
«On a besoin d'une droite, d'une gauche et d'un centre», a estimé le président des députés Modem, ce mercredi 23 avril, en évoquant également les sujets d'actualité, des discussions avec l'UDI à l'affaire Bétharram, en passant par les législatives à la proportionnelle.
Après Besançon et Nevers et avant la cinquième circonscription de la Saône-et-Loire, Marc Fesneau a fait étape à Dijon, ce mercredi 23 avril 2025, pour un temps d'échanges avec quelques invités dans un café. Le président du groupe Modem à l'Assemblée nationale et premier vice-président du parti de François Bayrou a passé en revue les sujets d'actualité.
Étaient présents notamment François Patriat (REN), sénateur de la Côte-d'Or et président du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants (RDPI), François Deseille, adjoint au maire de Dijon et président de la fédération de la Côte-d'Or du Modem, Dominique Grimpret, maire d'Ahuy, Arthur Billot, président des Jeunes Démmocrates de Côte-d'Or, et Laurent Baumann (REN), président du bureau départemental de Renaissance en Côte-d'Or.
Auparavant, Marc Fesneau a répondu aux questions des journalistes et abordé les élections municipales de 2026.
Marc Fesneau alerte sur «la montée des populismes»
«Je viens faire un tour de chauffe pour entendre ce que les uns et les autres ont à me dire sur les équations les municipales», déclare d'emblée Marc Fesneau, anticipant les questions sur les investitures, «les décisions viendront entre juin et l'automne».
Cependant, il confirme François Deseille comme chef de file du Modem pour préparer l'élection municipale à Dijon : «il est notre chef de file sans qu'on ait besoin de le dire».
Depuis l'élection de 2008, le Modem est notamment allié au Parti socialiste pour construire une majorité municipale, alors conduite par François Rebsamen (PS, FP), désormais par Nathalie Koenders (PS). Renaissance a rejoint la coalition en 2020.
Aujourd'hui encore, «les élections municipales sont des élections où il y a besoin de rassemblement», notamment en raison de «la montée des populismes , «aussi bien à l'extrême-gauche ou à l'extrême-droite». «On s'enrichit de nos différences dans une équipe municipale.»
«Tout est possible» pour le Modem à Dijon en 2026
«On a un gouvernement de gens qui viennent d'horizons singulièrement différents, c'est l'obligation du moment de se rassembler», insiste Marc Fesneau. Ça accrédite la stratégie de dépassement [du clivage droite-gauche].»
«Dijon a toujours été un laboratoire politique depuis 2008», enchaîne François Deseille en référence principalement aux sujets budgétaires, «[avec François Rebsamen], on a travaillé ensemble sur quelques idées programmatiques fortes».
Pour l'avenir de la coalition avec le PS, le centriste prend soin de ne pas s'avancer à ce stade : «là, on a des idées programmatiques fortes aussi, on verra si on les portera nous mêmes ou dans des conditions comme celles-ci, tout est possible». «On travaille sur un programme qui rassemble sur les valeurs.»
«On a beaucoup de sympathisants», glisse le président de la fédération départementale qui se félicite d'enregistrer des adhésions à chaque venue de figures nationales dans le territoire – comme, récemment, Jean-Noël Barrot (
lire notre article) – sans pour autant préciser le nombre d'adhérents. «On a beaucoup de maires sympathisants qui soutiennent François Bayrou.»
Marc Fesneau juge «assez naturel» de reparler à l'UDI
«On a une histoire tumultueuse et, en même temps, continue avec l'UDI», relève Marc Fesneau, «on chemine ensemble depuis 40 ans». «On avait principalement un motif de rupture, c'était [Nicolas] Sarkozy en 2007. (…) Notre histoire invite plutôt à essayer de se poser. C'est assez naturel de se reparler avec cet écosystème même si on a pu diverger sur des choix stratégiques. Sur les choix européens, sur les choix budgétaires on est très alignés.»
Alors que le chef de file de l'UDI a déjà tendu la main au Modem à Dijon (
lire notre article), François Deseille se montre moins enthousiaste que Marc Fesneau.
«Je les ai rencontrés», commente-t-il sobrement, «ils veulent rentrer dans un regroupement, j'aime bien les regroupements». «Le plus important, ce n'est pas de se regrouper, c'est de se regrouper autour d'un programme, sur des valeurs communes, sur des idées fortes. (…) Dijon est une ville centriste qui peut, des fois, être centre-gauche, centre-droit.»
Au-delà, celui qui est également élu métropolitain plaide pour une distinction entre maire de Dijon et président de la Métropole : «c'est de plus en plus ans l'air du temps». «Reviendra le débat sur la question du cumul [des mandats]», prédit Marc Fesneau.
«On a besoin d'une droite, d'une gauche et d'un centre»
Le premier vice-président du Modem n'est pas non plus hostile à des discussions avec Les Républicains ou le Parti socialiste : «le dépassement, ce n'est pas l'effacement».
«Un centre fort ne nécessite pas forcément la mort de la droite et la mort de la gauche», a-t-il développé, «on a besoin d'une droite, d'une gauche et d'un centre». «On essaie plutôt de construire des ponts avec les LR qui partagent un certain nombre de sujets : la construction européenne, la défense de la souveraineté, les principes de l'état de droit...»
La parité dans les petites communes : «nécessité fait loi»
Marc Fesneau se félicite de l'instauration d'une «petite nouveauté» : l'instauration du scrutin de liste et la parité dans les communes de moins de mille habitants, à la grande satisfaction d'Intercommunalités de France (
lire le communiqué).
«On aura des équipes où on désignera plus facilement le chef de file», commente le centriste. «Ça évite de faire du maire sortant un pigeon sur lequel on tire assez facilement. (…) Il suffit de faire une carte communale, vous sortiez les terrains de trois [personnes] et ils faisaient une liste contre vous.»
Concernant la parité, «cherchez vous trouverez», lance-t-il à l'adresse des élus qui contestent néanmoins la mesure, «ça va féminiser les conseils municipaux». «Nécessité fait loi.»
Marc Fesneau est favorable à la proportionnelle à l'échelle des départements lors des législatives
Sur les sujets démocratiques, le centriste est favorable à l'élection des députés à la proportionnelle plutôt qu'au scrutin uninominal majoritaire. Parmi toutes les nuances de proportionnelle, il exprime sa préférence pour «le modèle Mitterrand» tel que l'ancien président de la République l'avait porté pour les législatives de 1986 avec le département comme échelle d'élection.
«Sans doute que si nous avions la proportionnelle, nous aurions à peu près le même résultat à l'Assemblée mais sans doute nous pourrions construire des coalitions plus facilement parce que chacun aurait été élu sur ses propres convictions», commente Marc Fesneau à propos de la situation actuelle.
«Personne ne nous a proposé d'économies pendant 10 ans»
Faute de majorité à l'Assemblée nationale, à peine la loi de finances pour 2025 votée que le budget pour 2026 est déjà dans toutes les têtes.
«Il faudra que tout le monde se montre responsable», assène Marc Fesneau, «personne ne peut nier que nous avons une dette». «Personne ne nous a proposé d'économies pendant 10 ans.»
«Les seuls qui ont la retraite par capitalisation, en France, ce sont les fonctionnaires»
Le député du Loir-et-Cher lie le sujet des retraites à celui du budget : «dans tous les pays du monde, on a allongé [la durée de cotisation], on est le seul pays qui n'arrive pas à se le dire». «La retraite par capitalisation fait peur à tout le monde mais les seuls qui ont la retraite par capitalisation, en France, ce sont les fonctionnaires.»
«Il faut rouvrir complètement le débat», martèle Marc Fesneau, «le sujet retraite est un sujet de déséquilibre démographique».
En fonction de quoi, il appelle à se pencher sur l'âge de départ à la retraite, l'âge d'entrée dans la carrière, les conditions d'emploi des seniors et la durée de travail hebdomadaire.
«Un pays où on part plus tôt en retraite, on est aux 35 heures et on emploie aussi peu les seniors, ça ne peut pas faire autre chose que de la dette et du déficit», analyse-t-il. «Si à chaque fois qu'il manque 30 à 40 milliards d'euros, il suffit d'aller les chercher chez les riches, ça ne marche. (…) Par ailleurs, dans le pays qui a le taux d'imposition le plus élevé d'Europe.»
La «prudence» de Marc Fesneau sur la fin de vie
La loi sur la fin de vie a été divisée en deux textes portant respectivement sur les soins palliatifs et la façon de «mourir dans la dignité». Le Modem a annoncé respecté la liberté de conscience des parlementaires : «chacun vote comme il veut».
«Il y a vrai consensus sur les soins palliatifs», souligne Marc Fesneau, «la fin de vie pose des questions qui ne sont pas complètement anodines». «Je pense qu'il faut y aller avec prudence. (…) Même dans les pays qui ont été très loin, on ne va pas si loin que les gens le prétendent».
Affaire Bétharram : «Il va falloir écouter de Bayrou à Attal»
«Une commission d'enquête n'est pas un tribunal», souligne Marc Fesneau à propos de l'affaire Bétharram, «je vois bien l'opération politique». Le 20 février dernier, à l'initiative de Paul Vannier (LFI), la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale a créé une commission d'enquête parlementaire sur le contrôle par l'État des violences dans les établissements scolaires. L'audition de François Bayrou est prévue, le 14 mai prochain.
«Il va falloir écouter de Bayrou à Attal», prône le député du Loir-et-Cher, en référence aux différents ministres qui auraient pu à avoir à se pencher sur le sujet des violences physiques et sexuelles présumées au sein de l'Institution Notre-Dame de Bétharram. «Comment se fait-il que, pendant 30 ans, il y ait eu autant de non-dit ? (…) Ce n'était pas un sujet qu'on regardait. (…) On n'avait pas la même attention, ce qui est dommage.»
«C'est [François] Bayrou qui a fait la dernière circulaire disant qu'on ne pouvait pas recourir à la force physique pour exercer l'autorité, en 1994», rappelle Marc Fesneau, «l'interdiction de la fessée en privé, c'est nous, il y a trois ans». «J'espère que ça permettra d'ouvrir les yeux.»
Jean-Christophe Tardivon
Arthur Billot, président des Jeunes Démocrates de Côte-d'Or, François Deseille, adjoint au maire de Dijon et président de la fédération de la Côte-d'Or du Modem, Marc Fesneau, président du groupe des députés Modem et premier vice-président du Modem, et Dominique Grimpret, maire d'Ahuy (photographie JC Tardivon)