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05/04/2022 20:22

MOBILITÉS : Le véhicule électrifié accélère son développement

Durant la deuxième édition de l'e-day, ce mardi 5 avril sur le circuit de Dijon-Prenois, les professionnels de l'écosystème des véhicules électriques, hybrides rechargeables et hydrogène ont établi un état des lieux : «le marché de la mobilité électrique explose depuis fin 2019».
La transition énergétique des transports accélère. Considérée comme un levier de la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre, la mobilité électrique voit progressivement les planètes s'aligner : diversité des modèles et des tarifs de véhicules proposés aux consommateurs, augmentation du nombre de bornes de recharge sur les autoroutes notamment et développement de solutions adaptées aux entreprises.

Ce mardi 5 avril, l'e-days – ou journée professionnelle de la mobilité électriques – s'est déroulée sur le circuit de Dijon-Prenois pour faire un état des lieux.

Organisatrice, l'association Bourgogne-Franche-Comté Mobilité électrique revendiquait 700 inscrits et 1.500 rendez-vous pour des essais auprès de 31 exposants dont 23 marques automobiles.

Des stands de présentation de systèmes de recharges, de vélos, d'utilitaire, de voitures... des essais de ces dernières sur le circuit... des conférences et ateliers spécifiques... Les personnes intéressées avaient de quoi engranger des informations et noter des solutions concrètes.

«Répondre aux enjeux économiques et écologiques actuels»


«La mobilité électrique a été placée au cœur de la stratégie de l’industrie automobile française», signale Robert Poggi, directeur d'Enedis en Bourgogne, la branche régionale du fournisseur d'électricité, et président de l'association Bourgogne-Franche-Comté Mobilité électrique. «Filière d’excellence et axe majeur de la reconquête de la souveraineté technologique industrielle du pays, elle est une pièce maîtresse pour répondre aux enjeux économiques et écologiques actuels.»

La mission de l'association est de fédérer les acteurs régionaux autour des solutions de mobilité durable : véhicules électriques, hybrides rechargeables ou utilisant l'hydrogène. La structure met également en œuvre un programme national de formation, piloté par l'AVERE France. Gratuit, il est destiné aux collectivités.

Objectif un million de véhicules électrifiés en circulation fin 2022


«Le marché de la mobilité électrique explose depuis fin 2019», note Cécile Goubet, directrice générale d'AVERE France, association professionnelle nationale qui fédère l'écosystème de la mobilité électrique et qui est l'interlocutrice du gouvernement.  

Les constructeurs proposent aujourd'hui environ 200 modèles de véhicules électriques ou hybrides rechargeables. La part de marché des véhicules électrique est passée de 3% en fin 2019 à plus de 20% en fin 2021. 830.000 de ces véhicules sont en circulation. Le secteur se donne pour objectif d'atteindre un million de ces véhicules sur les routes d'ici la fin 2022 (600.000 véhicules électriques et 400.000 véhicules hybrides rechargeables).

Les objectifs de décarbonation fixés en 2015 par l'Accord de Paris (COP 21) correspondraient à 40% de parts de marché en 2025 et 70% en 2030. Actuellement, le secteur des transports représente 30% des émissions françaises de gaz à effet de serre.

«La décennie dans laquelle on est se caractérise par une augmentation extrêmement forte de l'électrification qui, à terme, va amener la moitié du parc à être électrique», anticipe Cécile Goubet, «ça avance vraiment très fort».
 

«Le rôle de conseil du concessionnaire est essentiel»


«Les métiers purement axés sur l'automobile se sont vraiment élargis, ont changé et vont changer dans les prochaines années», prévient Vincent Durand-Escribe, directeur du pôle commerce et distribution de Mobilians (ex-Conseil national des professionnels de l'automobile), représentant 150.000 entreprises employant 420.000 salariés dans l'aval de la filière automobile (vente, conseil, maintenance...).

Mobilians relève que 60% des véhicules à fonctionnement totalement électrique sont achetés par des particuliers. Vincent Durand-Escribe appelle donc à accompagner en particulier les professionnels qui, aujourd'hui, préfèrent les véhicules hybrides rechargeables (les entreprises représentent 75% des achats de ce type).

Mobilians précise que la distribution représente 7% de la valeur d'un véhicule. L'évolution de la filière «impose aux concessionnaires de se réinventer», selon Vincent Durand-Escribe. «Le rôle de conseil du concessionnaire à l'automobiliste qui passe à la mobilité électrique est essentiel», insiste-t-il.

Le représentant de la filière aval de l'automobile appelle le futur président de la République à maintenir le bonus écologique (actuellement fixé à 6.000 euros pour l'achat d'un véhicule léger électrique ou hydrogène avec un taux de CO2 au maximum de 20 g/km et dont le prix est inférieur à 45.000 euros) ainsi que la prime à la conversion (jusqu'à 5.000 euros pour l'achat d'un véhicule électrique ou hybride rechargeable neuf ou d'occasion).

17 millions de véhicules électrifiés en circulation en 2035


Le gestionnaire du réseau de distribution a un rôle à jouer au niveau des infrastructures de recharge. Pierre de Firmas, directeur national mobilité d'Enedis, anticipe que 17 millions de véhicules électriques et hybrides rechargeables circuleront en France en 2035.

Selon lui, la recharge à domicile représente «un avantage majeur du véhicule électrique» qui dispense ainsi du passage en station-service. Cependant, un des enjeux concerne l'habitat en résidentiel collectif qui concerne 44% de la population française. Jusque-là, les copropriétaires engagés devaient convaincre les autres copropriétaires d'un immeuble d'installer des bornes de recharge.

La législation est en train d'évoluer pour autoriser un dispositif de préfinancement par des professionnels de la recharge : ce ne seraient plus à la copropriété d'avancer la somme nécessaire pour réaliser les travaux. Les décrets d'application sont en attente de publication.

Pour anticiper les évolutions, Enedis modélise les usages du réseau et partage les informations avec les collectivités, dont la Région, autorité d'organisation des mobilités, afin d'envisager le maillage des territoires en bornes de recharge.

Augmentation moyenne de la consommation d'électricité d'environ 1% par an


«Oui, le réseau va tenir», lance Pierre de Firmas pour répondre à une interrogation récurrente. Les électriciens regardent attentivement le phénomène d'augmentation de la consommation moyenne – prévue pour augmenter d'environ 1% par an d'ici 2050 – ainsi que les pics de demande potentiels.

Actuellement, le pic peut atteindre 80 GW à 19 heures en semaine durant un mois de janvier. Il est attendu en hausse de 12% sauf si la recharge est pilotée en favorisant la mise en charge la nuit par exemple.

Le développement du principe de pilotage de la charge pourrait même amener les électriciens à articuler la production d'électricité par les énergies renouvelables avec la possibilité de restituer au réseau le contenu des batteries des véhicules lors des phases d'intermittence de la production.

«Tous les véhicules électriques, toutes les batteries diffuses peuvent être combinées astucieusement à la production photovoltaïque ou éoliennes et donner un avantage aux usagers», envisage ainsi Pierre de Firmas.

«La lutte contre le dérèglement climatique passe par l'électrification des transports»


«L'urgence climatique est là», déclare Jérémie Motin, directeur national de la mobilité électrique du groupe EDF, «ça ne fait plus de débat». «EDF a la conviction que la lutte contre le dérèglement climatique passe par l'électrification des transports.» Du fait du parc de réacteurs nucléaires, l'électricien revendique une production d'électricité décarbonée à 97%.

Dans ce contexte, l'ambition d'EDF est d'«être leader de la fourniture pour les véhicules électriques» avec 30% de parts de marché. Le groupe prévoit de déployer 400.000 points de charge d'ici 2023 dans quatre pays : France, Belgique, Italie et Royaume-Uni.

Autre enjeu pour l'électricien : «la recharge intelligente». «Elle est bonne pour le réseau, bonne pour la planète, bonne pour le consommateur», s'enthousiasme Jérémie Motin.

«Le monde de l'automobile et le monde de l'énergie doivent travailler ensemble», insiste-t-il en donnant l'exemple : le groupe EDF prévoit d'électrifier l'ensemble de sa flotte d'ici 2030. À ce jour, La Poste a la plus importante flotte de véhicules électriques en France et Enedis la deuxième.

«On continue d'attirer des jeunes dans nos métiers»


«Il y a une certaine inertie du parc automobile», rappelle Dominique Faivre-Pierret, délégué régionale de l'Association Nationale de la Formation Automobile qui accompagne l'évolution des métiers de l'aval de la filière automobile (commerce, entretien, contrôle technique, location, auto-école, parcs de stationnement...).

Les métiers vont donc évoluer progressivement, au gré des départs en retraite, durant la période où coexisteront des véhicules à moteur thermique et des véhicules à moteurs électriques.

Pour autant, la montée en puissance de la mobilité électrique va conduire les usagers à s'adresser aux professionnels des services : vendeurs, loueurs, personnels des aires d'autoroutes. «Il faut accompagner ces métiers à l'utilisation des véhicules électriques, à l'utilisation des bornes de recharge», alerte Dominique Faivre-Pierret.

D'où des blocs de compétences intégrées dans les nouvelles formations aux métiers de la filière, notamment au CFA Automobile de Mâcon ainsi que dans les bacs pro de l’Éducation nationale.

Dominique Faivre-Pierret précise que l'«on continue d'attirer des jeunes dans nos métiers, parce que ce sont des métiers qui recrutent, plus de 50.000 emplois par an, nos métiers comportent beaucoup de perspectives d'évolution pour les jeunes» .

Jean-Christophe Tardivon

Baromètre 2021 «Les Français et la mobilité électrique» réalisé par Ipsos pour l’Avere-France et Mobivia

83% des Français se disent prêts à changer leurs habitudes de mobilité pour améliorer la qualité de l’air et 82% des Français pour lutter contre le changement climatique.
Les distances parcourues quotidiennement par les Français sont restées relativement stables entre 2012 et 2021 avec 76% des personnes interrogées qui parcourent moins de 50 km par jour (29 km en moyenne), sans que le télétravail n’ait eut un effet ces derniers mois.
Les 3 quarts des personnes qui se disent prêtes à choisir un véhicule électrique pourraient se tourner vers l’occasion.
Une autonomie supérieure à 500 km, un coût équivalent aux véhicules thermiques et la possibilité de recharger facilement sont des éléments déterminants pour le passage à l’électrique.
1 français sur 3 considère avoir dès à présent la possibilité de recharger un véhicule électrique, que ce soit à son domicile, sur le lieu de son entreprise ou via un point de recharge ouvert au public.
La voiture personnelle reste indispensable pour une majeure partie des Français.
42% des Français sont des utilisateurs de deuxroues.
(29 % des Français utilisent un vélo sans assistance électrique au moins deux fois par mois, et 14 % un vélo à assistance électrique) ;
L’intérêt pour l’achat d’un scooter électrique progresse auprès des utilisateurs de scooters : 56 % d’entre eux envisagent effectivement l’achat d’un scooter électrique. Une valeur en hausse par rapport à 2018 (48 %) et 2016 (43 %).

«Avec la décarbonation des transports, on est dans une totale révolution de l'écosystème», analyse Michel Neugnot