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02/03/2022 18:19

SALON DE L'AGRICULTURE : Le loup s'invite dans la déambulation de Marie-Guite Dufay

«On va relâcher les agneaux, ça va être le carnage», a alerté une représentante des éleveurs de moutons charollais ce mercredi 2 mars. Christian Decerle, président de la chambre régionale d'agriculture, considère que «l'élevage ovin disparaîtra» en cas de «prolifération de loups».
Une séquence clivante de politique agricole a émaillé la déambulation de Marie-Guite Dufay (PS), présidente du conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté, lors de la journée consacrée à la collectivité ce mercredi 2 mars 2022 au Salon international de l'Agriculture.

La présidente de Région était accompagnée de Fabien Sudry, préfet de la région Bourgogne-Franche-Comté, et de Christian Decerle, président de la chambre régionale d'agriculture, ainsi que de plusieurs élus de sa majorité dont Christian Morel (sans étiquette), vice-président en charge de l'agriculture, ou encore Jérôme Durain (PS), Océane Charret-Godard (PS) et Claire Mallard (EELV). Sénatrice de la Saône-et-Loire, Marie Mercier (LR), était également présente, ainsi que Gérald Gordat (Agir), élu régional d'opposition.


«On est très inquiet sur ce sujet-là»


«C'est la grande inquiétude», alerte d'emblée Aline Bonnot à l'arrivée de Marie-Guite Dufay sur le stand de l'organisme de sélection du mouton charollais. «Le printemps va arriver, on va relâcher les agneaux, ça va être le carnage, (…) on est très inquiet sur ce sujet-là», indique la directrice de l'association du Mouton Charollais.

Le ton est donné. Il s'agit d'interpeller la présidente d'une coalition centre-gauche-socialistes-communistes-écologistes sur les prédations parmi le cheptel ovin présumément attribuées à des loups, tout particulièrement en Saône-et-Loire même si la Côte-d'Or et d'autres départements de la région sont concernés par la problématique. La position des écologistes favorables au développement du grand prédateur rencontre l'opposition d'une majorité d'éleveurs.

«La population de loups remet sur la table son statut»


«L’État ne peut déroger au statut d'animal protégé», concède Christian Decerle. «Reste qu'aujourd'hui, la population de loups remet sur la table son statut», ajoute-t-il, «on peut parler de biodiversité tant qu'on veut, dans notre région, s'il y a une attaque trois fois dans une vie d'éleveur, ça sera supporté mais à partir du moment où le loup est installé et où il y a une prédation soutenue, c'est l'élevage qui disparaîtra».

«On a une ouverture au niveau de l'Europe avec de nouvelles discussions qu'il n'y avait pas auparavant parce que d'autres pays se trouvent face à un fléau de la prédation», rebondit Aline Bonnot en évoquant des échanges récents avec le député européen Jérémy Decerle (majorité présidentielle).

La question de la protection de l'élevage ovin en territoire de bocage


«Depuis trente ans, dans le sud-est, ils mettent des moyens de protection, ça ne marche pas», martèle Aline Bonnot. Au niveau national, la filière ovin met en avant le nombre de 12.000 brebis tuées en 2017 tandis que la direction régionale de l'Environnement, l'Aménagement et du Logement (DREAL) de la région Auvergne-Rhône-Alpes, chargée de la mission Loups, indique avoir indemnisé en 2016 les éleveurs pour plus de 9.300 brebis prédatées à l'issue des évaluations «loup non écarté» effectuées par les agents de l'Office Français de la Biodiversité.

«Le système d'élevage chez nous n'est pas adapté à ce système de protection», analyse Marie-Guite Dufay en évoquant les chiens de troupeau et les filets de protection pour la nuit. La présidente de la Région s'accorde avec le président de la chambre régionale d'agriculture pour considérer que le sujet concerne «la prolifération» du grand prédateur : «un animal qui est protégé, c'est un animal qui est en voie de disparition».

Des éleveurs contestant la colonisation du loup en France se sont réunis dans le collectif «Pâturage et biodiversité» qui a produit une lettre à destination des candidats à l'élection présidentielle. Aline Bonnot a également remis ce courrier à Marie-Guite Dufay.

«Le monde de l'élevage veut bien témoigner d'une forme de compréhension, de bonne volonté mais c'est impossible», renchérit Christian Decerle qui évoque la situation dramatique d'un jeune éleveur près de Cluny qui a été attaqué «sept fois malgré les moyens de protection, il avait mis les filets».

Pour sa part, Christian Morel signale avoir demandé à Régions de France qu'un groupe de travail sur le loup soit créé pour que «les Régions travaillent ensemble avec le ministère de l'Agriculture pour trouver une solution».

«Le loup revient de lui-même»


«On va vers la mort de l'élevage», anticipe Aline Bonnot en s'adressant à Claire Mallard, «il faut trouver une solution pour qu'il puisse vivre dans les régions où il apporte quelque chose mais c'est incompatible avec les régions d'élevage».

«Ce n'est pas l'être humain qui va décider de dire au loup où il doit vivre», commente l'élue écologiste, «le loup n'a pas été réintroduit par l'homme, (…) c'est un signal positif pour la biodiversité, (...) le loup revient de lui-même». «Il va falloir que l'on se donne les moyens de cohabiter avec, pour préserver les élevages mais le loup n'a pas de frontière», insiste-t-elle.

Des autorisations de tirs de prédateurs


«C'est un vrai enjeu de société», estime le préfet de la région Bourgogne-Franche-Comté qui rappelle que la réglementation permet des «tirs de défense», une autorisation que le préfet de la Saône-et-Lois a plusieurs fois accordée dans ce département.

Les tirs de défense permette aux éleveurs eux-mêmes de cibler sur un animal suspecté d'attaque. La riposte supplémentaire étant les tirs de prélèvement où les louvetiers vont alors volontairement chasser un prédateur présumé responsable d'attaques. Là aussi, cela a déjà été le cas en Saône-et-Loire (lire le communiqué).

«Cette biodiversité sera rapidement confrontées à des arbitrages impossibles»


«Je parle quand même au nom des paysans et au nom des éleveurs», déclarera Christian Decerle en revenant sur le sujet lors du temps de discours officiels sur le stand du conseil régional, «quand il y a une présence constante d'un prédateur, à terme, il y aura une cohabitation impossible».

«Cette biodiversité que nous appelons toutes et tous de nos vœux sera rapidement confrontées à des arbitrages impossibles», poursuivra-t-il en posant une pierre dans le jardin des élus.

«Non, aucun éleveur, ici, sur ce territoire, ne rentrera tous les soirs son troupeau derrière un filet dont la protection a atteint ses limites. C'est incompatible avec notre type d'élevage, avec nos pratiques, avec une charge de travail structurelle. (…) Nous butons-là sur un sujet auquel nous n'avons pas d'autre choix que de trouver une solution. Je vous dis ma position : je préfère l'éleveur, son troupeau, tout ce qu'il représente sur les territoires ruraux, à un prédateur que je suis prêt à tolérer seulement et seulement si il n'interdit pas la pratique de l'élevage. Mes amis, si on veut, si on ne sait, si on est tellement embourbé dans un truc inextricable que c'est mal ficelé et une cohabitation impossible alors, je vous le dis, l'élevage ovin disparaîtra», développera-t-il.

Nantie de ce soutien, la filière a donc «l'espoir» de se faire entendre du gouvernement pour infléchir le Plan national Loup qui fixe les mesures à mettre en œuvre pour la gestion de l'espèce protégée jusqu'en 2023.

Jean-Christophe Tardivon

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