccupe mais je me concentre plutôt sur ma mission d'élu et les dossiers qui me sont confiés ici à Dijon.»

Génération écologie Côte-d'Or ne rejoint pas la NUPES 21


Génération écologie faisait partie du pôle écologiste ayant soutenu Yannick Jadot à la présidentielle. Le pôle écologiste (EELV, GE, Génération.s, Nouveaux démocrates) a rejoint la NUPES. Allez-vous rejoindre la NUPES 21 ?

Karine Savina : «Très personnellement, je considère que la NUPES était une alliance de circonstance, constituée à la dernière minute pour avoir des députés écologistes [NDLR : ont été élus notamment Delphine Batho dans les Deux-Sèvres et Hubert Julien-Laferrière dans le Rhône] et, du coup, un contrepoids démocratique face à la tendance majoritaire néolibérale.»

«C'est donc un regroupement de députés qui a le mérite d'exister mais auquel je n'adhère pas au niveau local. Je ne les ai pas soutenus dans leur campagne et je l'assume complètement. Je ne vois pas l'intérêt de rejoindre la NUPES 21 si ce n'est d'ajouter la confusion auprès de nos électeurs.»

Quelles sont les principales différences entre les Verts et Génération écologie ?

«GE défend ardemment la laïcité et se veut être une écologie politique indépendante et donc une écologie intégrale, ce qui donc un peu différent d'EELV. Chez les Verts, il y a aussi parfois plusieurs courants, ce qui n'est absolument pas le cas chez GE. Nous avons une ligne claire, précise et notamment sur la ligne de la décroissance ou, dit autrement, la déconsommation.»

Chez Génération écologie, c'est «tout le monde derrière Delphine Batho» ?

«On a des référendums, on a des situations de votes. Ce n'est pas une direction autoritaire mais on est tous très convaincus de la ligne claire que défend Génération écologie.»

Karine Savina entend «aller toujours plus vite dans la transition écologique»


À Dijon, l'écologie politique est scindée entre majorité et opposition. N'est-il pas possible pour les militants de l'écologie de s'entendre autour du programme présenté par François Rebsamen aux électeurs en 2020 ?

«Je suis une jeune femme politique à Dijon. De mémoire, les écologistes ont toujours fait partie de la majorité depuis les trois derniers mandats de Monsieur Rebsamen. (…) Les écologistes ont aussi en qualité d'adjoints porté l'écologie au niveau de la majorité.»

«[Parmi les écologistes], il n'y a pas clairement de différences écologiques sur le plan local. Nous avions un programme avec nombreux points communs autour de nos valeurs écologistes. Une de nos différences est que nous voulons aller toujours plus vite dans la transition écologique.»

«C'est pourquoi, parce que l'on veut être aux manettes, avec notre groupe l’Écologie pour vous, nous avons décidé de rejoindre la majorité. On veut vraiment faire avancer les choses. Lorsque l'on est dans l'opposition, on est beaucoup dans la critique.»

Labellisation Match for green pour des événements sportifs écoresponsables


Qu'apporte Génération écologie à la majorité municipale dijonnaise ?

«La philosophie de Génération écologie est de rassembler les élus autour de l'écologie et du féminisme pour valoriser les besoins des Dijonnaises et des Dijonnais. (…) [Il s'agit d']une vision écoféministe plus pragmatique.»

«Dans ma délégation sports notamment, nous encourageons énormément les jeunes filles et les femmes à la pratique du sport.»

«Nous travaillons avec le dispositif Match for green sur le recyclage des équipements sportifs. (…) Ce sera labellisé et signé le 10 novembre. Si l'on peut avoir tous nos clubs sportifs, amateurs et pro, dans cette démarche d'ici 2030, je serai une élue satisfaite.»

Delphine Batho, «une des premières» à porter l'écoféminisme


Delphine Batho porte donc le sujet de l'écoféminisme ?

«C'était une des premières à porter ce sujet : le langage épicène, favoriser les femmes à des postes de direction de façon équitable, travailler sur la sphère féminine avec ses contraintes et ses obligations, traiter des sujets parfois tabous comme l'endométriose... Ça a été repris par Sandrine Rousseau.»

«C'est un sujet toujours basé sur des approches très objectives et scientifiques ; c'est une grosse différence chez GE : on s'appuie beaucoup sur des approches scientifiques.»

Renforcer la dynamique du label Écojardin


Sur quels dossiers particuliers travaillez-vous respectivement ?

Patrice Chateau : «Je travaille sur le développement du label Écojardin. C'est la garantie d'un entretien écologique de l'espace public végétalisé. (…) Aujourd'hui, on a 60% des surfaces d'espaces verts de la Ville qui sont labellisées.»

«J'ai l'intention de renforcer cette dynamique en l'étendant aux surfaces végétalisées qui ne sont pas propriétés de la Ville comme les hôpitaux ou la zone de captage des Gorgets.»

«Autre thématique : l'écopâturage. On s'est rendu compte que les animaux assuraient un entretien assez exemplaire des pelouses parce que leurs déjections régénèrent la flore. On l'a expérimenté sur les combes, au parc de la Colombière. On va pérenniser ce type d'entretien. Il est très favorable à la biodiversité et permet de réduire la consommation d’hydrocarbures.»

Karine Savina : «Auprès de Claire Tomaselli, j'ai en charge le dossier qui consiste à rendre l'environnement du sport plus écoresponsable au niveau de la Métropole. (…) Cela passe par la réutilisation d'équipements sportifs, par la mesure de l'empreinte carbone, par la réduction des déchets et aussi par la formation de référents écoresponsables sur chaque structure sportive.»

«On travaille à mettre en place des critères de priorisation en faveur de ces nouvelles dispositions, ce qui sera très nouveau par rapport au mandat précédent.»

«J'ai également à cœur de favoriser le développement du sport féminin et de son équité au sein de la Métropole.»

Est-ce la fin des pelouses chauffées au stade Gaston Gérard ?

«C'est tout le sujet de la priorisation. Tout ne se fait pas en un jour. Effectivement, on devra aborder de façon plus écoresponsable certaines pratiques sportives. On verra comment on le traitera.»

«On est très bien accueilli au sein de la majorité»


Comment voyez-vous le rapprochement effectué par François Rebsamen auprès d'Emmanuel Macron ?

Karine Savina : «Libre à lui. (…) Si j'ai bien compris la volonté de François Rebsamen, (…) avec le nouveau mouvement qu'il met en place il est en train de restructurer le centre-gauche qui n'est plus audible au niveau national.»

«Aujourd'hui, au niveau national, nous avons le choix entre la NUPES, l'extrême-gauche, un extrême-centre porté par Emmanuel Macron, et une extrême-droite. Ce choix ne me satisfait pas aujourd'hui, à date.»

«Clairement, je reste une écologiste indépendante, (…) Je suis bien chez Génération écologie. Le groupe l’Écologie pour vous au sein de la majorité est libre de s'exprimer, on est très bien accueilli, on fait avancer des sujets.»

«On fait tous de la décroissance en déconsommant»


À la primaire, Delphine Batho se disait favorable à la «décroissance», une notion critiquée notamment par François Rebsamen. Vous retenez plutôt le vocable de «déconsommation». Quelle est votre vision ?

Karine Savina : «J'assimile décroissance à déconsommation. (…) La décroissance est très vivement critiquée ; elle est, en général, mal expliquée et elle n'a pas une bonne publicité.»

«On fait tous de la décroissance en déconsommant. En allant sur des sites de deuxième main, en allant à la recyclerie... on touche à la décroissance. La décroissance, pour moi, c'est d'abord un fait économique avant d'être une idéologie. Si on regarde le taux de croissance du PIB mondial sur les 70 dernières années, on voit bien que la tendance est à la baisse [NDLR : selon la Banque mondiale, l'équivalent mondial du PIB est tendancielle à la hausse depuis les années 1960, idem rapporté au nombre d'habitants ; en revanche, la variation de croissance annuelle est tendanciellement en faible baisse].»

«Ce qui en cause, clairement, c'est la diminution naturelle de nos ressources. Plus on produit, plus on use de ressources et donc moins on produira demain. Nos ressources ne sont pas illimitées. Il faut être très attentif à ça. On ne peut pas recycler indéfiniment.»

«L'idée de la décroissance en matière politique est d'anticiper ce phénomène et de l'accompagner au mieux vis à vis de nos concitoyennes et concitoyens et au niveau de nos entreprises afin qu'ils n'en souffrent pas trop. Cela passe par la rénovation des bâtiments, la réutilisation des équipements sportifs, la diminution des déchets, la lutte contre l'obsolescence des appareils, contre le gâchis alimentaires, [pour] l'encadrement de la publicité...»

Patrice Chateau : «La notion de produit intérieur brut est dépassée. Ce n'est plus représentatif. Il faut trouver un système d'évaluation différent. Le terme décroissance n'est pas représentatif de notre pensée politique. C'est clivant. Il faut dépasser ce terme.»

«Nous favorisons la voie démocratique et donc la non-violence»


Après avoir dénoncé la violence - «une voie sans issue» - Delphine Batho considère que le ministère de l'Intérieur doit «apprendre à garder son sang-froid» et refuse la caractérisation d'«écoterrorisme» à propos de l'attaque de gendarmes mobiles par des activistes cagoulés et armés à Sainte-Soline. Qu'est-ce que vous inspire cette tentation de la violence dans les actions écologistes et la gestion des événements par le gouvernement ?

Patrice Chateau : «Il faut de la retenue et du professionnalisme de la part des forces de l'ordre dans la gestion d'événements. (…) Il faut parfois regarder comment les polices d'autres pays européens arrivent à gérer les mêmes types  de situation avec plus de doigté et un résultat plus apaisant pour tout le monde.»

«Je perçois une forme de panique de la part des jeunes générations qui voient les scénarios les plus pessimistes en matière de dérèglement climatique se concrétiser.»

Karine Savina : «Il y a assez de désordre et de violence dans ce pays pour rajouter de l'huile sur le feu, ce n'est absolument pas nécessaire. Au sein du groupe l’Écologie pour vous, nous portons une écologie politique destinée à gouverner, qui répond aux besoins du plus grand nombre. Libre à chacun de qualifier les actions des personnes qui sont cagoulées et anonymes.»

«Chez GE, nous favorisons à ce titre la voie démocratique et donc, par conséquent, la non-violence et le recours à un référendum local pour apaiser la situation quand il y a des situations de tension. On prône vraiment la non-violence et une démocratie participative notamment autour des référendums locaux.»

Jean-Christophe Tardivon


Karine Savina, référente de Génération écologie en Côte-d'Or, et Patrice Chateau, nouvel adhérent