Le procureur de la République et Dijon Métropole ont signé ce jeudi 28 octobre une convention facilitant le travail de la justice dans la lutte contre le phénomène des rodéos urbains.
Au printemps 2021, le garde des Sceaux a échangé avec les associations d'élus France Urbaine et AMF pour envisager d'établir un protocole en vue d'expérimenter la mise en fourrière à titre gracieux des engins saisis dans le cadre de rodéos urbains.
Depuis, plusieurs collectivités se sont engagées à prendre en charge les frais de fourrière qui étaient parfois un frein à l'action judiciaire sur ce type de délinquance.
Ce jeudi 28 octobre 2021, le procureur de la République de Dijon, Olivier Caracotch, et la Métropole de Dijon, représentée par Nathalie Koenders (PS), vice-présidente de Dijon Métropole et première adjointe au maire de Dijon déléguée à la tranquillité publique, ont signé une convention en ce sens.
L'événement s'est déroulée à la Maison de la tranquillité locale du quartier de la Fontaine-d'Ouche en présence de Vincent Testori (Modem), conseiller municipal délégué à la tranquillité publique et à la médiation, de Massar N'Diaye (sans étiquette), conseiller municipal délégué au quartier de la Fontaine-d'Ouche, et du commandant Hervé Larup, représentant le directeur départemental de la sécurité publique.
Près de 100 véhicules saisis en 7 mois
«Un après l'acte II de la tranquillité publique», il s'agir de signer cette convention pour «renforcer la problématique de la lutte contre les rodéos», explique Nathalie Koenders avant la signature.
Depuis le 1er mai dernier, plusieurs opérations conjointes entre Police nationale et police municipale se sont déroulées dans différents quartiers de Dijon dont le centre-ville. 102 contrôles routiers ont été effectués tandis que le procureur de la République a délivré des autorisations de contrôles d'identité.
«La Police nationale organise des opérations spécifiques de lutte contre les rodéos qui s'inscrivent dans la lutte contre la délinquance générale», explique le commandant Hervé Larup.
L'officier de police souligne l'intérêt d'exploiter les caméras de vidéoprotection car «tenter d'interpeller les individus qui font des rodéos est très dangereux pour eux-mêmes et les personnes qui circulent aux alentours».
La première adjointe signale que 97 faits de rodéos ont été verbalisés par le biais de la vidéoprotection : «les habitants ne le voient pas directement mais, aujourd'hui, cela ne reste pas impuni sur Dijon grâce à la mobilisation de tous les acteurs et à l'outil de vidéoprotection».
La Ville de Dijon compte 157 caméras dont 11 dans le quartier de la Fontaine d'Ouche, lieu de la signature de ce jour. Une caméra vient récemment d'être installée à l'angle de la rue de Mirande et du boulevard Carnot où un terrible accident mortel a eu lieu il y a quelques mois.
«Rendre des décisions de justice au plus près des habitants»
Pour sa part, le procureur de la République dé Dijon défend une action de «la justice de proximité». Dans ce cadre, il s'agit de «rendre des décisions au plus près des habitants avec le développement de Points justice, des lieux où des décisions sont notifiées et des alternatives aux poursuites sont mises en œuvre».
Par ailleurs, le représentant du ministère de la Justice indique «réduire les délais pour les petits infractions» sera un des enjeux des prochains états généraux de la justice.
«La justice doit répondre plus souvent aux délinquances du quotidien», résume Olivier Caracotch, «des moyens très conséquents ont été dégagés au soutien de cette justice de proximité». Et d'ajouter : «les infractions pourrissent la vie de nos concitoyens qui sont parfois plus impactés par un trouble du voisinage que par un proxénétisme international».
Répondre «plus systématiquement, plus rapidement» aux rodéos
Évoquant une «justice plus partenariale», le procureur de la République de Dijon salue la «culture de l'échange» présente localement, ce qui amène à la signature du nouveau protocole.
«La convention rodéo a pour objectif de répondre à ce type d'infraction – y compris les comportements les moins dangereux –, d'y répondre plus systématiquement, plus rapidement, parce que ce sont des infractions qui se commettent sous les fenêtres de nos concitoyens».
Le protocole permettra à la collectivité d'assurer «le gardiennage des véhicules saisis dans l'attente de la confiscation par l'autorité judiciaire». Pour sa part, le parquet s'engage à poursuivre les contrevenants jusque devant l'audience du tribunal de proximité – en évitant de recourir à «un mode dégradé de poursuites» comme cela a pu être parfois le cas par le passé – et à prioriser le recouvrement des amendes en matières de rodéos.
Le procureur rappelle que les rodéos motorisés constituent une infraction spécifique du fait de la concentration de plusieurs comportements dangereux. Elle a une qualification délictuelle avec d'éventuelles circonstances aggravantes. Le refus d'obtempérer et la conduite en grand excès de vitesse peuvent venir amplifier le délit.
Dans les qualifications délictuelles, la peine moyenne sanctionnant les conducteurs est de six mois d'emprisonnement à laquelle s'ajoute la confiscation de l'engin. «Une réponse qui évite la récidive», selon le procureur.
Une fois prononcé une peine de confiscation, le véhicule devient la propriété de l’État afin d'être revendu ou détruit. À noter qu'à Besançon, certains véhicules servent pour des exercices pédagogiques de mécanique dans des lycées professionnels avant d'être envoyés à la casse.
Un gardiennage aux frais de Dijon Métropole
Entre le constat de l'infraction et le jugement, le véhicule est gardienné dans un garage automobile, parfois pendant plusieurs mois, ce qui entraîne des frais facturés par le garage.
En établissant cette convention, «Dijon Métropole s'engage à faire conserver à ses frais ces véhicules de sorte que les magistrats du parquet n'engageront pas de frais de justice qui pourraient être consacrés à autre chose», explique le procureur.
Olivier Caracotch voit là un «cercle doublement vertueux» : augmenter le nombre des saisies et de confiscation et obliger l'autorité judiciaire à répondre plus rapidement à ces délits.
Jean-Christophe Tardivon