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30/03/2024 18:35

BOURGOGNE-FRANCHE-COMTÉ : «Il y a un engouement pour l'entrepreneuriat chez les femmes», note Marie-Guite Dufay

Dans les locaux de Lasertec, des dirigeantes d'entreprises et des cadres ont témoigné de leurs parcours pour «faire avancer l’égalité entre les femmes et les hommes» dans la vie économique. «Un tiers des créateurs d'entreprises sont des femmes», a relevé le préfet Franck Robine, le 8 mars dernier, à Arceau.
Depuis 2023, un plan d'action interministériel, répondant au mot d'ordre «Toutes et tous égaux», mobilise l'ensemble du gouvernement pour «concrétiser» l'égalité entre les femmes et les hommes sur le plan professionnel, économique et social. Une recherche d'égalité faite «grande cause du quinquennat» par Emmanuel Macron.

Le 8 mars dernier, à Arceau, Marie-Guite Dufay (PS), présidente du conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté, et Franck Robine, préfet de la région Bourgogne-Franche-Comté, se sont rendus dans les locaux de Lasertec pour échanger avec des cheffes d’entreprise et des salariées intervenant dans des secteurs d'activité très peu féminisés.


Une journée pour «valoriser des actions qui font avancer l’égalité entre les femmes et les hommes»


À cette occasion, le représentant de l’État a annoncé également la création du portail régional d’informations «Les entrepreneuses».

Selon la préfecture, «la Journée internationale des droits des femmes est l’occasion de valoriser des parcours, des actions et des projets qui font avancer l’égalité entre les femmes et les hommes notamment dans la vie économique où les différences sont encore marquées : sectorisation des métiers, inégalités salariales notamment».

«Il n'existe pas beaucoup d'entreprises qui découpent du métal, du plastique, du papier»


Entreprise spécialisée dans le marquage et la découpe laser, Lasertec a été crée en 1991 puis reprise en 2022 par Frédérique Le Floch, ex-directrice des ressources humaines ayant souhaité se reconvertir, accompagnée par l'association Cédants et repreneurs d'affaires (CRA) et lauréate du concours Initiatives au féminin. Elle bénéficié d'une avance remboursable de 200.000 euros accordée par la Région Bourgogne-Franche-Comté.

L'entreprise emploie six salariés et un responsable de production est en cours de recrutement. Le chiffre d'affaires annuel approche un million d'euros. Frédérique Le Floch envisage un accroissement de 50% de l'activité d'ici 5 ans.  «Il n'existe pas beaucoup d'entreprises qui découpent du métal, du plastique, du papier», signale la dirigeante.

Les besoins relèvent de la communication jusqu'à la micromécanique. 95% des commandes sont passées par des entreprises françaises, les autres sont basées en Suisse, en Belgique ou encore au Luxembourg. La plupart des machines sont conçues en Italie.

«Il y a un engouement pour l'entrepreneuriat chez les femmes», constate Marie-Guite Dufay


«Un tiers des créateurs d'entreprises sont des femmes et dans la tech', c'est seulement 6%», relève le préfet pour lancer la table-ronde.

Pour sa part, Marie-Guite Dufay note que «nous progressions dans notre région» sur ce sujet. «Depuis trois ans, on voit qu'il y a un engouement pour l'entrepreneuriat chez les femmes, c'est peut-être le résultat d'un certain nombre de politiques publiques que nous mettons en place.»

«Il y a plus de diplômés [de l'enseignement supérieur] femmes que hommes», constate Bruno Bethenod (sans étiquette), maire d'Arceau, «à un moment donné, il y a une discordance».

«Geoffroy Roux de Bézieux a créé le réseau Femmes du MEDEF», signale Élisabeth Grenin


Dirigeante de l'entreprise familiale de transports Daniel Grenin et présidente du MEDEF Bourgogne-Franche-Comté, Élisabeth Grenin indique avoir instauré dès sa prise de fonctions «un dialogue» avec ses salariés, très majoritairement des hommes : «je n'ai pas eu de souci».

En revanche, elle reconnaît que, à l'extérieur de la société, l'image de «la fille à papa qui reprend l'entreprise» lui collait aux chaussures. Avec le temps, «des relations de confiance» se sont installées.

«Quand Geoffroy Roux de Bézieux a été élu à la tête du MEDEF en 2018, il a créé le réseau Femmes du MEDEF pour mettre en avant les femmes et s'est engagé sur la parité dans les instances nationales et les commissions sont dirigées par des binômes», signale Élisabeth Grenin.

«Je suis dans une entreprise qui m'a laissé ma chance en tant que femme», témoigne Barbara Bredillet


Ingénieure et cheffe de l'Agence de supervision des accès au réseau et des dépannages (ASGARD) d'Enedis en Bourgogne, Barbara Bredillet indique avoir intégré le groupe EDF en 1999 et le groupe Enedis en 2012. Elle manage une trentaine de personnels – très majoritairement des hommes – travaillent en service continu.

«Je suis dans une entreprise qui m'a laissé ma chance en tant que femme», témoigne-telle, «il y avait 20 ans en arrière, il n'y avait pas de femmes dans l'ingénierie-construction réseau».

«Le frein que j'ai rencontré, c'est au niveau des banques», se souvient Maryse de Stefano


Dirigeante de l'entreprise familiale de BTP Stefano et présidente de la Fédération française du bâtiment Bourgogne-Franche-Comté, Maryse de Stefano insiste sur le fait «d'avoir une certaine maturité» pour «comprendre le monde du travail» avant de devenir responsable d'une entreprise. «Quand on sort du domaine scolaire, on n'a absolument pas l'idée de ce qu'est le monde du travail.»

«Alors que je suis dans un monde d'hommes, je n'ai jamais rencontré de frein, loin de là», témoigne-t-elle. «Je ne vais pas poser du carrelage mais je vais essayer de comprendre comment on procède. Je vais regarder la sécurité des salariés et leur bien-être. Nous avons des problèmes de maladies professionnelles donc il faut absolument être très regardant sur ce sujet-là, d'autant plus que nos salariés vont devoir travailler plus longtemps.»

«Le frein que j'ai rencontré, c'est au niveau des banques», se souvient  Maryse de Stefano, ce qui fait écho auprès des autres participantes. «j'ai eu des refus catégoriques»

«Après mes deux grossesses, j'ai monté les échelons», indique Nathalie Moreau


Responsable de conditionnement au sein d'Amora Maille à Chevigny-Saint-Sauveur, Nathalie Moreau supervise une centaine de personnes dont 40% de femmes. «Quand on travaille à l'usine, la difficulté, c'est le 3x8, et de trouver la garde des enfants», constate-t-elle.

«Je n'ai jamais eu de problème en tant que femme chez Amora Maille», témoigne Nathalie Moreau, «après mes deux grossesses, à chaque fois, j'ai monté les échelons». «Je ne veux pas faire de la discrimination positive, je recrute des femmes parce qu'elles ont des compétences.»

Concernant les charges à manipuler, «on automatise un maximum pour le bien-être des salariés et éviter d'abîmer», signale-t-elle, «ça n'a plus rien à voir avec ce qui se faisait avant».

Xavière Castano a évolué dans un milieu composé «d'hommes de 20-30 ans de plus» qu'elle


Cofondatrice de la biotech Crossject, Xavière Castano a mené des études en pharmacie doublée d'une école d'ingénieurs qui ont débouché sur le projet innovant Zeneo même si elle évoluait alors dans un milieu très masculin composé «d'hommes de 20-30 ans de plus» qu'elle.

Valérie Gérarduzzi reçoit «surtout des CV de femmes»


Dirigeante des laboratoires cosmétiques Polydermyl Cosminter, Valérie Gérarduzzi témoigne d'une forme de discrimination positive. Candidate au CAPES, elle a été recalée au concours pour une note éliminatoire et sa réclamation a été repoussée car la profession était considérée comme trop féminisée.

Cet aléas l'a conduite à reprendre l'entreprise familiale, à superviser un déménagement de Vitteaux à Fleurey-sur-Ouche, a doublé le chiffre d'affaires en quelques années et a lancé la gamme locale haut de gamme «Bulles & Gourmandises».

Le personnel est principalement féminin car arrivent «surtout des CV de femmes» lors des périodes de recrutement et, même, les sartups qui font appel à Polydermyl Cosminter pour développer des produits sont majoritairement dirigées par des femmes.

L'entreprise de 25 salariés accueille des travailleurs en situation de handicap – dont une femme – dans le cadre d'une convention passée avec l'Acodège : «ils sont complètement intégrés à l'ensemble des collaborateurs ; l'expérience est très riche».

«J'ai connu le plafond de verre», témoigne Yasmine Ladjouze


Directrice industrielle de la startup Inocel, Yasmine Ladjouze est également déléguée régionale de l'association Elles Bougent qui «lutte contre les stéréotypes auprès des jeunes filles» et fait «la promotion des métiers techniques, scientifiques, d'ingénieurs».

«J'ai connu le plafond de verre», témoigne celle qui est issue des métiers de la maintenance puis du marketing dans l'industrie automobile où elle a managé jusqu'à 500 personnes. «J'ai découvert le sol gluant : on ne m'a pas laissé aller plus loin, on n'avait tellement besoin de moi sur le poste sur lequel j'étais.»

D'où un départ pour «retrouver de l'autonomie» et l'entrée au sein d'Inocel. Basée à Grenoble (Isère), Inocel conçoit des prototypes de piles à combustible et prépare le lancement d'une usine à Belfort.

«J'ai été coachée par la directrice précédente», indique Cécile Araud


Ingénieure bâtiment et directrice régionale C3B, une filiale du groupe Vinci, Cécile Araud manage des équipes de production totalement masculinisées. «J'ai été coachée par la directrice précédente qui était une des seules femmes chez Vinci à ce poste-là, qui m'a embauchée, qui m'a poussée.»

«On travaille sur la sécurité de nos chantiers, sur l'amélioration des conditions de travail et l'image que l'on peut donner», indique-t-elle. «Dans les équipes d'encadrement, on a des jeunes femmes sur nos chantiers, autour de 15%. (…) Malheureusement, il y a peu de CV.»

Quoi faire pour les jeunes filles ?


Constatant que «les métiers sont genrés dès le départ», la présidente du MEDEF Bourgogne-Franche-Comté appelle à sensibiliser les élèves «dès les petites classes» pour «ouvrir le champ des possibles».

Prenant l'exemple de l'Institut supérieur de l’automobile et des transports, école d'ingénieurs à Nevers, qui recense une cinquantaine de femmes parmi les quelques 800 étudiants, Élisabeth Grenin incite à «pousser les filles» vers les sciences de la nature et les sciences formelles.

«Il faudrait que ce soit une culture, dans les collèges et les lycées que, chaque année, il y ait des visites d'entreprise», revendique Marie-Guite Dufay, «pour cela, il faudrait que les entreprises acceptent de consacrer du temps».

Constatant que les démarches scientifiques sont «souvent décriées sur les réseaux sociaux», Bruno Bethenod signale que l'Association des maires ruraux de la Côte-d'Or qu'il préside a passé une convention avec l'Institut Agro Dijon que des élèves-ingénieurs interviennent dans les écoles primaires, durant le temps scolaire, pour évoquer des sujets comme le cycle de l'eau ou encore le sucre ainsi que des métiers ouverts aux ingénieurs de façon à sensibiliser les petites filles comme les petits garçons.

«Petite-fille de paysans» avec «un bagage scientifique en biochimie», Nathalie Moreau se souvient des travaux agricoles menés durant les vacances scolaires et témoigne de la pertinence de «travailler dès le plus jeune âge» pour «constater la capacité de faire un métier d'homme».

Barbara Bredillet appelle les entreprises et organismes à développer leur présence sur les salons comme le Carrefour des carrières au féminin tandis que Maryse de Stefano incite à mettre en place des parrainages des candidates à l'entrepreneuriat.

En juin prochain, la Fédération française du bâtiment organisera l'événement «Les Essentielles» destinés aux femmes ayant un projet professionnel dans le secteur du bâtiment. Des dirigeantes présenteront leur quotidien.

Plus globalement, Ait Youcef, responsable d'équipe de l'agence France Travail à Quetigny, met en avant la méthode de recrutement simulation qui, ne reposant par sur un CV, permet «d'éviter les discriminations». Cela peut se doubler d'un temps de formation directement en entreprise.

Concernant la vie de famille, Élisabeth Grenin pointe tout particulièrement la difficulté pour les indépendantes et les dirigeantes de très petites entreprises de devoir reprendre l'activité seulement quelques jours après un accouchement : «tant que ce problème-là n'est pas résolu, on va avoir du mal à avancer».

Une future plateforme «Les Entrepreneuses»


D'ici l'été, la préfecture de la région Bourgogne-Franche-Comté lancera la plateforme numérique «Les Entrepreneuses» destinée aux femmes créatrices ou repreneuses d’entreprise.

La première version est présentée au préfet et à la présidente de Région par Laurence Guillet et Isabelle Gandré, respectivement, déléguée régionale en Bourgogne-Franche-Comté et déléguée départementale en Côte-d'Or chargées de l'égalité femmes-hommes.

Crée par les services déconcentrés de l’État, le dispositif a été financé notamment par BPI France et la Région Bourgogne-Franche-Comté dans le cadre du plan d’action régional pour l’entrepreneuriat des femmes (PAREF)

Selon la préfecture, «cette plate-forme permettra d’identifier interlocuteurs, dispositifs existants ou documents ressources pour la création ou la reprise d’entreprise».

Jean-Christophe Tardivon

Le Forum Lady'j Tech pour «mettre en lumière des femmes fondatrices de startups»
































































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