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11/03/2021 19:54
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DIJON : Les élèves du lycée Hippolyte Fontaine dénoncent les violences faites aux femmes

Le lundi 8 mars, la rectrice de l’académie de Dijon a visité l’exposition «Non aux violences faites aux femmes» qui se tient au sein du lycée Hippolyte Fontaine et a échangé avec les élèves ayant conçu le projet ainsi qu’avec l’équipe pédagogique.
Dès les débuts de la crise sanitaire, le confinement du printemps 2020 a remis en évidence la problématique des violences faites aux femmes au sein même des couples. Le sujet a touché des élèves du lycée dijonnais Hippolyte Fontaine qui s’en sont emparés avec l’intention de détourner l’esthétique publicitaire pour sortir du cliché de la femme prostrée dans le coin d’une pièce sombre et ainsi faire réfléchir sur les apparences.

À l’occasion de la Journée internationale pour les droits des femmes, le lundi 8 mars 2021, Nathalie Albert Moretti, rectrice de l’académie de Dijon, est allée à la rencontre d’élèves ayant conçu le projet «Non aux violences faites aux femmes» puis a participé à une séance pédagogique avec des élèves élus du conseil académique de la vie lycéenne. La rectrice a été accueillie par le proviseur, Marc Jaillet, et la proviseure adjointe, Karine Cascan.


«C’est super important pour le monde de demain»


Le projet a été lancé durant l’hiver 2019 à l’initiative d’un élève qui a ensuite été soutenu par Julie Grellet, enseignante en lettres-histoire. Alors en CAP mécanique auto, Noberto Nelo a eu l’idée, à l’écoute de titres de rap, de plus en parler en classe et de faire quelque chose. Évoluant dans une classe de garçons, Noberto Nelo a pensé à associer au projet des filles d’une classe de seconde prothésiste dentaire. Six élèves en tout ont participé.

«On a directement été d’accord parce que c’est super important pour le monde de demain», indique Mariam Nassar, à présent élève en première prothésiste dentaire, en s’adressant à la rectrice ce lundi. «On est des jeunes, on n’a pas souvent l’occasion de dire quelque chose et ce lycée nous a aidés à parler de ce qui se passe. Même si on est jeune, on n’est pas innocent, on sait ce que se passe», insiste l’élève, se disant «très investie dans le projet».

«On l’a fait avec notre cœur»


Aliya Slama, maintenant élève en première prothésiste dentaire, explique que le projet a mené en trois jours en juin 2020 : brainstorming, définition du message et de l’esthétique, choix final des slogans puis réalisation des images avec le photographe Alexis Doré.

Un temps très court qui suscite l’admiration de la rectrice : «c’est assez remarquable, je suis assez bluffée par le message, par l’énergie, par la composition». Malgré le sujet sensible, la préparation a été fluide : «il n’y avait pas de gêne, c’était très naturel», signale Mariam Nassar. «On l’a fait avec notre cœur», abonde Aliya Slama.

Pour tenir ces délais, ces deux élèves ont-elles-mêmes posé pour certaines photographies en ayant recours à leur propre maquillage. Pour d’autres images, un modèle expérimenté a accepté de contribuer au projet. Les différents partenaires sont le Zonta club de Dijon, la menuiserie Suralu, l’imprimeur CIB et le rectorat de l’académie de Dijon.

Comme une campagne de communication


Les élèves et l’enseignante revendiquent une réalisation soignée d’affiches conçues comme une campagne de communication détournant les codes de la publicité. Les débats préparatoires ont ainsi largement concerné la représentation des femmes dans les médias et la publicité. Pour l’équipe, «le contraste entre l’esthétique des images et le message rend ce dernier encore plus fort».

Le vocable «ceci n’est pas…» a été proposé par le photographe en s’inspirant du fameux tableau du peintre surréaliste René Magritte, «La trahison des images», peint en 1928-1929, où apparaît le texte «ceci n’est pas une pipe». «Il y a l’idée des apparentes qui sont trompeuses», précise la professeure Julie Grellet, renvoyant ainsi aux différentes facettes que peut présenter une même personne souhaitant éviter que l’on apprenne qu’elle est victime de violences par conjoint.

Pour l’affiche «ceci n’est pas un coup d’œil dans le miroir», le reflet du miroir donne à voir une femme au visage tuméfié tandis que la personne apparaît sans traces visibles. Selon Aliya Slama, «ce qu’on voit n’est pas toujours la réalité des choses, on peut voir une personne très bien dans la rue, qui n’a aucun souci mais, en réalité, on ne sait pas ce qui se passe quand elle rentre chez elle».

Une séance pédagogique pour accompagner la lecture de l’exposition


Un livret pédagogique accompagne l’exposition que le rectorat pourrait faire circuler dans des lycées de l’académie de Dijon. Il reprend les principales statistiques nationales : selon le ministère de l’Intérieur, en 2019, 146 femmes ont été tuées par leur partenaire ou ex-partenaire, 41% d’entre elles étaient victimes de violences antérieures. Selon l’INSEE, le nombre de femmes âgées de 18 à 75 ans victimes de violences physiques ou sexuelles par conjoint ou ex-conjoint est estimé à 213.000 chaque année.

Imaginer le vécu derrière les images


Ce lundi, la délégation joue le jeu de la séance pédagogique proposée autour de l’exposition. Les traditionnels post-it sont distribués afin de composer un mur coloré avec les toutes premières impressions suscités par la découverte des affiches : «alerte, enfin, sensible, rage, tristesse, stéréotypes…»

Durant les échanges qui suivent, la rectrice laisse s’exprimer les élèves, prenant peu la parole. Nathalie Albert-Moretti évoque cependant «la rage et la colère» qui peuvent être ressenties à la découverte de certaines images ou encore «la tristesse infinie» qui émerge du regard du modèle pour «ceci n’est pas un coup d’œil» : «jusqu’à avoir presque les larmes aux yeux en imaginant ce qu’il y a derrière en termes de vécu, une fois que la porte du logement se referme et que les coups possiblement commencent à tomber».

À la suite de cette exposition, le groupe d’élèves souhaiterait que le projet puisse être décliné en 2021 ou en 2022 en une campagne d’affichage sur le mobilier urbain dijonnais pour un 25 novembre, Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes organisée partout dans le monde par les Nations-Unies.

Jean-Christophe Tardivon




























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