Un rassemblement pro-palestinien s'est déroulé, ce vendredi 10 novembre, au centre-ville de Dijon. «On rapproche de façon mensongère l'antisionisme de l'antisémitisme», ont déploré les participants.
Pour la quatrième fois depuis le 21 octobre dernier, les membres dijonnais du collectif «Pour une paix juste et durable entre Palestiniens et Israéliens» organisaient, ce vendredi 10 novembre 2023, un rassemblement afin d'exprimer leurs positions concernant le conflit entre Israël et le Hamas.
La manifestation statique s'est déroulée place François-Rude à la tombée de la nuit. Selon la police, une centaine de personnes ont participé, plus de 160 personnes selon les organisateurs.
Pas un mot pour les otages détenus par le Hamas
Plusieurs orateurs se succèderont durant 45 minutes pour partager leurs nuances sur la situation dramatique à Gaza, remontant souvent le fil du temps, jusqu'à la création de l’État d'Israël.
Durant toutes ces interventions, pas un seul orateur n'aura un mot pour la situation des otages détenus en captivité par les terroristes du Hamas alors qu'il a été confirmé qu'ils retiennent notamment des Français. Malgré l'affichage des organisateurs, cela fait de l'action un rassemblement pro-palestinien.
Un rassemblement très politique
Au son de la chanson «Jérusalem» du groupe HK et Les Saltimbanks, évoquant notamment une «terre sacrifiée», les premiers participants se regroupent, qui avec son vélo, qui avec la sono, qui avec des drapeaux.
Les fanions de syndicats – principalement la CGT – et de partis politiques – La France insoumise, le Parti communiste français, le Parti ouvrier indépendant - sont plus nombreux que les drapeaux palestiniens. Cependant, un oriflamme arc-en-ciel du Mouvement pour la paix surnage au-dessus des autres.
Du côté des personnalités politiques, Patricia Marc (LFI) est présente discrètement. En fin de manifestation, les élus municipaux dijonnais Nadjoua Belhadef (PS, FP) et Hamid El Hassouni (PS) viendront saluer des participants.
«Cessez-le-feu à Gaza !»
Premier à prendre la parole, le représentant de France-Palestine Solidarité choisit de lire la lettre de démission de Craig Mokhiber, directeur du bureau de New York du Haut-commissariat des Nations unies aux droits de l'Homme. Craig Mokhiber considère que la stratégie militaire de l'armée israélienne relèverait d'un «génocide» réalisé avec la «complicité» des gouvernements occidentaux et de médias occidentaux «aux ordres».
«Halte au massacre à Gaza !» fuse alors parmi l'assistance avant d'être transformé en «Halte au génocide à Gaza» par l'intervenant. «Interdisons les guerres !», scande également une participante avant que ne s'enchaînent des «Cessez-le-feu à Gaza !».
«La région ne doit plus être dirigée par un groupe ethnique»
La représentante de l'Union juive française pour la paix (UJFP) signale avoir ressenti «de la douleur et beaucoup de peine pour les familles qui ont été touchées en Israël (…) suite aux crimes du Hamas». Cependant, «face à ce qui se passe actuellement, nous sommes hallucinés par la barbarie, la sauvagerie, l'inhumanité d'Israël», poursuit-elle.
«Nous disons que les violences du 7 octobre ne sont pas nées le 7 octobre, elles sont nées en 1948 quand le peuple palestiniens a été dépossédé d'une grande partie de sa terre. Elles ont continué en 1967 quand l'occupation a aggravé le viol initial», déclare-elle.
«On rapproche de façon mensongère l'antisionisme de l'antisémitisme», critique-t-elle alors que le sénateur LR des Bouches-du-Rhône Stéphane Le Rudulier a déposé, le 10 octobre dernier, une proposition de loi visant à faire de l'antisionisme un délit en France.
«Une population juive s'est implantée dans la région du Proche-Orient, elle en fait désormais partie depuis des générations. Nous ne prônons pas une nouvelle guerre sanglante qui viserait à expulser les Juifs israéliens. Au contraire, nous voudrions aller vers une paix véritable. Pour cela, nous devons reconnaître l'origine du problème, à savoir la dépossession dont a été victime le peuple palestinien», expose la représentante de l'UJFP sous les applaudissements de l'assistance. «La région ne doit plus être dirigée par un groupe ethnique. (…) Nous luttons pour que toute cette terre devienne, d'une façon ou d'une autre, une terre judéo-arabe sur laquelle tous les habitants jouiraient des mêmes droits.»
«Nous sommes tous des antisionistes !», clament alors les participants en écho au discours, suivi de «Nous sommes tous des Palestiniens !».
«L’État d'Israël a eu la bénédiction de ses parrains occidentaux»
Le représentant du Mouvement de la Paix insiste sur les «plus de cent morts» parmi les personnels de l'ONU depuis la riposte de Tsahal dans la bande de Gaza et reprend le terrible recensement des victimes donné par le ministère de la Santé de Gaza, dirigé par le Hamas.
Lui aussi s'attarde sur «le processus qui dure depuis 75 ans qui a amené à ces horreurs du 7 octobre et qui amène ce qu'on voit aujourd'hui dans la bande de Gaza».
«L’État d'Israël a eu la bénédiction de ses parrains occidentaux, il a eu un permis de tuer dont on demande où sont placées les limites et il s'en sert largement», poursuit-il.
«Nous luttons contre tous les racismes, contre toutes les discriminations parce que nous savons où a mené, au siècle dernier, cette folie de l'antisémitisme avec les crimes qui ont été commis», prend-il soin d'ajouter. «Ils ont été commis en Europe et ce sont les Palestiniens qui paient la note en ce moment.»
Emmanuel Macron critiqué pour ne pas avoir abordé la colonisation
Le militant pacifiste critique le président de la République pour ne pas avoir revendiqué un «cessez-le-feu» et pour ne pas avoir abordé le sujet de l'«occupation» et de la «colonisation» lors de son déplacement au Proche-Orient, les 24 et 25 octobre dernier. «La honte !», fuse dans l'assistance.
«Les vies palestiniennes comptent, les vies israéliennes comptent aussi mais les vies palestiniennes, aujourd'hui, sont sous les bombes», conclut-il avant d'appeler «une solution politique» en revendiquant «fin de la colonisation, fin de l'occupation et respect du droit international» de la part de l’État d'Israël.
Un «Israël assassin !», fuse parmi les participants avant que la foule n'entonne «Enfants de Gaza, enfants de Palestine, c'est l'humanité qu'on assassine».
Le collectif 21 À bas la guerre met en exergue la «résistance historique depuis 1948» du peuple palestinien
Selon le représentant du collectif 21 À bas la guerre, «la riposte de l'armée israélienne à l'acte de guerre barbare du Hamas s'est transformée en vengeance brutale et aveugle confinant au génocide».
«Netanyahou et son gouvernement d'extrême-droite, appuyé inconditionnellement par les États-Unis, l'Union européenne et Macron, veulent faire payer au peuple palestinien sa résistance historique depuis 1948», poursuit-il. «Il faut mettre fin à se massacre !»
«Nous entendons pouvoir exprimer notre solidarité avec le peuple palestinien sans subir les barrières et les interdictions du gouvernement Macron-Darmanin et sans être taxé d'antisémitisme ou d'apologie du terrorisme», enchaîne-t-il.
Dans la foulée, le militant pacifiste appelle à «l'arrêt de la guerre en Ukraine» au travers d'un «cessez-le-feu» et de «négociations». «L'Europe sent le soufre au bénéfice des complexes militaro-industriels».
ATTAC 21 fustige le «blocus médiatique» opéré par Tsahal
Le représentant d'ATTAC 21 rappelle que «les massacres commis par le Hamas ont été bien documentés», permettant d'«entrevoir des vies brisées derrière les victimes fauchées par les armes le 7 octobre».
Un propos qui ne rend pourtant pas compte ni de l'ampleur de l'attaque ni de la stratégie terroriste du Hamas tant dans les exactions et tortures pratiquées que dans la communication qui les a accompagnées en direct.
Le militant anticapitaliste relaie le décompte de Reporters sans frontière portant à 41 le nombre de journalistes tués depuis la riposte de Tsahal, dont 36 reporters palestiniens.
«Les photos ne montrent que les corps enfermés dans des linceuls blancs, bien alignés mais ne disent rien des vies brisées des victimes, de leur nom, de leur âge, ni de la manière dont ils ont été assassinés», insiste-t-il pour critiquer la communication de Tsahal depuis le début du conflit vue comme un «blocus médiatique».
Lecture de témoignages de victimes palestiniennes
Une membre d'ATTAC 21 conclut par d'émouvants et terribles témoignages de Palestiniens, relayés depuis Gaza ou l’Égypte au travers des médias sociaux, évoquant les pertes de proches pouvant aller à des familles entières décimées lors des bombardements. «Netanyahou assassin !», fuse alors parmi les participants.
«On a besoin de pressions internationales pour dire aux belligérants, notamment au gouvernement israélien : ''ça suffit !''», résume le représentant de la FSU.
Prochain rendez-vous le 17 novembre
Le rassemblement se termine en annonçant les futurs rendez-vous comme une conférence de l'UJFP dans le cadre du festival Nuits d'orient 2023, le 27 novembre.
Le prochain rassemblement du collectif «Pour une paix juste et durable entre Palestiniens et Israéliens» est prévu à Quetigny sur la place centrale, le 17 novembre, à 18 heures. L'objectif du collectif étant de maintenir un rythme d'action hebdomadaire.
Jean-Christophe Tardivon