
L'activité du tribunal de commerce est «la conséquence d'une économie dégradée», comme l'a souligné Jérôme Prince, président de la juridiction, ce jeudi 30 janvier. Les procédures collectives en cours concernent 1.542 salariés.
Le tribunal de commerce de Dijon a effectué sa rentrée judiciaire, ce jeudi 30 janvier 2025, lors d'une audience dédiée au bilan d'activité de l'année passée et aux perspectives de l'année en cours.
Présidée par Jérôme Prince, la juridiction commerciale de la Côte-d'Or compte 28 juges consulaires, des chefs d'entreprise qui siègent de manière bénévole.
Le tribunal de commerce peut accompagner les entreprises connaissant des difficultés
La chambre du contentieux a vu sa durée moyenne de procédure diminuer, ainsi que la durée du délibéré. «Cela réduit ainsi l'incertitude pour les parties concernées», a souligné Jérôme Prince, «ces résultats sont le fruit d'une mobilisation collective». «L'avenir passera forcément par le renforcement de la médiation et de la conciliation.»
En matière de procédures amiables de prévention des difficultés des entreprises, le président du tribunal de commerce a regretté que de nombreux dirigeants soit «réticents» à saisir la juridiction afin de «trouver des solutions pour s'en sortir».
Jérôme Prince rêve d'une «formation obligatoire» – voire même d'un «permis» – avant de pouvoir créer une entreprise qui intégrerait la présentation des mesures d'accompagnement du tribunal de commerce en cas de difficultés.
Un niveau d'activité révélateur de la situation économique
Le président du tribunal de commerce a relevé «une explosion des liquidations judiciaires» traitées par la chambre des procédures collectives, cela pour la troisième année consécutive.
En 2024, le tribunal de commerce de Dijon a tenu 64 audiences de procédures collectives. «La juridiction commerciale fonctionne bien, à Dijon», a cependant remarqué le procureur de la République Olivier Caracotch.
Les ouvertures de procédure collective ont augmenté de plus de 60% en deux ans. 986 procédures collectives sont en cours actuellement, concernant 1.542 salariés.
Les redressements judiciaires ont, eux, quasiment triplés en deux ans. Les liquidations judiciaires ont doublé par rapport à la période d'avant-crise sanitaire. Il y en a eues 232 en 2024, concernant 166 salariés car impliquant principalement des microentreprises.
«Ce niveau d'activité [doit] nous inquiéter sur la situation économique du [ressort judiciaire]», a analysé Olivier Caracotch, «cette situation met forcément les acteurs judiciaires en tension».
Parmi les secteurs en grande difficulté dans un bassin allant de la Côte-d'Or jusqu'à Mâcon, Belfort et Nancy, on note le retail, l'e-commerce, l'hôtellerie-restauration, la construction ou encore la promotion immobilière.
«La trésorerie fond comme neige au soleil»
«Sans faire de catastrophisme», Jérôme Prince a constaté «une dégradation importante de l'ensemble des entreprises en chiffre d'affaires, réalisé ou prévisionnel». «La trésorerie fond comme neige au soleil. C'est la conséquence d'une économie dégradée et d'une croissance quasiment nulle en fin d'année.»
Néanmoins, le président du tribunal de commerce a partagé «un certain ras-le-bol des chefs d'entreprise quant à l'instabilité politique rendant à la visibilité à court, moyen et long termes nulle». «Les entreprises ont besoin de vision pour investir.»
Parallèlement, le juge consulaire note «une explosion de la création d'entreprises» dans la Cote-d'Or depuis 2019.
Les juges consulaires espèrent «quelques moyens pour pouvoir travailler correctement»
Le président du tribunal de commerce a conclu son propos en soulignant l'action bénévole des juges consulaires pour mieux regretter que l’État n'abonde pas le budget de fonctionnement de ce type de juridiction : «nous ne demandons pas grand chose, juste quelques moyens pour pouvoir travailler correctement et également une protection avec le statut de magistrat».
Ayant lui-même été victime d'une agression par un chef d'entreprise en janvier 2022, Jérôme Prince a finalement dénoncé «une violence de moins en moins contenue vis à vis de nos juges ainsi que l'accoutumance de l'ensemble de la société à cette violence» avant d'appeler à instaurer «une protection globale de l'institution judiciaire envers ses juges, qu'ils soient professionnels ou consulaires».
Jean-Christophe Tardivon








