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02/04/2023 20:09

DIJON : Une «chaîne humaine» pour contester un projet immobilier au bord du Suzon

Une centaine de personnes se sont rassemblées, ce dimanche 2 avril, pour marquer leur opposition au projet immobilier «Venise II, les Rives du Suzon». «C'est toute la biodiversité qui est en danger», alerte le collectif Sauvons les berges du Suzon.
Une «chaîne humaine» entourant une parcelle arborée en pleine ville. Par cette symbolique, les manifestants souhaitaient exprimer, ce dimanche 2 avril 2023, leur attachement à la configuration actuelle du site bordant le Suzon et leur rejet du projet immobilier «Venise II».

Une centaine de personnes ont participé pacifiquement. Parmi les personnalités politiques, on retrouvait notamment Olivier Muller (EELV), conseiller municipal d'opposition, Dominique Guidoni-Stoltz (LFI) et Victorien Di Fraja (LFI).

Une ola pour le Suzon


Bravant une pluie plus hivernale que printanière, les manifestants constituent progressivement la chaîne humaine. Les slogans fusent : «Qu'est-ce qu'on veut ? Des oiseaux, pas des travaux ! Des arbres fruitiers, pas un chantier ! Des papillons, pas du béton !»


Les participants n'entourent pas complètement la parcelle – ils ne sont pas assez nombreux pour cela – et préfèrent mettre leurs pas dans les sentes existantes.

Une ola est lancée pour saluer l'action avant de se regrouper pour des échanges autour des tentes installées près du Suzon.

Jacques se souvient d'une inondation


Riveraine venue manifester, Geneviève se dit «vraiment concernée au premier plan». «J'espère que ça ne se fera pas», confie-t-elle, «on veut préserver de la nature».

Dijonnais habitant à deux kilomètres du site, Jacques se souvient d'avoir vu «de l'eau dans le pré, il y a une quinzaine d'années». «Ça me paraît être un endroit intéressant pour tous les gens qui habitent-là, c'est un lieu de verdure et d'aération. Il y a d'anciens jardins qui sont abandonnés. C'est un lieu de nature en ville dont on a besoin. (…) Il y a beaucoup de gens qui viennent se promener pour avoir un petit moment de silence.»

Jacques insiste sur le fait de «voir un endroit sauvage» : «la Ville fait des parcs, c'est très beau mais tout est construit mais je ne vois plus beaucoup de côté sauvage». «On a besoin de ça en ville pour être reconnecté avec la verdure, la terre.»

Un projet immobilier de 85 logements


Le site de trois hectares recouvre les parcelles situées entre la rue de Bruges, la rue d'Ahuy, l'avenue Fernand-Léger et le Suzon. Un tiers du site appartient à la Ville de Dijon.

Avec le projet Venise II, les Rives du Suzon, les promoteurs immobilier 4S Immo et groupe Édouard Denis prévoient la construction de 85 logements dont 48 maisons individuelles et 36 logements en immeubles collectifs avec trois étages au maximum.

Une manifestation pour «protéger la réserve urbaine de biodiversité du Suzon»


Il s'agit de «protéger la réserve urbaine de biodiversité du Suzon», explique Mathilde Mouchet qui s'exprime au nom du collectif Sauvons les berges du Suzon qui rassemble des riverains du site, Dijonnais et Fontenois.

Le collectif compterait «quelques dizaines» de membres actifs et «plusieurs centaines» de sympathisants. La pétition qui conteste le projet regroupe 2.800 signataires.

«Le maire de Dijon a accordé le permis de construire donc ça devient très concret, le terrain est vraiment en danger», poursuit la militante, «les arbres sont en danger et tous les animaux, les papillons qu'on trouve sur ce terrain».

«C'est toute la biodiversité qui est en danger», selon le collectif


«Le collectif s'oppose à l'abattage d'arbres puisque le permis de construire prévoit l'abattage de 80 arbres», pointe Mathilde Mouchet, sur 342 arbres recensés sur le site. «C'est toute la biodiversité qui est en danger, tout un ensemble faune et flore le long du Suzon.»

«Depuis des mois, la municipalité parle d'études et on a réalisé un décryptage», évoque la militante alors que des panneaux sont affichés sous une tente pour informer les participants à l'action du jour.

«On a à faire à une promesse bafouée», cingle la représentante du collectif en évoquant des prises de parole contradictoires du maire de Dijon au regard de la date de délivrance du permis de construire, le 23 janvier 2023. La première adjointe au maire est également ciblée.

Selon le collectif, le terrain où se situe la manifestation du jour appartient toujours à la Ville de Dijon : «la promesse de vente est conditionnée à l'obtention d'un permis de construire purgé de tout recours, ce qui signifie qu'actuellement le terrain n'est pas vendu».

La notion de «réserve urbaine de biodiversité»


Le collectif indique avoir recensé «58 espèces de papillons» dont «7 menacées en Bourgogne-Franche-Comté» et «66 espèces d'oiseaux qui nichent et se reproduisent sur ce terrain».

En fonction de quoi, le collectif défend la notion de «réserve urbaine de biodiversité» vue comme «un terrain sur lequel il n'y a aucune construction ou aucun ajout de construction par rapport à ce qu'il y avait avant, un terrain qui est laissé le plus naturel possible et qui vise vraiment à être un lieu de promenade et d'agrément pour les riverains, un îlot de fraîcheur au service du vivre ensemble».

Ne correspondant pas à une définition légale, la réserve urbaine de biodiversité du Suzon (RUBS) a fait l'objet d'un «décret citoyen» en novembre 2022.

La notion fait des émules puisque l'association Bien vivre dans le quartier Larrey a décidé d'une telle qualification pour les jardins à l'angle des rues Larrey et Marillier.

Les deux collectifs défendent cette nouvelle notion «au regard de l'effondrement de la biodiversité et du chaos climatique».

Une contestation sur le terrain de la justice administrative


Après un recours gracieux envoyé par le collectif, le 6 août 2022, les associations Les Amis de la Terre Côte-d’Or, France Nature Environnement Côte-d’Or, Forestiers du Monde et les Amis des Jardins de l’Engrenage ont a saisi le tribunal administratif de Dijon, le 9 décembre 2022, pour un recours en «excès de pouvoir» afin d'obtenir l'annulation de la délibération du conseil Municipal de Dijon du 27 juin dernier actant la vente du terrain municipal aux promoteurs.

Un recours du 27 janvier 2023 concerne également le préfet de la Côte-d'Or pour «non opposition» concernant sa décision du 27 septembre 2022 au regard du dossier présenté en août 2022 par les promoteurs au titre de la loi sur l'eau.

«Il y a des incohérences», juge Mathilde Mouchet, «en abattant les arbres, on va mettre en danger toutes les habitations du quartier». Le collectif estime notamment que l'abattage de neuf arbres dans le coude formé par le Suzon atténuera leur effet de protection de l'érosion des berges.

«On peut remettre en cause le plan de prévention des risques d'inondation au niveau de Dijon Métropole», poursuit la militante, «il classe ici la zone en aléas faibles sur l'inondation alors qu'entre des changements climatiques le changement qu'on voit se profiler en cas d'abattage des arbres, en réalité, on peut remonter au moins d'un cran sur les aléas du plan de prévention des risques d'inondation. Il y a beaucoup de points qui font que, normalement, le préfet aurait dû s'opposer.»

Les dates des audiences ne sont pas encore fixées.

Le permis de construire étant désormais accordé par la Ville de Dijon, le collectif le conteste par un recours gracieux puis une éventuelle nouvelle saisie de justice administrative pour «défaut de légalité externe» et «illégalité interne», respectivement faute d'études environnementales annexées et du fait de la prévision d'abattage d'arbres.

Le dossier est porté par Maître Bastien Poix. Une souscription est en cours pour financer les contentieux.

«Il va y avoir une diminution de la capacité d'absorption des crues», estime Frédéric Faverjon


«C'est comme une zone d'expansion des crues, (…) à mon avis, c'est la seule qui reste en ville sur la commune de Dijon», rebondit Frédéric Faverjon (EELV), ancien élu et actuel membre du conseil de développement de Dijon Métropole, présent sur le site.

«Ça permet, quand il y a de fortes eaux, d'avoir une espèce de bassin d'orage naturel, ça permet aux eaux surnuméraires de se mettre là et d'éviter d'avoir des crues en aval et, en même temps, ça entretient la végétation, ça fait une zone humide», analyse-t-il.

«Au plus proche du Suzon, des maisons sur pilotis donnent l’agréable sensation de vivre au fil de l’eau», proclame la plaquette du promoteur.

Des pilotis qui ne suffisent pas à convaincre Frédéric Faverjon : «il risque de ne pas y avoir autant de facilité pour la zone d'expansion des crues, ça va neutraliser toute une biodiversité naturelle puisqu'on va passer à un environnement anthropisé. Il faut savoir si le fait de mettre ces pilotis va permettre une aussi grande zone d'expansion que ce qu'il y a aujourd'hui naturellement ; sans doute, il va y avoir une diminution de la capacité d'absorption des crues sur ce site et qu'il va y avoir une répercussion sur les zones plus en aval de risques d'inondation».

«Le changement climatique prévoit une exacerbation des extrêmes», alerte l'écologiste, «même si la moyenne globale reste constante, on risque d'avoir des épisodes de sécheresse beaucoup plus importants et aussi des épisodes de fortes pluies beaucoup plus grandes. Donc, ça devrait exacerber les risques d'inondation».

L'arrêté inter-préfectoral définissant la stratégie locale de gestion du risque inondation du territoire à risque important sur le territoire de la Métropole de Dijon date du 1er mars 2017.

Frédéric Faverjon pointe «le refus d'écoute du président de la Métropole»


Au-delà, Frédéric Faverjon compare l'attitude du maire de Dijon François Rebsamen (PS, FP) face à ce dossier avec la démarche du président de la République dans le cadre de la réforme des retraites.

«Il est possible de faire une analogie entre le refus d'écoute du président de la République et le refus d'écoute du président de la Métropole», déclare l'écologiste. «Il y a eu d'abord un courrier, une demande d'entretien gracieux de la part de l'ensemble des associations de quartier de Dijon. À ma connaissance, il n'y a pas eu de rencontre avec le président de la Métropole qui a estimé qu'il avait le droit pour lui parce qu'il avait été élu donc il impose sa décision. (…) Comme il y a une intersyndicale qui est unie, qui est unanime pour demander le report de la réforme des retraites, il y a, à ma connaissance, toutes les associations de quartier qui, aujourd'hui, sur Dijon, demandent l'arrêt de ce projet.»

Jean-Christophe Tardivon











































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