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16/10/2022 19:21
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FONCTION PUBLIQUE : L'héritage républicain de Fabien Sudry

«C'est dans les turbulences que l’État révèle sa première vocation de protéger les citoyens pour permettre la continuité de la vie de la nation et maintenir la cohésion sociale», a déclaré le préfet de la région Bourgogne-Franche-Comté lors de son discours de départ, ce vendredi 14 octobre, à Dijon.
Saint-Exupéry, Napoléon, Clémenceau, de Gaulle, Jules Romain, Jacques Brel... le préfet hors classe Fabien Sudry affectionne les citations pour illustrer ses propos en les condensant.

Lors d'un moment de convivialité, ce vendredi 14 octobre 2022, à l'Hôtel de Préfecture à Dijon, devant près d'une centaine de représentants d'institutions de la région, Fabien Sudry a livré un discours de près d'une heure, émaillé de citations, en guise de bilan de son action en Bourgogne-Franche-Comté ainsi que de sa carrière. Un héritage préfectoral et républicain légué à qui veut s'en saisir.


Désormais conseiller d’État, le préfet a terminé son parcours dans le corps préfectoral dans la même région où il a commencé. De profil Sciences Po-ENA (promotion Henri-François d'Aguesseau), Fabien Sudry connaît sa première affectation en tant que sous-préfet à Louhans, de 1987 à 1990. Il reviendra en Saône-et-Loire comme préfet de 2013 à 2015.

Une arrivée à Dijon en pleine crise sanitaire


Dix-huit déménagements plus tard, Fabien Sudry et son épouse s'installent à Dijon en août 2020. La fusion des régions est passée par là. Le préfet de la Côte-d'Or est également préfet de la région Bourgogne-Franche-Comté.

En dehors des affaires courantes, Fabien Sudry aura à gérer la crise sanitaire, le plan de relance ainsi que des questions de sécurité comme l'augmentation du nombre de policiers à Dijon avec la signature d'un contrat de sécurité intégrée sur fond de lutte contre les trafic des stupéfiants. Une «priorité absolue».

Présence de trois anciens ministres


Ce vendredi, dans l'entrée de l'hôtel Bouhier de Lantenay, trois anciens ministres ont pris place au premier rang : Jean-Baptiste Lemoyne (RE), sénateur de l'Yonne et notamment ancien ministre du Tourisme, François Patriat (RE), sénateur de la Côte-d'Or et notamment ancien ministre de l'Agriculture, François Rebsamen (PS, FP), maire de Dijon et ancien ministre du Travail.

Michel Neugnot (PS) représente la présidente du conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté, Marie-Guite Dufay, absente pour raison de santé. Martine Eap-Dupin (LCOP), représente le président du conseil départemental de la Côte-d'Or François Sauvadet, mobilisé à Agen pour les Assises des Départements de France.

Autour d'eux des parlementaires, des élus locaux, des préfets, des agents des services de l’État, des forces de sécurité intérieure et de sécurité civile, des universitaires, des magistrats...

La province, une famille nombreuse, le scoutisme...


Affichant un large sourire, son épouse Christine à ses côtés, Fabien Sudry s'élance pour un discours ponctué de moments d'émotion. Extraits.

«Il y a 35 ans que je sers l’État républicain avec passion dans les territoires de France. Je savais que cette belle aventure devait prendre fin un jour. Le moment est venu.Je vous remercie de prendre le temps de m'accompagner dans cette étape de mon parcours professionnel qui, pour ma femme et moi, est aussi un parcours de vie.»

«Le métier préfectoral est un métier qui est fait d'arrivées et de départs qui s'enchaînent à un rythme accéléré. Les arrivées sont pleines de promesses respectives et, pour les départs, les horizons se raccourcissent très vite. Même si la mobilité permet un renouvellement de l'action au service de l’État, c'est toujours un arrachement de quitter les lieux où l'on a vécu, de laisser de côté les dossiers sur lesquels on est tenté de s'impliquer, de quitter les partenaires avec qui des relations amicales se nouent. On ne s'habituent vraiment jamais. On laisse forcément une part de soi-même.»

«J'estime que j'ai eu beaucoup de chance de pouvoir exercer au fil de mes différents postes d'aussi belles responsabilités au service de mon pays. Mon engagement dans ce métier (…) est le résultat d'un cheminement en conscience, éclairé par l'exemple de grands aînés, de belles aventures, de belles rencontres.»

«Cette chance, c'est celle de l'éducation de mes parents qui m'ont appris, dans une ambiance stable, provinciale, le travail bien fait (…) et le sens de la solidarité car j'ai vécu dans une famille nombreuse. C'est aussi la petite musique de cette belle promesse scout : 'toute ma vie, je servirai, fidèle à mon pays, je le serai'. C'est la chance aussi d'avoir croisé un professeur de philo de terminale qui m'a conseillé de faire Sciences po alors que j'étais programmé pour Agro. À Sciences po, j'ai tout appris.»

«En terre bressanne, s'est enracinée mon envie de servir l’État»


«C'est aussi la chance d'avoir débuté le métier pas très loin d'ici, à Louhans, en terre bressanne, si authentique, où, très vite, s'est enracinée mon envie de servir l’État et, à travers lui, l'intérêt général.»

«Ma plus grande chance, c'est celle d'avoir rencontré ma femme [applaudissements]. (...) Je pense aussi à nos trois enfants qui sont le bonheur de notre vie et qui nous pardonnent de les avoir semés sur les routes de France au fil de notre parcours.»

«Dans mes missions de préfet, de sous-préfet, j'ai toujours revendiqué le mot de serviteur même si ce terme n'est plus très en vogue à l'heure des réseaux sociaux qui flattent les égos et les singularités.»

Un salarié sur deux a bénéficié de l'activité partielle durant la crise sanitaire


«Mon prédécesseur a eu sa part de difficultés les Gilets jaunes et la gestion de la première vague de l'épidémie. De mon côté, je suis arrivé à Dijon, juste avant la deuxième de la Covid. Nous en avons vécu depuis sept. Je pense d'ailleurs à ce stade à nos personnels soignants qui ont été admirables. Avec les masques, je n'ai, en réalité, découvert le visage de beaucoup de mes interlocuteurs que près d'un an après. Ça raccourcit encore le temps disponible. La visio est restée un mode courant des échanges.»

«La vaccination a début au début janvier 2021, à Dijon, pour prendre progressivement de l'ampleur. Ce fut une organisation totalement inédite qu'il a fallu mettre en place. Nous y sommes, je crois, parvenus avec, au final, un taux de couverture vaccinale supérieur aux pays comparables.»

«Dans le même temps, les services territoriaux de l’État ont démonté leur capacité à mettre en œuvre très rapidement sous l'autorité du gouvernement un dispositif de très grande ampleur à travers des mesures de soutien constamment enrichies du 'quoiqu'il en coûte'. Un salarié sur deux dans la région a été soutenu. Le volume global  des moyens sur la région Bourgogne-Franche-Comté a dépassé 4 milliards d'euros.»

«Le message d'un monde plus solidaire, plus démocratique et plus respectueux de l'environnement»


«Il y a eu cette guerre terrible en Ukraine, sur notre vieille Europe, qui a conduit à l'accueil de 1.300 réfugiés en Côte-d'Or, 6.500 sur la région Bourgogne-Franche-Comté. Une fois encore, les services territoriaux de l’État ont pris toute leur part dans l'organisation d'un accueil digne pour les déplacés qui fuient leur pays attaqué par la Russie.»

«L'été dernier a fait ressortir – nous le savions déjà – le dérèglement climatique qui accélère l'impératif de transition écologique. L’État est de nouveau en première ligne pour préserver le pouvoir d'achat et accompagner les transitions qui sont aussi des enjeux de société et de souveraineté.»

«Les crise se succèdent et nous pouvons légitimement être saisis d'une sorte de vertige. Je pense qu'il faudrait prendre l'image de la chrysalide, celle d'un monde qui se transforme à vitesse accélérée, avec des menaces sérieuses mais aussi des opportunités pour un pays comme le nôtre qui porte le message d'un monde plus solidaire, plus juste, plus démocratique et plus respectueux de l'environnement.»

«C'est dans les turbulences que l’État révèle sa première vocation qui est celle de protéger les citoyens pour permettre la continuité de la vie de la nation et maintenir la cohésion sociale nationale qui est notre bien le plus précieux.»

«Connaître en profondeur le territoire»


«Un préfet, comme un sous-préfet, est aussi appelé à connaître en profondeur le territoire dans lequel il est appelé à servir. (…) Dès que l'opportunité s'est présentée, je me suis efforcé d'aller sur le terrain en veillant à l'équilibre, un peu savant, avec mes collègues préfets de département, des différents territoires de la région pour m'imprégner de la réalité départementale. À chaque fois, j'ai passé des événements extrêmement intenses.»

«Il y a eu les journées vendanges – cela tourne un peu autour du vin –, un moment de bonheur absolue avec la profession viticole de cette région, la vente des vins à Beaune, (…) l'inauguration de la Cité internationale de la Gastronomie et du Vin, les visites dans les entreprises, les exploitations agricoles, (…) le déplacement avec le secrétaire général à l'investissement, (…) les inaugurations en Côte-d'Or, un déplacement en Saône-et-Loire avec le Premier ministre sur la RCEA – un dossier qui m'a suivi tout au long de mon parcours –, l'assemblée générale de [l'Organisation internationale de la Vigne et du vin], le déplacement du déplacement de la République à Étaules sur les questions agricoles et un moment rare, à Beaune, avec Emmanuel macron et Angela Merkel, un déplacement officiel empreint d'une dimension personnelle extrêmement émouvante.»

«Une logique d'initiative et de prise de responsabilité au plan territorial»


«Quand un préfet part, on lui pose souvent la question du bilan. (…) Le préfet n'a naturellement pas de mandat électif ni de programme singulier propre. Sa feuille de route est de mettre en œuvre le programme du gouvernement élu en le déclinant dans les territoires par le dialogue et la concertation. Il applique les lois en veillant au traitement égal de chacun.»

«Cette exigence n'exclut nullement que le préfet soit appelé à trancher et à décider dans son domaine large de responsabilités. Je me suis toujours placé dans cette logique d'initiative et de prise de responsabilité au plan territorial.»

«Je me suis efforcé, en permanence, de faire la pédagogie de l'action publique. (…) Lors de la crise des Gilets jaunes, j'ai été frappé par la méconnaissance des règles de base de notre fonctionnement institutionnel.»

«L’État n'est pas un simple prestataire de services»


«J'ai toujours voulu donner, à la fois aux équipes placées sous mon autorité et aussi aux partenaires, le sens de l'action car l’État dans notre pays n'est pas un simple prestataire de services auquel on veut parfois le cantonner. C'est une institution qui incarne les valeurs essentielles de la France.»

«Il faut en permanence les rappeler, les affirmer, les promouvoir, les défendre, les éduquer car, sinon, les particularismes, les identités exacerbées voire les radicalités prennent une place illégitimes dans l'espace public. C'est un combat collectif qui est aussi éducatif et culturel. C'est la raison pour laquelle, j'ai décidé d'appeler cette cour d'honneur Jean-Moulin, (…) j'ai organisé avec nos élus au sortir de la crise sanitaire une Fête de la République, on travaille en profondeur avec les les collectivités sur les cérémonie mémorielles et patriotiques, on s'efforce de ne manquer aucun grand rendez-vous de mémoire dans le département, la nouvelle salle de réunion que l'on fait construire portera le nom de Pierre Meunier – grand élu de Côte-d'Or, ami et compagnon de Jean Moulin.»

«Dans l'action, le seul véritable ennemi du préfet, c'est, en fait, le temps. Un peu d'organisation ne nuit pas.»

«Se mettre autour d'une table est toujours la meilleure façon de régler les problèmes en évitant les effets de posture.»

«Les maires apportent une contribution inestimable à l’État et à notre pays»


«Cette région, je me suis efforcé de la servir toute entière, en essayant, dans les moyens qui m'appartenait, de les affecter en tentant de tenir une balance égale entre tous avec une attention forcément portée aux territoires les plus fragiles.»

«C'est toujours avec une profonde émotion que je pénètre dans une salle de conseil municipal, cœur battant de notre démocratie de proximité. Notre pays marche sur deux jambes, celle de l’État, bien sûr, qui donne de la force et de la cohérence à l'ensemble, mais aussi, celle des collectivités actives et vivantes qui incarnent la République de proximité à laquelle nos concitoyens sont très attachés. (…) Les maires apportent une contribution inestimable à l’État et à notre pays.»

«Le régalien est toujours prioritaire»


«Merci aux services de la préfecture de région et de département. (…) On parle peu des hommes et des femmes de préfecture. Ils sont constitués de travailleurs de l'ombre qui ne plient pas malgré des moyens comptés, qui tiennent bon dans les crises et ne cherchent pas forcément à se faire valoir. Quand on tirera le bilan des dernières crises, on dira que les préfectures ont rempli un rôle essentiel de stabilité et de coordination de l'action publique.»

«Un merci appuyé et reconnaissant aux services de sécurité et de secours. C'est un lien de confiance qui nous lie. Il faut que le rapport soit solide pour que ça fonctionne. Le régalien, quand on est préfet, est toujours prioritaire. (…) La liberté n'est rien sans l'ordre républicain et l'ordre peut vire au despotisme sans la liberté et la responsabilité.»

« Depuis le début de mon engagement, la passion du service de l’État républicain ne m'a jamais quitté et elle ne me quittera pas. (…) L’État est une institution que l'on ne s'abaisse jamais à servir car on sert plus grand que soi. (…) Nous avons de la chance de vivre dans un aussi beau pays. Il faut que l'on en a soit conscient pour garder confiance.»

Destination Conseil d’État


Les remerciement passés, au moment des applaudissements nourris, Arnaud Orsel, intendant général de la confrérie des chevaliers du Tastevin, a lancé un ban bourguignon en l'honneur de l'orateur, membre de la célèbre confrérie bacchique.

Le 17 octobre, le préfet hors classe Franck Robine prendra la responsabilité de conduire tout à la fois la préfecture de la Côte-d'Or et la préfecture de la région Bourgogne-Franche-Comté. Pour sa part, après un nouveau déménagement, Fabien Sudry regagnera Paris pour rejoindre le Conseil d’État, la plus haute instance de justice administrative du pays.

Jean-Christophe Tardivon

Le préfet Franck Robine a pris ses fonctions






























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