
«C'est un budget de cohésion, de lien social et aussi de transition écologique», a revendiqué la maire de Dijon, ce lundi 27 janvier. Les propos des intervenants de la droite et du centre ont pris des accents de primaire avant la campagne des municipales.

Dans la droite ligne du débat d'orientations budgétaires (
lire notre article), les élus de la Ville de Dijon ont adopté le budget primitif de l'année 2025, ce lundi 27 janvier 2025, à Dijon, le dernier budget en année pleine de la mandature en cours.
Autour de Nathalie Koenders (PS), maire de Dijon, la majorité municipale a défendu un budget «solide et solidaire». Selon les orientations politiques, les différentes oppositions ont fustigé un «budget insincère» ou déploré qu'il ne s'agisse pas d'un «budget vert».
Une partie du budget municipal est suspendue au sort du PLF 2025
Après une minute de silence en mémoire des victimes de l'Holocauste, ce jour de commémoration de la libération du centre d'extermination d'Auschwitz par l'Armée rouge en 1945 (
lire notre article), la session débute effectivement. Le premier rapport concerne le budget primitif 2025.
«Le budget 2025 est un budget solide et solidaire, un budget d'action qui sera présent dans tous les quartiers de la ville et dans tous les domaines», déclare Nathalie Koenders pour introduire les débats, «c'est un budget de cohésion, de lien social et aussi de transition écologique».
En raison d'un «contexte national incertain», la maire de Dijon se félicite que le ministre François Rebsamen ait soutenu la démarche des sénateurs de réduire la contribution des collectivités au «redressement des comptes publics», celle-ci passant dans la nouvelle mouture du projet de loi de finances pour 2025 de 5 à 2,2 milliards d'euros. Si ce texte se trouve adopté, l'effort de 4,1 millions d'euros demandé dans la version de Michel Barnier ne sera plus qu'un souvenir.
«Il faut surtout qu'il n'y ait pas de censure à l'occasion de ce vote, je rencontre beaucoup d'habitantes, d'habitants, d'entreprises, tout le monde veut de la stabilité pour cette année», commente la socialiste.
«La maîtrise de l'endettement continue d'être une priorité», déclare Nathalie Koenders
«Assurant de la «situation financière solide de la collectivité», la maire évalue les dépenses de fonctionnement en hausse de 5,53% à ce stade tout en soulignant que «derrière ces dépenses de fonctionnement, ce sont des agents du service public». À ce titre, le «centième agent» de la police municipale devrait être recruté dans le courant de l'année.
«Pour la neuvième année consécutive, nous n'augmenteront pas les taux d'imposition», martèle la première édile. En revanche, les bases de la taxe foncière augmenteront de 1,7% ainsi que l'ont voté les parlementaires pour s'aligner sur l'inflation attendue en 2025 et garantir des ressources en ligne aux collectivités.
L'investissement s'inscrit toutefois en baisse à 57,3 millions d'euros. «60% des marchés publics sont attribuées à des entreprises locales», souligne l'oratrice. «Nous investirons pour rénover notre patrimoine, pour toujours progresser sur le chemin de la transition écologique, pour améliorer nos services publics et la qualité de vie des Dijonnais.»
«La maîtrise de l'endettement continue d'être une priorité», poursuit-elle avant de revendiquer «un budget responsable et ambitieux qui nous permet la poursuite de la mise en œuvre du programme municipal».
«Notre gestion et nos effort ont payé», assure François Deseille
L'adjoint chargé des finances François Deseille (Modem) débute son intervention en louant «la sagesse et la modération» du Premier ministre François Bayrou, également président du Mouvement démocrate, qui «a bien entendu les collectivités locales». «Les premières annonces vont dans la bonne direction.»
Le centriste liste les six priorités de la municipalité concernant le développement durable, la cohésion sociale, l'attractivité, la modernisation de la gestion de l'espace public, la qualité de vie des habitants et la tranquillité publique.
En dehors des indications déjà avancées par la maire de Dijon en matière de fonctionnement, l'adjoint aux finances signale que les dépenses de personnel sont attendues en augmentation de 3,4% à ce jour (ou 1,60% sans les mesures du gouvernement de Michel Barnier).
Parmi les recettes de fonctionnement, les produits des services publics devraient bondit de 6,32% tandis que les impôts et taxes sont estimés en hausse de 1,77%.
La dotation globale de fonctionnement, attribuée par l’État, est attendue stable à hauteur de 26,96 millions d'euros.
Si la dette a atteint un plancher en 2024, l'investissement semble avoir atteint un plafond. François Deseille relativise la baisse annoncée en 2025, les crédits d'investissement passant de 61,95 à 57,3 millions d'euros, en rappelant que la moyenne annuelle des crédits d'investissement de la mandature avoisinait 33 millions d'euros.
Fin 2024, la dette ressortait à hauteur de 100,5 millions d'euros. Un emprunt d'équilibre est envisagé en 2025 avec un niveau maximum de 39,5 millions d'euros tandis que l'exécutif concède « le retour du recours à l'emprunt à compter de 2025, mais de manière modérée, soutenable et orientée autant que possible vers les investissements essentiels à réaliser en termes de transition écologique, de préservation/amélioration de l'avenir de la jeunesse dijonnaise, ou encore de sauvegarde et de valorisation du riche patrimoine historique de la Ville ». La capacité de désendettement est attendue « inférieure à 5 années ».
«Nous avons atteint le niveau de dette d'avant 1989», se félicite le centriste, «notre gestion et nos effort ont payé». «Nos excédents budgétaires sont maintenant terminés.»
Selon Axel Sibert, 32 millions d'euros ont été «prélevés sur les contribuables sans être utilisés pour le service public»
Alors qu'une polémique avait surgi lors du débat d'orientations budgétaires sur la pertinence d'une baisse de la part municipale de la taxe foncière, l'élu indépendant Axel Sibert (LR) prend la parole pour assurer que «la situation aurait été la même qu'aujourd'hui» au prix d'un «balayage des dépenses de fonctionnement».
«Votre municipalité accumule les excédents budgétaires depuis le début du mandat, excédents qui ont été dispersés dans des lignes budgétaires non affectées à des opérations», argumente l'opposant en se référant au dernier compte administratif de la collectivité. «Au dernier, à la ligne 1068, ligne excédent de fonctionnement capitalisé, nous constatons un montant de plus de 32 millions d'euro. Un montant prélevé sur les contribuables sans être utilisé pour le service public.»
En réponse, la maire de Dijon renvoie «aux agents du service public qui s'investissent au quotidien, (…) faudra nous dire où est-ce qu'on fait les coupes».
«Vous faites financer toutes les études avant les élections», peste Axel Sibert
«Ce projet de budget 2025, c'est un budget de campagne», cingle Axel Sibert, «un budget aménagé pour servir votre calendrier». «Beaucoup de projets vont s'achever en 2025, comme l'aménagement du port du canal, et jusqu'au premier trimestre 2026, comme la Maison des habitants du quartier Arsenal. Comme les chantiers sont, en général, peu appréciés en temps électoral, vous retardez tous les grands projets nécessaires à l'attractivité de notre ville. À la limite, ce la ne me gêne pas, je préfère que ces grands projets soient tranchés par les Dijonnais. Projet contre projet. Ce qui est plus gênant, c'est que vous retenez les coups de pioche mais vous faites financer toutes les études avant les élections : parc des expositions, patinoire Trimolet, réseau de transports en commun... (…) C'est une manœuvre électoraliste !»
«Les élus de la droite et du centre, les membres du Printemps dijonnais, autour de François-Xavier Dugourd, travaillent sérieusement à une alternative pour Dijon», glisse l'opposant en citant un Dijonnais qui n'est ni conseiller municipal ni même candidat déclaré pour être en tête d'une liste en vue de l'élection municipale de 2026 (
lire notre article).
Le retour de bâton ne se fait pas attendre : «aujourd'hui, je ne sais pas qui de nous deux est plus en campagne, j'ai plutôt l'impression que c'est vous qui venez de lancer votre campagne que moi qui continue à appliquer le programme pour lequel nous avons été élus en 2020», raille Nathalie Koenders. «Vous devriez prendre des cours», réagit François Deseille, sans argumenter pour autant.
Emmanuel Bichot anticipe «un budget insincère» pour 2025
Président du groupe politique Agir pour Dijon, Emmanuel Bichot (LR, AD) débute son intervention en regrettant que «les investissements indispensables et urgents soient reportés à plus tard» : parc des expositions, église Notre-Dame, écoles amiantées...
L'opposant voit là une «dette grise» et un usage pour «les réserves importantes accumulées depuis des années» en rappelant que l'excédent budgétaire de 2023 était de 30,4 millions d'euros.
Notant que l'exécutif prévoit un emprunt d'équilibre en se réservant la possibilité de ne pas le consommer, Emmanuel Bichot anticipe «un budget insincère» pour 2025.
«La bétonisation de Dijon se poursuit dans tous les quartiers», enchaîne Emmanuel Bichot
Concernant la police municipale et la promesse de la majorité d'atteindre cent agents, l'orateur note que le budget affiche «89 agents en équivalents temps plein alors que 101 postes budgétaires sont ouverts».
«La bétonisation de Dijon se poursuit dans tous les quartiers», enchaîne Emmanuel Bichot qui demande à suspendre la dernière tranche immobilière de la Cité de la gastronomie, le projet Venise II ainsi que la fin du quai des Carrières blanches.
L'élu conservateur relève que Dijon figure «dans le haut du tableau» en matière de taxe foncière. «Depuis 2000, vous avez augmenté le taux de la taxe foncière de 26%. (…) Nous souhaiterions que vous corrigiez cette augmentation.»
Selon Emmanuel Bichot, revenir sur l'augmentation de 5% survenue en 2016 coûterait aujourd'hui 6 millions d'euros à la collectivité, un montant qui pourrait être compensé par «des économies sur le fonctionnement».
«C'est ''Peur sur la ville''», ironise Nathalie Koenders, «arrêtez de faire peur aux gens». «Pour le logement, je rappelle que Dijon est une ville attractive, rayonnante et qu'il faut continuer à construire des logements parce qu'on a beaucoup de demandes.»
Pour sa part, François Deseille calcule que compenser à la baisse l'augmentation des bases physiques de taxe foncière amputerait les finances de la collectivité de 16 millions d'euros en 2025.
Henri-Bénigne de Vregille pointe que le fonctionnement a servi à «financer à la fois des investissements et le désendettement»
Au nom du groupe Dijon autrement, Henri-Bénigne de Vregille (HOR) pointe un «essoufflement du modèle financier» sur lequel s'appuie l'exécutif consistant à «constituer une épargne brute très importante – la différence entre recettes et dépenses de fonctionnement – afin de financer à la fois des investissements et le désendettement de notre collectivité».
«Les dépenses de fonctionnement finissent par repartir à la hausse à force d'avoir été trop contraintes», analyse l'opposant qui s'étonne sur la «priorisation» des investissements par l'exécutif. «Un rabot excessif sur le fonctionnement essentiel se paie, à l'avenir, en investissement. C'est ce qu'on appelle un cerce vicieux.»
Et d'appeler à «réorienter les dépenses de fonctionnement vers des objectifs clairs et fondamentaux de l'action locale pour améliorer le cadre de vie des Dijonnais au-delà du centre-ville», à «renforcer [la] police municipale» et à «prioriser la lutte contre le trafic de stupéfiants, aux côtés des services de l’État, et décourager la consommation».
Un parfum de primaire avant l'élection municipale
Déclinant le thème de l'«essoufflement» au sujet de l'investissement, l'élu de centre-droit regrette «le report sine die de la phase II des travaux du Grand Théâtre» ou encore «le manque de transparence entourant le projet considérable de rénovation de parc des expositions».
«Nous lancerons un rattrapage sur [des] projets inéluctables», glisse Henri-Bénigne de Vregille dont le propos prend, lui aussi, des accents de campagne électorale.
Ce qui fait dire à Nathalie Koenders, à l'adresse des opposants se revendiquant de droite et du centre : «j'ai vraiment l'impression qu'on est en campagne municipale entre vous ! (…) Aujourd'hui, j'ai juste eu des leçons où on dépense trop mais, par contre, on ne fait pas assez. Un budget, ça ne se construit pas comme ça !»
Concernant le désendettement, la responsable de l'exécutif renvoie à «la gestion active du patrimoine de la Ville de Dijon» et à «la maîtrise des dépenses de fonctionnement».
En matière de sécurité, la maire de Dijon assure «faire en sorte que des jeunes ne basculent pas dans la délinquance, ne consomment pas».
Olivier Muller revendique «un budget vert»
Dans un autre style d'opposition, Olivier Muller (LE), président du groupe Écologistes et citoyens, intervient principalement au sujet de la situation nationale.
En substance, l'écologiste met en avant son «insatisfaction» à la lecture du projet de loi de finances pour 2025 en cours d'examen par les parlementaires, considérant que le gouvernement de François Bayrou prévoit de «sacrifier l'écologie», cela «au profit d'une cure d'austérité sans précédent».
Revenant au sujet de la session, Olivier Muller estime que «les priorités pour le climat et la biodiversité affichées manquent d'ambition» en vue de la «nécessaire adaptation au changement climatique». Et de demander «un budget vert» avant d'annoncer que son groupe s'abstient.
«Pour la transition écologique, on en fait déjà beaucoup», rétorque Nathalie Koenders. «L'ambition éducative, c'est 75 millions sur 10 ans avec beaucoup d'actions sur la protection énergétique des bâtiments», ajoute François Deseille.
Karine Huon-Savina relève que «55% des investissements du budget primitif 2025» concernent le développement durable
Dans les rangs de la majorité, Stéphane Chevalier (HOR), président du groupe Horizons et indépendants, salue «la prudence, la solidité et la responsabilité» de l'exécutif.
Au nom du groupe l’Écologie pour vous, Karine Huon-Savina (GE) rappelle «[son] soutien sans réserve à une politique municipale solidaire, inclusive et résolument tournée vers l'avenir de Dijon en mettant un accent particulier sur la transition écologique et l'investissement local». L'écologiste relève que «55% des investissements du budget primitif 2025» concernent le développement durable.
Co-président du groupe socialiste, radical, citoyen et apparentés, principal groupe de la majorité, Jean-Philippe Morel (PR) considère que «ce budget, dans un contexte national difficile est le reflet de votre volonté de faire de Dijon une ville à vivre pour toutes et tous, sans exclusive, une ville écologique qui s'adapte et qui lutte contre le réchauffement climatique, une ville attractive qui n'en finit pas de séduire au plan national et à l'international».
Adoption du budget primitif 2025
«Avec ma majorité, on avance pour le bien être des Dijonnaises et des Dijonnais», synthétise Nathalie Koenders.
Au final, malgré 7 voix contre et 3 abstentions, le budget primitif pour 2025 est adopté à une large majorité.
Jean-Christophe Tardivon
Les données du budget primitif 2025
(comparatif avec le budget primitif 2024)
280,97 millions d'euros (+3,61%)199,4 millions d'euros pour la section de dépenses de fonctionnement (+5,53%)
220,7 millions d'euros pour la section de recettes de fonctionnement (+2,42%)
81,57 millions d'euros pour la section de dépenses d'investissement (-0,80%)
60,27 millions d'euros pour la section de de recettes d'investissement (+8,22%)
21,9 millions d'euros d'épargne brute (-17,8%)
57,25 millions d'euros de crédits d'investissement (-7,6%) dont9,7 millions d'euros pour la petite enfance, l'éducation et la jeunesse
8,6 millions d'euros pour la culture
8,5 millions d'euros pour l'aménagement de l'espace public
8,4 millions d'euros pour la vie des quartiers
5,3 millions d'euros pour la stratégie environnementale sur le patrimoine communal
4 millions d'euros pour le patrimoine sportif
4 millions d'euros pour l'urbanisme
3 millions d'euros pour la tranquillité publique et la citoyenneté
1,5 millions d'euros pour l'attractivité, le commerce et l'artisanat













