
Quatre communes traversées, 10 km de voies en deux itinéraires... l'équipe du Laboratoire d'idées dijonnais a phosphoré pour définir un projet «clair et ambitieux». Le conseiller municipal d'opposition l'a dévoilé, ce jeudi 13 mars, à Dijon.
«Les mobilités, c'est un des points clés de la prochaine campagne», selon Axel Sibert (LR). Ce jeudi 13 mars 2025, près de la gare de Dijon, le conseiller municipal d'opposition et président du Laboratoire d'idées dijonnais (LID) a présenté un projet concernant le développement du réseau de transports urbains de la métropole dijonnaise.
Autour de la table, étaient présents également Clémentine Barbier (sans étiquette), conseillère départementale de la Côte-d'Or, élue sur le cantion Dijon 1, Julien Avril, médecin et référent en santé du LID, Nicolas Louvrier, agent territorial et référent en aménagement du territoire du LID, Caty Williams, adhérente du LID et ancienne élue de la majorité municipale de Robert Poujade, ainsi que Charles Bourgadel (LR), venu soutenir le projet à titre personnel.
«Soulager la rocade d'une partie de ses usagers»
«Le tramway est un des nombreux projets que nous avons», glisse Clémentine Barbier, «l'amour que nous avons tous pour Dijon nous donne vraiment des ailes». «Le Laboratoire d'idées dijonnais est une équipe qui associe jeunesse et renouvellement. (…) 2026 va être un grand virage pour notre belle ville et métropole.»
«Notre objectif, c'est de projeter la ville pour les 30-50 prochaines années. (…) Parce que les transports, notamment les transports publics, c'est le quotidien des habitants, on doit de nouveau penser à l'évolution pour des objectifs qui sont tout à fait actuels, notamment en termes environnementaux», explique Axel Sibert. «Au bout de douze ans, il est normal de s'interroger sur comment le relancer, le développer, desservir mieux la population et les zones économiques.»
L'élu des Républicains songe à la décarbonation des mobilités et au fait de «délaisser la voiture individuelle au profit de transports collectifs» car «on a toujours beaucoup de congestion, notamment sur la rocade». «Cet axe routier doit être soulagé d'une partie de ces usagers.»
«Le projet sur lequel on a travail répond à cette exigence notamment en le connectant à des grands centres économiques et démographiques desservis par la rocade», poursuit-il en évoquant Chevigny-Saint-Sauveur, Longvic et la zone Valmy. «On veut que ce soit un projet par et pour l'économie locale. Il sera fait en concertation avec les acteurs locaux : maires, habitants et acteurs économiques. (…) Quand on a un beau tram, utile, cela joue sur l'attractivité de la métropole.»
Un tram-train
«Le projet a été travaillé avec des cadres de grandes entreprises de transports publics», expose Axel Sibert. «Ce tracé prend en compte les zones résidentielles et économiques peu ou mal desservies actuellement, (…) point noir du réseau de transports urbains à Dijon.»
Le cœur de la réflexion porte sur la mutualisation de voies ferrées existantes par la mise en service d'un tram-train : il s'agit de «minimiser le coût et l'impact environnemental de cette infrastructure».
Le matériel pourrait être un Citadis Dualis d'Alstom, actuellement en service notamment à Nantes et sur certaines lignes de tram d'Île-de-France.
Deux lignes pointant vers Chevigny-Saint-Sauveur en passant par Longvic
Deux itinéraires pourraient être créés : T3a et T3b, allant respectivement de Dijon Valmy et de Dijon gare à Chevigny-Saint-Sauveur avec une jonction près de l’École des métiers à Longvic.
Le choix de l'arrivée à l'est de Dijon est justifiée par le fait d'avoir «identifiée cette zone de Chevigny-Saint-Sauveur comme extrêmement dynamique, comme une zone d'avenir à connecter par les transports publics collectifs». «Longvic est aussi une zone économique.»
Quatre communes seraient traversées par ces deux lignes totalisant une dizaine de kilomètres. Si le maire de Chevigny-Saint-Sauveur, lui aussi adhérent des Républicains a déjà été contacté, ce n'est pas encore le cas de la maire socialiste de Longvic.
T3a et T3b
Depuis la zone d'activité Valmy, la ligne T3a passerait par la ligne de train Luxembourg-Dijon jusqu'au point de triage à Longvic, desservant au passage notamment le Zénith – permettant une interconnexion avec la ligne T2 –, la Vapeur, le parc des expositions – permettant une interconnexion avec la ligne T1 –, la gare Dijon Porte-Neuve ainsi que les quartiers Voltaire et Chevreul-Parc
Depuis la gare Dijon-Ville, la ligne T3b passerait par les quartiers 1er-Mai – permettant une interconnexion avec la ligne T1 –, et Colombière avant de rejoindre le triage de Perrigny pour ensuite emprunter la ligne de de train Dijon-Besançon jusqu'à la gare de Neuilly-Crimolois puis bifurquer vers Chevigny-Saint-Sauveur.
L'infrastructure pourrait être complétée par la création d'un parking-relais près du péage de l'A39 au niveau de Neuilly-Crimolois, à proximité de la gare.
Un chantier estimé à 400 millions d'euros
Considérant «le coût standard de ce qui peut se faire en France» et «l'utilisation le plus possible des infrastructures existantes», le chantier est estimé à 400 millions d'euros.
L'équipe du Laboratoire d'idées dijonnais table sur des cofinancements : un apport de 20 à 40 millions d'euros de la part de l’État, de 10 millions d'euros de fonds européens, de 40 millions d'euros par la Région Bourgogne-Franche-Comté, de 20 millions d'euros de la part du Département de la Côte-d'Or.
Au bas mot, 280 millions d'euros seraient à la charge de la Métropole de Dijon qui pourrait financer via «ses fonds et des emprunts». «Je n'ai aucun problème avec l'emprunt si c'est du bon emprunt», glisse Axel Sibert, «la bonne dette, c'est une dette qui n'est pas un poids et sert l'avenir de nos enfants et le développement de la ville».
Calquant le temps de réalisation des lignes T1 et T2, études comprises, le calendrier vise une inauguration en 2032 pour «les 20 ans du retour du tramway à Dijon» et avant la fin de la mandature 2026-2032.
Pour cet «objectif clair et ambitieux», l'équipe du Laboratoire d'idées dijonnais prône «la concertation avec les habitants et les acteurs économiques qui financent». «Aujourd'hui, on met notre projet dans le débat public. (…) Notre projet nécessitera une étude pour le confirmer.»
Des connexions potentielles «au-delà de la métropole»
Le recours à la ligne Luxembourg-Dijon pourrait «connecter au-delà de la métropole, jusqu'à Is-sur-Tille». «Si l'on veut intégrer beaucoup d'acteur et notamment le Département de la Côte-d'Or, il faut une métropole ouverte y compris sur des bassins de population hors métropole», insiste l'élu des Républicains.
Sur l'autre branche, l'interconnexion avec la ligne de TER Dijon-Besançon pourrait être facilitée au niveau de l'ancienne halte de Neuilly-lès-Dijon.
L'enjeu du futur RER métropolitain de Dijon
Dijon pourrait être concerné par un projet dans le cadre des «RER métropolitains» souhaités par Emmanuel Macron, les Services express régionaux métropolitains (SERM). Il pourrait être appliqué à la ligne Dijon-Besançon.
«Notre région en termes d'infrastructures ferroviaires n'est vraiment pas exemplaire. (…) Je connais la situation financière et la gouvernance de la Région. (…) Je ne veux pas que les fonds utilisés par les SERM soient utilisés pour pallier les insuffisances de la Région», martèle Axel Sibert, «je veux que l'argent pour développer les transports urbains métropolitains servent pour Dijon Métropole.»
Axel Sibert est opposé à l'instauration d'un versement mobilité régional
Une loi a donné la possibilité aux Régions d'instaurer un versement mobilité régional, sur le modèle du versement mobilité prélevé par les intercommunalités.
«Je comprends les patrons de Bourgogne-Franche-Comté qui s'opposent à l'impôt de trop», réagit Axel Sibert, «on est dans un ras le bol fiscal».
«Il faut aussi financer les projets d’infrastructures qui les servent eux», concède-t-il, «avant de penser à un impôt supplémentaire, il faut penser à une dépense en moins». «La Région Bourgogne-Franche-Comté est très mal gérée, la gouvernance est hasardeuse. La Région est exsangue, elle n'aura pas d'autres choix que d'augmenter les impôts.»
«Ne pas répéter les erreurs de François Rebsamen»
En leur temps, le coût de 399 millions d'euros de la réalisation simultanée de deux lignes de tramway a pu être financé en partie grâce au recours à des prêts structurés à caractère spéculatif, ce que l'on a appelé, après la crise financière de 2008, des «emprunts toxiques».
«François Rebsamen a largement été associé à ces emprunts toxiques», commente Axel Sibert, «ses choix ne seront pas les nôtres». «François Rebsamen a peut-être fait une erreur à ce moment-là, (…) on ne répétera pas les erreurs du passé».
«On a la chance de pouvoir compter sur des acteurs institutionnels comme la Banque publique d'investissement ou la Banque européenne d'investissement», poursuit le conseiller municipal d'opposition. «Le plan de financement est largement réalisable notamment sur les recettes des transports publics qu'il n'y avait pas à l'époque.»
Dans l'attente des études commandées par la Métropole
Le 1er décembre 2022, François Rebsamen (PS, FP), alors maire de Dijon, actuel président de la Métropole de Dijon, a annoncé le lancement d'études en vue de créer de nouvelles lignes de «tram ou bus en site propre» après les prochaines élections municipales (
lire notre article). Ces études ont été budgétées à hauteur de 500.000 euros (
lire notre article).
Selon Axel Sibert, le résultat aurait été transmis au président de la Métropole. «On n'a pas vocation à être juste commentateur», réagit l'élu des Républicains.
Le projet reçoit le soutien de François-Xavier Dugourd
«Le Laboratoire d'idées dijonnais fait partie du Printemps dijonnais», rappelle Axel Sibert qui se prévaut du soutien de François-Xavier Dugourd (LR, NE), actuel vice-président délégué du Département de la Côte-d'Or et potentiel colistier du rassemblement de la droite et du centre en vue de l'élection municipale de 2026. «Le printemps dijonnais est le rassemblement de tout ce qu'on peut apporter individuellement et collectivement.»
«Au-delà des compétences de la Ville et de la Métropole, ce qui nous intéresse, c'est d'améliorer le quotidien des Dijonnais», répond Axel Sibert, interrogé sur le fait de présenter un projet métropolitain avant d'exposer un chantier municipal. «Nous ne laisserons pas le monopole des grands projets au président de la Métropole. (…) On est Dijonnais mais on est métropolitains aussi. Il nous a semblé essentiel de proposer un projet crédible pour l'avenir de notre Métropole. (…) Le maire de Dijon et la majorité municipale seront prépondérants mais on a besoin des maires de la métropole.»
«Quand on va remettre à plat le PLUi-HD, on va remettre à plat le réseau de transport en commun et le schéma cyclable», précise-t-il, «l'idée est de développer le service public, pas de soustraire»
Quid de l'ouest dijonnais ?
Interrogé sur le développement du réseau de transports urbains vers l'ouest dijonnais, Axel Sibert considère qu'«il y a des limites topographiques». Toutefois, «le tramway à crémaillère qui monte à la Croix-Rousse, à Lyon, pourrait être dupliqué pour Talant-Plombières-Fontaine d'Ouche.»
«La politique, c'est être responsable et crédible», enchaîne-t-il, «la Fontaine d'Ouche est un formidable quartier qui a des atouts incroyables». «Il a été rénové, maintenant, il faut lui donner du sens. On a une grande ambition pour la Fontaine d'Ouche : c'est surtout ramener de l'emploi.»
Le Laboratoires d'idées dijonnais prévoit de continuer à diffuser progressivement ses propositions en vue de la prochaine élection municipale à raison d'une à deux par mois.
Jean-Christophe Tardivon
Visuel Laboratoire d'idées dijonnais
Photographies JC Tardivon