Comme souvent l'inauguration de la Foire de Dijon s'est révélée très politique. Ce jeudi 31 octobre, François Rebsamen et François Sauvadet ont mis temporairement un mouchoir sur leurs différends pour trinquer au succès de Dijon Bourgogne Events qui permet de faire la promotion de l'action publique des collectivités qu'ils président respectivement.
Le lancement de la 94ème édition de la Foire internationale et gastronomique de Dijon, ce jeudi 31 octobre 2024, était le premier depuis la nouvelle gouvernance de Dijon Bourgogne Events, structure qui exploite le parc des expositions et qui organise un événement attendu tant par le grand public que par les responsables politiques.
Désormais siègent côte-à-côte au conseil d'administration de cette société publique locale des représentants de la Ville de Dijon, de la Métropole de Dijon et du Département de la Côte-d'or, mais pas de la Région Bourgogne-Franche-Comté.
Ainsi, François Rebsamen et François Sauvadet se sont retrouvés voisins de stand pour cette Foire de Dijon 2024 et ont pu trinquer au succès d'une structure qui leur permettra de rivaliser d'influence.
Une paix des braves entre François Rebsamen et François Sauvadet
Si l'heure de la réconciliation n'est toujours pas arrivée, tant les piques fusent encore en dehors des événements communs, François Resbamen (PS, FP), maire de Dijon et président de la Métropole de Dijon, et François Sauvadet (UDI), président du conseil départemental de la Côte-d'Or, ont trouvé un
modus vivendi qui s'apparente à une paix des braves, en attendant les prochaines échéances électorales.
Depuis 2022 et leur soutien, plus ou moins appuyé, plus ou moins exigeant, au président de la République, front républicain face à Marine Le Pen oblige, le niveau d'intensité du conflit politique qui oppose le social-démocrate au centriste avait nettement diminué.
L'inauguration de Foire de Dijon 2024 marque un pas supplémentaire, non pas vers un rapprochement, mais vers une forme de «coexistence exigeante» sur des territoires qui se chevauchent, pour reprendre une formule que l'on a appliquée à l'exécutif national à la suite de la nomination de Michel Barnier à la tête du gouvernement par Emmanuel Macron.
Exit Dijon Congrexpo, place à Dijon Bourgogne Events
Jusqu'en avril 2023, l'association Dijon Congrexpo bénéficiait d'une délégation de service public de la Ville de Dijon pour exploiter le parc des expositions et le palais des congrès.
À la suite de la crise sanitaire, un contentieux opposant l'association et la municipalité sur les indemnités liées au manque d'activité a conduit à accentuer des tensions latentes entre les deux structures. La Ville a été condamnée par la justice administrative à verser 1,6 million d'euros à l'association.
Le fait que François Rebsamen n'ait pas été invité à l'inauguration de la Foire de Dijon 2021, l'édition du centenaire (
lire notre article), a scellé l'avenir de la délégation de service public. Arrivant à son terme en 2023, la délégation a été retirée à Dijon Congrexpo pour être confiée par le conseil municipal à Dijon Bourgogne Events, structure ad hoc qui, elle-même, préfigure une future marque territoriale Dijon Bourgogne.
Composée majoritairement d'anciens salariés de Dijon Congrexpo, l'équipe de Dijon Bourgogne Events a organisé la Foire de Dijon 2023 en un temps record en s'appuyant sur ses acquis et en procédant à quelques ajustements. Idem pour les salons et congrès accueillis cette année-là.
Le Département participe à la gouvernance de Dijon Bourgogne Events
En faisant récemment entrer le Département de la Côte-d'Or au capital de la société publique locale Dijon Bourgogne Events à hauteur de 10%, après plusieurs mois de négociations, François Sauvadet a répondu à une attente de François Rebsamen.
En contrepartie, le président du Département a obtenu la pérennité de la Ferme Côte-d'Or, mini-Salon de l'agriculture qui met en avant les différentes filières agricoles dans le cadre de la Foire de Dijon.
L'actionnariat de la SPL se répartit désormais ainsi : 65% pour la Ville de Dijon, 25% pour la Métropole de Dijon et 10% pour le Département de la Côte-d'Or.
«L’ambition de ce changement de gouvernance se résume : modernité, performance, rayonnement», a revendiqué François Rebsamen durant l'inauguration de la foire. «Dijon Bourgogne Event, c'est l'outil au service du rayonnement.»
Métropole et Département en avant à la Foire de Dijon
Cette Foire de Dijon 2024 acte donc le début d'une nouvelle ère dans l'exploitation du parc des expositions. Un nouvel actionnariat. Un nouveau directeur général également, en la personne de Jacques Delaine, qui aura plus particulièrement la charge d'appréhender la rénovation de l'équipement tandis que la directrice adjointe Audrey Brulé continue de veiller à l'organisation des événements (
lire notre article).
Une autre nouveauté marque la Foire de Dijon 2024 : l'agencement revisité des stands autour de ce qui est désormais appelée l'«allée des Épicuriens», qui traverse le Hall 1 pour conduire à la célèbre Table de Lucullus.
Autour de cette voie centrale figurent les stands institutionnels, au premier chef ceux de la Métropole de Dijon et du Département de la Côte-d'Or. Par le passé, le Département était particulièrement présent dans l'ancien Quartier des Saveurs, dans l'angle du Hall 1 menant au palais des congrès, tandis que la Ville et la Métropole de Dijon accueillaient les visiteurs par leur stand commun au niveau de l'entrée principale, côté avenue des Grands Ducs d'Occident.
Le recentrage dans le Hall 1 des stands des deux collectivités est symptomatique d'une inflexion dans l'orientation stratégique de la Foire de Dijon. Il ne s'agit plus tant d'organiser et animer un événement commercial pour en recueillir les bénéfices que d'assurer la promotion des collectivités portant une action publique sur un territoire, allant, par cercles concentriques, de Dijon à la Côte-d'Or et même jusqu'à la Bourgogne.
La Région hors-jeu à la Foire de Dijon mais présente au Salon de l'agriculture à Paris
Au grand dam du maire de Dijon, Marie-Guite Dufay (PS) n'a pas souhaité que la Région Bourgogne-Franche-Comté qu'elle préside devienne actionnaire de Dijon Bourgogne Events.
La socialiste préfère envisager de participer aux futurs investissements qui seront nécessaires pour rénover ou reconstruire le parc des expositions de Dijon dont le Hall 1 a été construit en 1955.
En refusant d'entrer au capital de la SPL, la Région Bourgogne-Franche-Comté se met hors-jeu de des actions de promotion menée durant la Foire de Dijon. Toutefois, la collectivité garde un stand modeste – équivalent de celui présenté à la Foire comtoise de Besançon chaque printemps –, près de l'entrée de l'avenue des Grands Ducs d'Occident.
La Région priorise des actions de communication lors du Salon international de l'agriculture, à Paris, où elle propose deux grands stands, l'un institutionnel dans le hall des animaux d'élevage, l'autre tourné vers le grand public dans le hall des régions.
Dans ce contexte, François Rebsamen et François Sauvadet pourront continuer de rivaliser pour défendre la sphère d'influence des collectivités qu'ils président respectivement tout en mettant un mouchoir sur leurs différends politiques quand il s'agira de faire évoluer Dijon Bourgogne Events dont les statuts sont suffisamment souples pour permettre d'exploiter d'autres équipements que le seul parc des expositions.
François Rebsamen annonce un «nouveau chapitre» de la Foire de Dijon
Toujours dans l'optique de laver l'affront de 2021, François Rebsamen a été le seul élu à s'exprimer lors des discours officiels, ce jeudi.
L'inauguration s'est déroulée en présence notamment de la sous-préfète Amelle Ghayou, secrétaire générale adjointe de la préfecture de la Côte-d'Or, François Patriat (REN), sénateur de la Côte-d'Or et seul parlementaire présent, Michel Neugnot (PS), Christian Morel (divers gauche) et François Tenenbaum (PS), vice-présidents du conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté, Marie-Claire Bonnet-Vallet (LCOP), vice-présidente du conseil départemental de la Côte-d'Or et présidente de Côte-d'Or attractivité, Danielle Juban (REN), vice-présidente de la Métropole de Dijon et présidente de Dijon Bourgogne Events, Nicolas Bourny (sans étiquette), maire de Magny-sur-Tille, Jacques Carrelet de Loisy, maire d'Hauteville-lès-Dijon, Fabian Ruinet (LR), maire de Talant, Jean-Michel Verpillot (sans étiquette), maire de Marsannay-la-Côte, ainsi que de nombreux élus de la Ville de Dijon, de la Métropole de Dijon, du Département de la Côte-d'Or, de la majorité comme de l'opposition.
«Cette Foire incarne l'âme de notre ville, son dynamisme, sa passion pour l'excellence gastronomique et ceux qui en sont les artisans, toujours avec un esprit de partage et d'ouverture», a déclaré François Rebsamen. «Aujourd’hui, nous nous apprêtons à écrire un nouveau chapitre de cette belle et longue histoire, animés par la même ambition et le même enthousiasme.»
La gastronomie, «point commun» entre la France et le Japon
Le maire de Dijon a salué la délégation interrégionale du Japon, neuf régions étant associées pour animer un stand aux couleurs du pays du soleil levant, sans oublier le concours de l'équipe du restaurant parisien Jinshan Shokudo qui reproduit un
izakaya, un bistrot populaire typique.
«S'il est un point commun essentiel entre la France et le Japon, c’est bien leur attachement à la gastronomie», a-t-il développé, «de nombreux chefs japonais opèrent sur le territoire métropolitain et côte-d'orien à travers lesquels nous partageons des fragments importants d'identité, des moments d'intimité et de convivialité.» «La cuisine japonaise est reconnue comme une des meilleures du monde, elle va enchanter les visiteurs, qui sont séduits par la pureté de ses saveurs et par la subtilité de ses alliances.»
«La France et le Japon entretiennent une relation d'amitié solide, patiemment tissée au fil du temps», a enchaîné le social-démocrate, «nos coopérations sont variées : elles sont économiques, industrielles, culturelles, académiques, diplomatique». «Le Japon est le premier investisseur asiatique en France et les entreprises japonaises créent de nombreux emplois, y compris à l'échelle locale.»
La Métropole de Djon enverra une délégation à l'Exposition universelle 2025 d’Osaka
«La force de Dijon, capitale régionale, c'est d'être une ville dont la gastronomie et l'art de vivre sont réputés dans le monde entier ; ça s'appuie sur une économie bien réelle, sur notre histoire et sur nos héritages culturels. C'est bien un levier majeur pour nos entreprises de miser sur cette qualité, sur cette identité culturelle si forte, si française, pour mieux vendre nos produits de la France à l'étranger», a souligné le premier édile.
En 2023, la Métropole de Dijon et le Département de Kumamoto ont signé un protocole d'entente visant à «développer des coopérations stratégiques dans les domaines de la gastronomie, de l’alimentation, des parcs et jardins, (…) et du tourisme».
Dans le cadre ce cet accord, Kumamoto accueillera une délégation métropolitaine sur son stand de l'Exposition universelle 2025 d’Osaka. «Ce sera l’occasion unique d’exposer au Pavillon France la richesse de nos savoir-faire bourguignons en matière de gastronomie, viticulture, innovation et recherche dans l'alimentaire», a revendiqué François Rebsamen.
François Rebsamen alerte sur «les difficultés» des agriculteurs
Après avoir vanté le dynamisme de la filière agroalimentaire qui représente 13% des emplois en Bourgogne-Franche-Comté, le social-démocrate a évoqué la situation des agriculteurs alors que s'amorce la reprise de leur mouvement social du début de l'année.
«Mais au moment de célébrer tout ça, on ne doit pas oublier les difficultés que traversent nos agriculteurs», a alerté François Rebsamen, «nous devons entendre leur détresse». «Avec la hausse des coûts de production, une augmentation de la complexité administrative tous les jours, avec les aléas climatiques extrêmes – on vient de voir ce qui se passe en Espagne, nous avons une pensée pour tous les sinistrés de la région de Valencia (…) –, la pression de la concurrence internationale, nos agriculteurs font face à des épreuves exigeantes, malgré leur engagement à fournir chaque jour des produits d’exception pour notre table.»
Et d'assurer que le projet alimentaire territorial de la Métropole de Dijon, appelé Prodij, correspond à un engagement «en faveur des circuits courts, de la promotion des produits locaux et de l'agriculture urbaine».
«Aujourd'hui, et jusqu'au 11 novembre, vous aurez l'occasion de découvrir ou de redécouvrir la richesse de notre terroir, de vous émerveiller devant le savoir-faire de nos artisans, de vous laisser surprendre par des saveurs venues d'ailleurs. Vous pourrez assister à des démonstrations culinaires, participer à des ateliers, ou encore échanger avec des producteurs passionnés», a conclu François Rebsamen en évoquant son souhait, en matière de production vitivinicole, de voir reconnue «fin novembre» par l'INAO l'indication géographique complémentaire «Bourgogne Dijon».
Le brassage du saké pourrait bientôt être inscrit par l'UNESCO sur la liste du patrimoine immatériel de l'humanité
«Au Japon, l'année prochaine, nous allons organiser l'Exposition universelle 2025 Osaka-Kansai, venez découvrir la culture japonaise traditionnelle et gastronomique», a lancé Nobutaka Azuma, directeur général du bureau européen de la représentation du Département de Hyogo, basé à Paris.
En lien avec la méthode d'élaboration du saké, du shôchû et de l'awamori, boissons traditionnelles pour laquelle le Japon a déposé un dossier de candidature auprès de l'UNESCO, deux brasseurs de saké ont proposé un chant traditionnel.
La cérémonie inaugurale s'est terminée par un appui symbolique à plusieurs mains sur un bouton géant pour lancer la rotation de la Table de Lucullus.
Le parcours inaugural
François Rebsamen, Michel Neugnot, François Sauvadet, Danielle Juban et Nobutaka Azuma en tête, le cortège inaugural a pris ensuite la direction du stand collectif des producteurs de cassis de Dijon pour une première dégustation.
Lui aussi situé allée des Épicuriens, le grand stand des marques emblématiques du terroir bourguignon, réunies dans l'association Savourez la Bourgogne, a permis de présenter les ustensiles de cuisine SEB ainsi que les produits de la Fromagerie Delin, des pains d'épices Mulot & Petitjean ou encore de la biscuiterie Mistral.
Sur las scène de show culinaire Complètement toqués, un chef cuisinier a présenté un plat japonais typique à base de sushis.
La délégation a été ensuite accueillie en musique par une danseuse au niveau du Village de Tahiti et des îles du Pacifique avant une nouvelle dégustation animée par Claudia, influenceuse connue sous le pseudonyme de la Brunette en cuisine, sur le stand de la Cité internationale de la gastronomie et du vin, cela en présence du boxeur Bilel Latrèche.
Au Village international, Nobutaka Azuma a pu offrir à François Rebsamen un saké produit par la Maison Tanaka en hommage au Château Shirasagi, plus grand château médiéval du Japon. Ce saké bénéficie de l'IGP Harima. De joyeux «Kampai» ont accompagné l'offrande protocolaire, les membres de la délégation pouvant déguster des sakés et autres shōchūs.
En arrivant sur le stand de la Métropole de Dijon, une carte du territoire viticole a été dévoilée puis le bar à vins de la collectivité durant la foire a été inauguré. On peut retrouver là notamment les bourgognes du domaine de La Cras.
En traversant l'allée des Épicuriens, les participants à l'inauguration se sont retrouvés aux «Halles 100% Côte-d'Or», le stand du Département qui met en avant sa marque territoriale. Gougères, jambon persillé et bourgognes côte-d'or étaient proposés à la dégustation par l'équipe de Benoît Bruley, traiteur à Épagny. François Rebsamen et François Sauvadet ont alors trinqué ensemble avec du vin de Bourgogne.
Des militaires passés et actuels étaient représentés
Parallèlement à cette déambulation inaugurale, d'autres animations se sont déroulées uniquement ce premier jour de la foire.
Des passionnés par l'histoire du Premier Empire ont parcouru les allées en grands uniformes pour symboliser Napoléon Ier et son état-major. Parmi eux, Franck Gaillard (REC), maire de Chaume-et-Courchamp, et Julien Belmonte, musicien et conférencier spécialiste des arts musicaux de cette époque.
Ces représentants du Cercle de la Maison impériale du prince Eugène de Beauharnais se mobilisent aux côtés de Jean-Philippe Morel (PR), adjoint au maire de Dijon, pour que Dijon puisse obtenir le label de Ville impériale.
À l'extérieur du Hall 2, durant quelques heures, le tout nouveau véhicule blindé de la région de gendarmerie Bourgogne-Franche-Comté, un Centaure (
lire notre article), a été présenté aux visiteurs de la Foire de Dijon 2024.
Jean-Christophe Tardivon
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