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03/08/2023 11:47
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RELATIONS INTERNATIONALES : La Région Bourgogne-Franche-Comté prépare un partenariat avec l'oblast ukrainien de Vinnytsia

Au retour d'un déplacement dans l'ouest de l'Ukraine, le vice-président Patrick Molinoz a exposé, ce mercredi 2 août, les enjeux d'une coopération économique et universitaire entre les deux régions.
Le «Monsieur Europe» du conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté s'est rendu, les 19 et 20 juillet derniers, à Vinnytsia, en Ukraine, pour échanger en présentiel avec les autorités du secteur et poser les bases d'un éventuel partenariat.

Ce déplacement se situe dans un contexte où, depuis l'invasion de l'Ukraine par la Fédération de Russie, en février 2022, Marie-Guite Dufay (PS), présidente de la Région Bourgogne-Franche-Comté, a affiché sa volonté politique de soutenir le pays et les populations agressées.

«Il s'agit de montrer symboliquement le soutien à l'Ukraine», a résumé Patrick Molinoz (PRG-Centre gauche), ce mercredi 2 août 2023, en exposant les enjeux du déplacement. Un symbole pouvant se traduire par une future signature de convention entre les représentants de Bourgogne-Franche-Comté et de Vinnytsia.


Patrick Molinoz représente la Bourgogne-Franche-Comté au Comité européen des Régions


Le 10 juin 2022, en recevant son homologue allemande (lire notre article), Marie-Guite Dufay annonçait vouloir associer une région d'Ukraine à la convention quadripartite existant entre la Bourgogne-Franche-Comté, la Rhénanie-Palatinat ainsi que les régions d'Opole (Pologne) et de Bohème centrale (République tchèque).

Vice-président du conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté, chargé notamment des politiques européennes et des actions internationales, et vice-président de la commission CIVEX (Citoyenneté, gouvernance, affaires institutionnelles et extérieures) du Comité européen des Régions, organe consultatif de l'Union européenne qui associe les collectivités locales au processus décisionnel (lire le communiqué), Patrick Molinoz s'est emparé du sujet.

De précédents contacts avec Vitagora


L'élu europhile s'est appuyé sur des échanges initiés depuis plusieurs années entre Vitagora, pôle de compétitivité du secteur de l'agroalimentaire, et les autorités de Vinnytsia, certains responsables ayant déjà été reçus en Bourgogne-Franche-Comté avant la crise sanitaire.

De son côté, via la commission CIVEX, Patrick Molinoz avait participé à des groupes de travail impliquant les Villes et Régions de l'Union européenne soutenant les populations d'Ukraine. Cela lui avait permis d'échanger avec des représentants d'universités, d'organisations de jeunesse ainsi que de collectivités ou d'administrations ukrainiens. Parmi eux, certains étaient de Vinnytsia.

Des «points communs» sont apparus entre la Bourgogne-Franche-Comté et Vinnytsia qui est une région fortement agricole et comptant une université technique réputée en Ukraine.

Une fois la région définie, des échanges en visioconférence ont eu lieu ces derniers mois pour définir les thématiques à aborder et préparer le déplacement effectif d'une toute petite délégation : le vice-président et un agent de la collectivité.

L'oblast de Vinnytsia comptait 1,5 million d'habitants avant la guerre


Vinnytsia se situe à 200 km environ au sud-ouest de Kiev, à 100 km environ de la Moldavie. Elle est la capitale de l'oblast, ou région administrative, du même nom, ainsi que de la région historique de Podolie.

Avant la guerre, l'oblast comptait 1,5 million d'habitants et la ville 380.000 habitants. Aujourd'hui, l'oblast compterait également 150.000 personnes déplacées dont 50.000 dans la capitale régionale.

Pour se rendre à Vinnytsia, Patrick Molinoz a pris l'avion jusqu'à Chișinău, capitale de la Moldavie, en transitant par Bucarest, capitale de la Roumanie. La fin du trajet s'est effectué en voiture, les 300 km jusqu'à Vinnytsia ayant été parcourus en 6 heures, contrôles à la frontière compris.

Deux alertes dans la nuit


Dans la nuit du 19 au 20 juillet, la délégation a connu deux alertes du fait de missiles russes lancés sur l'Ukraine. Si la situation est plus calme à l'ouest qu'à l'est, c'est bien le pays tout entier qui continue de vivre sous la menace des armes russes.

Un couvre-feu s'impose de minuit à 5 heures du matin. Des alertes peuvent être déclenchées dès qu'un tir de missile est détecté. Ensuite, ce sont les médias sociaux qui sont utilisés pour communiquer sur la ville ciblée afin d'orienter effectivement la population vers les abris. Cette nuit-là, les habitants de Vinnytsia n'ont pas eu à le faire.

«Il y a la vie du front et la vie à l'arrière», commente Patrick Molinoz». «À Vinnytsia, c'est une zone calme dans un pays en guerre, il y a des gens dans les restaurants, on voit beaucoup de jeunes dans les rues mais pas beaucoup de jeunes hommes».

Un oblast sans administration décentralisée


En Ukraine, l'organisation des collectivités n'est pas aussi décentralisée qu'en France. S'il existe un conseil régional élu par la population, il ne dispose pas d'une administration pour mettre en œuvre ses politiques. C'est le rôle d'une préfecture régionale, en quelque sorte, dont le préfet est désigné par l'exécutif national.

L'élu de Bourgogne-Franche-Comté a donc rencontré des représentants de l'entité administrative régionale, des élus de l'oblast, dont le président Vyacheslav Sokolovyi, et des élus de la Ville de Vinnytsia.

Dans le contexte d'un rapprochement voulu par l'Ukraine de l'Union européenne, des exigences de transparence s'imposent. Les questions partisanes sont ainsi à appréhender tout en tenant compte du contexte de la guerre qui tend à fédérer toutes les composantes souhaitant défendre l'Ukraine.

«On a cherché à voir par nous-mêmes», indique Patrick Molinoz, «il n'y a pas, à ce stade, d'indice qui laisserait penser que ces gens ne seraient pas respectables». Au regard de cette situation complexe, les élus de l'oblast et de la Ville sont apparus «pro-européens», voire même «de centre-gauche».

Puisque les échanges sont appréhendés entre la Région et l'oblast, les représentants de l'oblast de Vinnytsia ont défini le programme concret et sélectionnés les invités que la délégation a rencontrés lors des réunions avec les autorités et les visites de sites.

Visite d'une université technique et d'une brasserie


Les deux envoyés de Bourgogne-Franche-Comté ont pu découvrir l'Université nationale technique de Vinnytsia. Selon Patrick Molinoz, il s'agit d'un établissement d'enseignement supérieure présentant des compétences avancées dans le secteur numérique dont la cybersécurité.

Figuraient également au programme la visite d'une entreprise du secteur de l'agroalimentaire – en l’occurrence, une brasserie produisant de la bière avec un outil industriel flambant neuf fait de machines hongroises – et un centre de personnes déplacées proposant des formations équivalentes à celles d'un CFA en matière de mécanique, soudure ou encore cuisine.

Autre temps fort, un moment de recueillement près d'un immeuble commercial du centre-ville qui a été bombardé par l'armée russe, le 14 juillet 2022. Un acte de guerre qui a fait 28 morts, dont 3 enfants, 197 blessés et 4 disparus.

Priorités à l'agriculture et à la recherche


Sur le plan institutionnel, l'élu de centre-gauche note que «l'Union européenne a une démarche d'accompagnement en terme de transparence et de lutte contre la corruption». En fonction de quoi, «on peut imaginer des échanges de savoir-faire d'élus et de fonctionnaires dont [les Ukrainiens] pourraient s'inspirer».

Une coopération économique pourrait découler d'un futur partenariat entre les deux régions. «Il y a des marchés pour des entreprises françaises et il y a peut-être des opportunités en France pour les entreprises ukrainiennes», analyse Patrick Molinoz. «Le partenariat pose un cadre institutionnel en définissant un thème prioritaire et ensuite ce sont les acteurs qui entrent dans l'opérationnel».

Les interlocuteurs rencontrés sont notamment demandeurs de pouvoir exporter de la bière et de la moutarde au sein de l'Union européenne. «Les échanges avec les professionnels de l'agriculture sont un vrai axe à travailler», insiste l'élu régional.

En dehors de l'agriculture, l'axe de la recherche pourrait être priorisé puisque la convention quadripartite a déjà débouché sur un master commun portant sur le droit européen.

«Un an après, la Bourgogne-Franche-Comté est la seule Région a avoir renouvelé son aide»


«Il y a de la matière à mettre dans un partenariat au-delà du soutien politique, symbolique et humanitaire. (…) Un jumelage pourrait renforcer la densité d'un partenariat», évoque Patrick Molinoz en référence à des démarches ainsi favorisées en Allemagne.

«Il y a eu un très grand mouvement de solidarité français pro-Ukraine.  La solidarité a été très forte dans une logique humanitaire, comme en réponse à une catastrophe naturelle ; on est dans un tremblement de terre qui a des répliques permanente», analyse l'élu régional. «Un an après, la Bourgogne-Franche-Comté est la seule Région a avoir renouvelé son aide.»

«Le sujet, c'est le soutien dans la durée», poursuit Patrick Molinoz, «c'est dans la durée qu'il faut s'inscrire, pour l'aspect quotidien et préparer une reconstruction d'où l'idée d'un partenariat qui entraîne de nombreux secteurs des activités humaines».

Dans l'immédiat, la délégation a prévu d'effectuer avec Vitagora un bilan à la fin du mois d'août avant d'envisager un nouveau déplacement à Vinnytsia, impliquant cette fois une délégation plus importante.

Jean-Christophe Tardivon













Photographies DR


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