
Pour la députée socialiste « L’inaction n’est pas une option. La seule réponse à la hauteur, c’est un investissement massif et durable dans la formation sur l'IA»
À l’occasion de l’Université de la transition numérique des territoires, Océane Godard, députée socialiste de la première circonscription de Dijon, a livré une intervention dense et engagée sur les bouleversements provoqués par l’intelligence artificielle générative. Entre opportunités économiques, risques sociaux et inégalités d’accès, elle appelle à «
un véritable projet de société » autour de l’IA.
« L’IA est une révolution enthousiasmante »Pour la députée, pas question d’adopter un discours de méfiance ou de fascination aveugle :
« L’IA générative bouleverse silencieusement mais profondément le monde du travail. Elle reconfigure les métiers, elle redistribue les compétences et elle change la manière dont on apprend et dont on collabore. »
Assumant son positionnement politique, elle a insisté :
« En tant que députée socialiste, en tant que femme de gauche, je veux porter ce discours. L’IA est une révolution enthousiasmante, stimulante. Elle peut libérer les salariés des tâches répétitives, renforcer les compétences, transformer notre manière de produire et de collaborer. »
Des transformations déjà visiblesPour illustrer ses propos, Océane Godard a cité plusieurs exemples concrets :
« Selon une enquête du Parlement européen, 37 % des traducteurs et interprètes disent déjà travailler sur des textes pré-traduits par l’IA. Ils évoluent vers des tâches de correcteurs plutôt que d’auteurs. »Même évolution dans le service client :
« Orange a annoncé en 2024 que 30 % des demandes simples passaient désormais par des chatbots, libérant du temps pour d’autres missions. »D’autres grands groupes montrent aussi la voie : Renault, Schneider Electric, Air France… autant d’entreprises qui forment massivement leurs salariés à l’usage de l’IA.
« Ces exemples montrent que l’IA peut finalement alléger le travail répétitif et ouvrir la voie à une société de la connaissance où l’humain garde la valeur ajoutée », estime la députée.
Des risques majeurs pour l’emploi et l’égalitéMais l’élue alerte aussi sur les dangers :
« L’IA tend à automatiser en priorité les tâches répétitives et standardisables. Or ce sont précisément celles qui se retrouvaient souvent dans des postes peu qualifiés ou dans les emplois d’entrée sur le marché du travail. »
Elle cite les chiffres de l’Organisation internationale du travail : 75 millions de postes dans le monde seraient directement affectés, notamment dans des secteurs féminisés comme les centres d’appel ou les services administratifs.
« Cela va accroître l’écart entre les hommes et les femmes », prévient-elle.
Les jeunes générations ne sont pas épargnées :
« Une étude menée en août 2025 montre une baisse de 13 % de l’emploi des 22-25 ans dans les métiers exposés à l’IA depuis fin 2022. Moins 20 % pour les développeurs juniors, moins 16 % pour le marketing et le service client. L’IA ne supprime pas les métiers, elle frappe surtout les postes d’entrée de carrière. »
L’urgence de la formation et du dialogue socialFace à ces bouleversements, Océane Godard est catégorique :
« L’inaction n’est pas une option. La seule réponse à la hauteur, c’est un investissement massif et durable dans la formation, dès l’école et tout au long de la vie. »Elle propose notamment de développer des parcours hybrides mêlant IA, droit, éthique et sciences sociales, mais aussi d’innover en formation continue avec des outils comme la réalité virtuelle et les chatbots pédagogiques.
Autre priorité : renforcer le dialogue social.
« L’information et la consultation obligatoire des CSE doivent accompagner chaque déploiement d’IA. Aujourd’hui, seulement 242 accords d’entreprise mentionnent l’IA sur plus de 285 000. C’est insuffisant. » Pour la députée, ce dialogue est une garantie, pas un frein :
« Il sécurise les usages et protège les salariés. »
Vers un nouveau pacte social autour de l’IAAu-delà de la formation, Océane Godard appelle à un « pacte social » autour de l’intelligence artificielle :
« Partager les bénéfices de l’IA, c’est aussi protéger les parcours professionnels, reconnaître les nouvelles compétences et garantir un droit à la formation tout au long de la vie. »Deux trajectoires s’offrent à la société, selon elle :
« La première consiste à laisser prospérer une IA qui aliène, qui intensifie le travail, qui enferme les travailleurs dans une logique de performance brutale. La seconde, que je vous invite à suivre, valorise l’humain, sécurise les parcours et diffuse les savoirs. »
« Un sujet fondamental de la présidentielle de 2027 »Pour conclure, la députée a insisté sur l’importance de placer l’IA au cœur du débat public :
« L’intelligence artificielle doit être un sujet fondamental de la prochaine élection présidentielle en France en 2027. Car elle va déterminer nos emplois, notre économie, nos inégalités et, au fond, la manière dont nous voulons vivre ensemble et bien vivre ensemble. »
Manon Bollery
