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14/09/2021 19:26

TRANSITION ÉCOLOGIQUE : «La sobriété oui, la décroissance non», lance le président du MEDEF

Geoffroy Roux de Bézieux était l'invité d'honneur de l'université d'été du MEDEF 21 qui s'est déroulée le 9 septembre dernier à l’Écrin à Talant. «Il y a quelques fois un peu de schizophrénie entre le cerveau du consommateur et le cerveau du salarié», a indiqué le président national du MEDEF sur la question de l'augmentation des rémunérations.
Malgré les perspectives de croissance pour l'année 2021 et des statistiques de l'emploi encourageant, Geoffroy Roux de Bézieux reste «prudent» sur l'évolution de l'activité économique en France tout en conservant «un état d'esprit positif».

À Talant, le 9 septembre 2021, l'intervention de Geoffroy Roux de Bézieux à l'université d'été du MEDEF 21, sur le thème «Effondrement et émergence», s'est faite en dialoguant avec le président territorial David Butet et en présence dans la salle notamment des députés LREM Fadila Khattabi et Didier Martin et du vice-président du Département François-Xavier Dugourd (LR).

De nouveaux nuages s'accumulent au-dessus des entreprises


En marge de la table-ronde, le président national du syndicat patronal a répondu aux questions des médias.

Concernant sa «prudence», Geoffroy Roux de Bézieux signale qu'il attend de voir comment la résolution de l'ensemble des prêts garantis par l’État (PGE) va effectivement. Au début de l'été, environ la moitié des PGE avaient déjà été remboursés en Bourgogne-Franche-Comté.

Des secteurs restent encore pénalisés par la crise sanitaire : l'hôtellerie-restauration et l'événementiel notamment dont le secteur culturel. Pour les autres entreprises, de nouveaux nuages s'accumulent au-dessus d'elles : les difficultés d'approvisionnement en matières premières et les tensions sur les recrutements. La Côte-d'Or, par exemple, est proche du plein emploi avec 6% de chômage (6,8% en Bourgogne-Franche-Comté, lire notre article).

«Il faut que s'ouvre la discussion entre prix et salaires»


«On commence à voir des entreprises qui, même si c'est plus cher de produire en Europe ou en France, se posent la question de relocaliser une partie de leur chaîne de valeur», constate Geoffroy Roux de Bézieux.

«Il y a des négociations qui vont démarrer», annonce le président du MEDEF à propos d'éventuelles évolutions des rémunérations. «Si on augmente les salaires par exemple dans la restauration – où les salaires sont bas, il faut le reconnaître – cela veut dire que le prix du plat va augmenter. Il y a quelques fois un peu de schizophrénie entre le cerveau du consommateur et le cerveau du salarié, qui est le même au final. Je pense qu'il faut que s'ouvre la discussion entre prix et salaires», développe-t-il.

«Dans des métiers de services, où le salaire constitue une part très importante du prix, c'est clair qu'il peut y avoir de l'inflation. L'inflation en soi, c'est pas forcément, dans l'absolu, une catastrophe, cela dépend du niveau. Il ne faut pas revenir à l'hyperinflation mais un peu d'inflation n'est pas une mauvaise choses», analyse Geoffroy Roux de Bézieux.

Au XXème siècle, mise à part la période de l'immédiat Après-Guerre, les taux d'inflation ont connu des records à la suite des deux chocs pétroliers avec 13,7% en 1974 et 13,6% en 1980. Depuis 1994, l'inflation n'a guère dépassé les 2%, sauf lors de la crise financière de 2008, pour atteindre 2,8% cette année-là.

Cela correspond à l'objectif de la politique monétaire de la Banque Centrale Européenne de maintenir une inflation inférieure à 2%. Début septembre, la BCE a indiqué que l'inflation pourrait s'établir à 2,2% en 2021 avant de reculer à 1,7% en 2022.

«80% des emplois créés en France l'ont été dans les grandes métropoles»


«Depuis vingt ans on a assisté à une métropolisation de l'économie ; 80% des emplois créés en France l'ont été dans les grandes métropoles», constate celui qui se fait le chantre de la «mobilité géographique» auprès des décideurs. Pour autant, «la crise a l'air d'avoir rebattu les cartes», signale-t-il.

«Quand on voit effectivement la demande d'un certain nombre de salariés de faire du télétravail depuis les territoires – la Bourgogne-Franche-Comté et d'autres – il est probablement en train de se passer quelque. Il y a un signe qui ne trompe pas, c'est le prix de l'immobilier dans les villes moyennes qui, semble-t-il, est reparti à la hausse», constate Geoffroy Roux de Bézieux.

«On peut certainement faire de la croissance en consommant moins de matières»


«Le MEDEF n'appellera pas à voter pour un candidat», indique son président à propos de l'élection présidentielle de 2022. «On va confronter les candidats les plus importants à un certain nombre de défis qu'on a». Défis qui sont : comment réaliser la transition écologique, comment financer la protection sociale dont les retraites, comment améliorer le niveau de compétences et donc la formation de la population ?

En amont des élections régionales de juin dernier, le MEDEF Bourgogne-Franche-Comté avait organisé à Dijon des auditions des candidats en insistant sur les questions d'attractivité, d'infrastructures et de transition écologique (lire notre article).

Néanmoins, lors de son intervention, Geoffroy Roux de Bézieux a taclé les candidates à la primaire de l'écologie que sont Sandrine Rousseau (EELV) et Delphine Batho (Génération Écologie) en critiquant la notion même de «décroissance», lui préférant la «croissance sobre». Et d'ajouter : «on a besoin du nucléaire pour cela» tout en se revendiquant «premiers écologistes de France» au nom des entrepreneurs.

A posteriori, Geoffroy Roux de Bézieux précise sa pensée : «la sobriété, ce n'est pas la décroissance. On peut certainement faire de la croissance en consommant moins de matières, au sens général, parce que l'on a une économique qui est quand même une économie du déchet, parce que faire venir de l'autre bout de la planète des avocats du Pérou, ce n'est pas forcément utile. La sobriété oui, la décroissance non !»

Propos recueillis par Jean-Christophe Tardivon