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27/11/2024 20:14
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ENVIRONNEMENT : Selon le paysagiste Olivier Lesage, la nouvelle place Bossuet constitue une «petite révolution»

Les nouvelles plantations pourraient abaisser de plusieurs degrés la température de la place Bossuet en été. «Les arbres sont de véritables systèmes de climatisation», a signalé, ce mercredi 27 novembre, celui qui a conçu ce paysage urbain dijonnais.
À la demande de la Ville de Dijon, Olivier Lesage, gérant de l'atelier éponyme, a conçu le nouveau paysage urbain de l'axe Monge-Bossuet dont les travaux viennent de s'achever.

Lors de la plantation du dernier arbre par François Rebsamen (PS, FP), président de la Métropole de Dijon, et Nathalie Koenders (PS), maire de Dijon, ce mercredi 27 novembre 2024, le paysagiste a répondu aux questions d'Infos Dijon.

Au long de cette opération de rénovation, deux bureaux d'études ont également apporté leurs compétences concernant les réseaux enfouis : le cabinet Merlin et le cabinet Verdi. Les entreprises Roger Martin et Id Verde sont intervenues sur le chantier, respectivement pour les aspects de travaux publics et de végétalisation.


L'espace urbain limite le choix des arbres à planter


Comment avez-vous choisi les différentes essences d'arbres ?

«En fait, les arbres qu'on utilise sont assez contraints avec tout le système de technosol qu'on a mis en-dessous, avec la récupération de l'eau. Cela crée des sols qui sont peu homogènes, assez compliqués pour faire pousser des arbres, comme toute la ville d'une manière générale.»

«On a des listes d'espèces qui sont plutôt adaptés à ces conditions un peu difficiles et, thermiquement, un peu plus haute que ce qu'on a à la campagne. Donc, la question de l'arbre locale ou de l'essence endémique est toujours compliqué à gérer en ville. On essaye de le faire, mais c'est plutôt la question de savoir si la pépinière lointaine ou non pour qu'on arrête d'aller chercher des arbres trop loin en Europe.»

«Notre monde et notre climat évoluent. Les aires de répartition naturelles sont en train d'évoluées aussi. On peut planter des chênes verts, par exemple. Il y en a déjà à Dijon. C'est un arbre qui est vraiment méditerranéen. Cela veut dire que le gland qui va tomber au pied de pied du chêne va pouvoir germer en Méditerranée mais pas à Dijon parce qu'il va geler. Par contre, si on prend un arbre méditerranéen de pépinière et qu'on le plante, il va être capable de résister aux hivers une fois qu'il est adulte.»

«On peut faire ce genre d'arbitrages qui nous aide à avoir d'autres vertus par rapport au milieu urbain : le rafraîchissement des rues, ce qu'on appelle la lutte contre les îlots de chaleur.»

-8°C l'été par rapport à l'ancienne place Bossuet


En été, quel effet aura la nouvelle implantation sur la place ?

«C'est un effet combiné avec les matériaux. On est passé du matériau en enrobé, des sols qui étaient plutôt sombres, avec une forte capacité calorifique, qui restituaient la nuit la chaleur accumulée, à des matériaux comme le béton, le sol sablé, qui sont plus clairs, qui ont un meilleur albedo, il réfléchissent mieux la lumière.»

«Les arbres sont de véritables systèmes de climatisation. La photosynthèse, te crée un appel de sève, un cycle de l'eau à l'échelle du végétal, qui fait qu'on a de l'ombre et, en plus, un système d'aération propre à l'arbre.»

«C'est ce qui crée ce confort qu'on ressent simplement quand on est sous un arbre. Ce n'est pas juste son ombre, c'est aussi cet évapotranspiration qui va créer un climat sous son ombrage.»

«On a maintenant des logiciels qui nous permettent de faire des modèles. Je n'ai pas tout à fait fait le calcul sur cette place ici mais sur des espaces où on fait des aménagements de ce type, on peut avoir jusqu'à 8° d'écart.»

Quand tous les paramètres seront réunis, comme les arbres en plein feuillage, par rapport à l'ancien aménagement avec un revêtement de bitume noir, il pourrait y avoir l'été jusqu'à 8°C d'écart ?

«C'est ça.»

«On va avoir toute de suite le gain des matériaux et de l'ambiance créée sur la place mais l'ombre des arbres est, pour l'instant, peu développée. Ils vont prendre de l'envergure et mettre en route cette ''machine'' de plus en plus fortement.»

«Passer d'un paysage routier à un paysage arboré»


Ici se présente un paysage différent de celui de la place Darcy, par exemple, où sont installés des arbustes en pot en raison du parking souterrain.

«C'est une grande fierté de paysagiste. La base de mon métier, c'est de  transformer un paysage, comme ici : passer d'un paysage urbain un peu routier à une ambiance de paysage qui ne vas pas être de l'ordre de la forêt mais qui va être arboré.»

«L'autre donnée qui était importante aussi dans cette mutation du paysage de la place, c'était de tenir compte du contexte. Dijon est une belle ville. Il y a de beaux monuments. Il y a des perspectives dans les rues de Dijon qui donnent sur des hôtels particuliers, par exemple, ou sur des porches ou sur des toitures vernissées. C'est une ville qui a été travaillée architecturalement.»

«C'est notre substrat et il faut s'appuyer dessus. Il ne s'agit pas de juste planter des arbres et de perdre le paysage de Dijon. Au contraire, il s'agit de le compléter. On laisse ouvertes des fenêtres comme dans une forêt où vous avez une allée qui débouche sur le ciel ou une avenue qui débouche sur un château dans les parcs classiques. On a réfléchi à cette composition de l'espace urbain. Au-delà simplement de savoir si c'est de la matière végétale ou de la matière bâtie, il y a cette notion de composition qui est installée dans ce projet.»

«Cela fait beaucoup de paramètres parce que vous avez des réseaux en souterrain, vous avez les objectifs d'installer de l'eau, vous avez les perspectives et vous avez le choix des arbres finalement avec peu de place pour les installer.»

«Chacun à sa place, on a bien travaillé pour y arriver, créer cette ambiance et changer la place. Là, c'est une petite révolution. On est passé de zéro arbre sur le secteur à 78 arbres.»

«Dans les précédentes opérations, on était plutôt sur 7 arbres parce qu'on avait beaucoup de difficultés à les installer par rapport aux réseaux. Là, le choix a été fait de vraiment prendre cette direction de rafraîchir la ville, changer de paysage et créer des lieux plus agréables à la vie.»

Le nouvel aménagement attirera les oiseaux et les pollinisateurs


Quels animaux vont pouvoir voir les Dijonnais ici ?

«Pas de cerf, pas de sanglier ! Ils verront peut-être un peu plus d'oiseaux ! C'est ce peut amener ce type d'aménagement. Tout ce qui est moineaux et petits passereaux devraient revenir. On a des Faucons crécerelles qui nichent régulièrement au Parvis Saint-Jean.»

«Ils ne verront pas les écureuils qui sont déjà partis. Pour les écureuils, il faut une certaine continuité. Il faut que les boisements puissent faire des chemins. Les écureuils circulent de houpier en houpier. Cela va mettre beaucoup de temps à faire revenir des écureuils au centre-ville.»

«Il y a aussi les insectes, les pollinisateurs. Des essences horticoles comme les savonniers font de très bons miels urbains.»

Des fosses de Stockholm pour stocker l'eau tout en favorisant l'ancrage des racines


Que sont les fosses de Stockholm évoquées durant les discours officiels à propos de la gestion intégrée de l'eau ?

«Ce sont des fosses inventées à Stockholm parce qu'il y avait des problèmes de stockage d'eau. C'est un procédé assez complexe mais qu'on peut appeler génériquement un technosol. C'est à dire qu'il va rendre plusieurs services en même temps dont stocker l'eau.»

«Ce sont de gros cailloux compressés dans lesquels il va rester des vacuités, environ 30%. Cela fait comme une éponge, l'eau peut s'installer.»

«La deuxième chose va être de structurer de porter les sols, sinon, ici, on s'effondrerait.»

«La troisième chose, c'est qu'on la rendre les sols aimables pour les arbres. On va installer dans ces vacuités une terra preta. Cela nous vient des sociétés d'Amazonie. On sait que, sous la forêt amazonienne, les sol sont très pauvres. Pour cultiver, on débroussaille un petit cercle de boisement et on fabrique cette terra preta qui amende le sol. C'est à base de charbon et de compost. Tout ça améliore le sol.»

«Dans les fosses de Stockholm, on combien les lits de cailloux avec la terra preta. On va chercher du charbon de bois en poussière et du compost qu'on insère dans les vacuités. Ça ne prend pas trop de place par rapport à l'eau mais ça aimable le ce lit de cailloux pour les racines de l'arbre. Il va pouvoir s'ancrer. Dedans, on injecte les eaux de la chaussée, les eaux de certaines toitures environnantes.»

«C'est qu'une demande qui répond à des politiques publiques générales à valeurs environnementale qui s'intéressent au cycle de l'eau. L'idée de la gestion intégrée des eaux pluviales est une doctrine qui consiste à infiltrer l'eau au plus près de l'endroit où elle tombe. On peut le décliner de différentes manières. Ici, on infiltre ces fosses de Stockholm.»

«Les arbres vont évaporer cette eau. Le sol va en garder une partie, ce qui recharge les nappes phréatiques, ce qui a aussi l'intérêt de décharger, pendant les pluies fortes ou les orages, les cours d'eau et ainsi limiter les inondations.»

Moins de route pour plus de rue


Est-ce que la place sera plus agréable pour les habitants et les visiteurs ?

«C'est une des vertus de l'espace public. On a proposé des bancs, des espaces qui sont ouverts. On a vu que, même avant les arbres, les gens s'installaient. Il y avait de la concurrence sur les bancs.»

«C'est un des plus grands plaisirs. Ce n'est pas juste faire de l'environnement, c'est qu'on rende tout cela aimable et appropriable.»

«La contrepartie, c'est la place [réduite] de la voiture. On est moins sur la route, on est plus sur la rue. Cette rue, c'est un espace où on se sent chez soi.»

«C'est l'intérêt d'un espace public. C'est servir cette idée que la ville, on peut s'y arrêter, s'y poser, discuter, prendre le temps.»

Propos recueillis par
Jean-Christophe Tardivon

Le premier geste en tant que maire de Nathalie Koenders a été de planter un arbre



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